Casse fiscal du siècle, comme titre Le Monde ? Il n’y a aucun doute. Dix-neuf quotidiens européens dévoilent une nouvelle fraude fiscale qui, entre 2005 et 2012, a permis à des banques et des fonds d’investissements de soustraire 55 milliards à quelques Etats du vieux continent (Allemagne, France, Danemark, Suisse, Belgique, Autriche et Norvège).

Le Monde écrit : « Alors que les Etats renflouaient les banques pendant la crise, des financiers ont mis en place, dès 2011, une escroquerie inédite. »L’Allemagne aurait été la principale victime avec des pertes pour ses recettes fiscales évaluées entre 7 et 12 milliards ; « En France, dit encore Le Monde, l’arbitrage des dividendes permet aux investisseurs de ne pas payer 3 milliards par an. »

Il rapporte également : « Pour que le casse fiscal fonctionne, il a fallu une large coopération entre tradeurs, courtiers, fonds, avocats et banques. L’enquête révèle qu’au moins cinquante des plus grandes institutions financières de la planète y ont participé, à des degrés divers. Parmi elles, les banques françaises BNP Paribas, Société générale et Crédit agricole. »

Le mécanisme est simple : en France (le procédé est différent ailleurs en raison des systèmes fiscaux propres à chaque pays), les actionnaires étrangers d’une entreprise cotée en bourse reçoivent des dividendes. Avant leur versement, ils transfèrent l’espace de quelques jours leurs actions à un autre actionnaire basé à l’étranger. C’est donc cet actionnaire d’un jour qui va recevoir les fameux dividendes et, en raison de l’exonération dont bénéficient les actionnaires étrangers d’entreprises basées en France (0 %), ils ne paieront pas la taxe de 15 % à 30 % qu’aurait payé celui qui est le véritable détenteur des actions. Celles-ci font alors le chemin inverse pour être rendues avec les dividendes au vrai propriétaire. Et tout ce beau monde se partage les bénéfices réalisés sur le dos de l’Etat, c’est-à-dire la taxe sur les dividendes.

Il s’agit d’une nouvelle forme d’optimisation fiscale, baptisée CumCum (CumEx, ailleurs en Europe)  reposant sur des conventions entre Etats parfaitement légales; le scandale est d’autant plus énorme que les ministres prétendent ne pas avoir été au courant d’une pratique qui, elle, est franchement illégale, à savoir échapper aux taxes sur les dividendes.

En Allemagne, le procédé était encore plus pervers puisque les CumEx permettaient non seulement de ne pas payer les taxes mais d’en obtenir le remboursement.

En France, le coût de l’opération, environ 3 milliards par an, est supérieur au budget consacré à la lutte contre la pauvreté.

C’est sans doute cela que le président de la République appelle le ruissellement.

Ce monde la finance est vraiment pourri. Mais s’il faut condamner les coupables et demander les remboursements, il faut surtout changer un système, très sophistiqué, permettant toutes les magouilles pour ceux qui ont un pognon de dingue et qui saignent les Etats.