Les ‘’salauds’’ de pauvres sont de plus en plus nombreux dans la cinquième nation économique. Ces pauvres ont de nouveaux visages. Le Secours populaire a constaté que des gens qui vivaient modestement et discrètement mais qui subvenaient à leurs besoins n’ont plus de quoi manger aujourd’hui.
L’association est venue en aide à 1 270 000 personnes durant les deux mois du confinement, contre 3,3 millions durant toute l’année 2019.
La précarité explose et fait grossir les files d’attente des associations qui souhaitent faire vivre la solidarité.
Qui se soucie de la solidarité au plus haut niveau de l’Etat ? Les aides sont prioritairement distribuées aux entreprises, qui continuent à distribuer, elles, des dividendes aux fonds d’investissement et aux boursicoteurs et suppriment des emplois par milliers.
Les uns comptent en centimes quand quelques-uns comptent en milliards.
La situation est dramatique ; les associations alertent et font face, elles aussi, à la crise. Le président de la République, lui, ne voit rien, n’entend rien et, surtout, ne fait rien.
Les nouveaux visages de la pauvreté sont terriblement accusateurs ; ils sont le témoignage de la cruauté du système capitaliste et de son égoïsme incommensurable. Le ministre de l’économie, l’obtus Bruno Le Maire, ne pense qu’à remettre la réforme des retraites à l’ordre du jour. Le premier ministre, l’obscur Jean Castex, n’a pas un mot pour condamner ceux qui vont plonger les familles des salariés de Bridgestone et des sous-traitants dans cette pauvreté tant redoutée. Le président de la République qui avait promis qu’il n’y aurait plus un homme condamné à coucher dans la rue à la fin de sa première année de mandat, préfère aller donner des leçons au Liban, en Méditerranée, en Biélorussie en évitant de croiser le regard des nouveaux pauvres.
Il y a 171 ans dans un discours tonitruant, le député Victor Hugo (qui venait de tourner le dos à la droite royaliste) fustigeait les autres élus de n’avoir rien fait pour détruire la misère :
« Vous n’avez rien fait, j’insiste sur ce point, tant que l’ordre matériel raffermi n’a point pour base l’ordre moral consolidé ! Vous n’avez rien fait tant que le peuple souffre ! Vous n’avez rien fait tant qu’il y a au-dessous de vous une partie du peuple qui désespère ! Vous n’avez rien fait, tant que ceux qui sont dans la force de l’âge et qui travaillent peuvent être sans pain ! Tant que ceux qui sont vieux et qui ne peuvent plus travailler sont sans asile ! Tant que l’usure dévore nos campagnes, tant qu’on meurt de faim dans nos villes, tant qu’il n’y a pas des lois fraternelles, des lois évangéliques qui viennent de toutes parts en aide aux pauvres familles honnêtes, aux bons paysans, aux bons ouvriers, aux gens de cœur ! Vous n’avez rien fait, tant que l’esprit de révolution a pour auxiliaire la souffrance publique ! Vous n’avez rien fait, rien fait, tant que, dans cette œuvre de destruction et de ténèbres, qui se continue souterrainement, l’homme méchant a pour collaborateur fatal l’homme malheureux ! »
Qui osera interpeller avec autant de virulence et de talent les élus d’un peuple de plus en plus appauvri et soumis à des lois au service unique des profiteurs.
Reviens, Victor Hugo ! Le peuple souffre et ils n’ont toujours rien fait pour éradiquer la souffrance publique. Qui aurait pu imaginer que Ladj Ly puisse emprunter le titre de ton chef-d’œuvre, Les Misérables, pour réaliser un film admirable.
Hélas, les chefs-d’œuvre ne sont pas plus suffisants hier qu’aujourd’hui pour détruire la misère ! Passons donc à l’action.