La Chouette qui hioque

Auteur/autrice : Michel (Page 1 of 57)

La messe est dite

Quand l’extrême droite éructe et s’indigne, c’est plutôt le signe que son idéologie est en mauvaise posture. On peut s’en réjouir.

Le pape François n’a pas parlé immigration à Marseille par hasard, en France, sur les bords de la Méditerranée ; il a déploré que « cette mer magnifique (…) soit aujourd’hui, un immense cimetière où de nombreux frères et sœurs se trouvent même privés du droit à une tombe (…) où seule est ensevelie la dignité humaine ». Il s’adressait directement à ceux qui font de la politique anti-immigration leur fonds de commerce honteux, au prétexte infâme que les immigrés seraient tous des délinquants. Il aurait pu ajouter avec l’ironie qu’il revendique : « Merde à Darmanin », sur l’air de « Merde à Vauban ». Il a préféré rester sur un mode sérieux exigé par la situation catastrophique des immigrés traversant la Méditerranée. 

Les réactions des Zemmour, Marion Maréchal et de sa nauséabonde tante Marine Le Pen,ou encore Bardella et Ciotti étaient attendues ; leurs mots sont toujours aussi abominables. Macron et Darmanin sont restés étrangement muets ; mal à l’aise ? Même pas ; quelles que soient les exhortations papales, ils poursuivent immuablement leur politique malsaine et indigne.  

Après avoir dénoncé l’indifférence, le pape a appelé à la culture de l’humanité et à ne pas se résigner « à voir des êtres humains traités somme des monnaies d’échange (…) nous ne pouvons plus assister aux tragédies des naufrages provoqués par des trafics odieux et le fanatisme de l’indifférence ».

Il s’agit là d’une condamnation sans réserve de la politique de ceux qui dirigent actuellement la France et qui défigurent le pays des droits de l’homme.

Les catholiques de notre pays sont divisés ; certains approuvent le pape, d’autres s’interrogent et quelques-uns qui sèment la haine condamnent cette intrusion du chef de l’Eglise dans la politique, en empruntant la logorrhée d’un Zemmour qui a atteint l’ignoble en déclarant : « Que veut le pape ? Il veut que l’Europe chrétienne, berceau du christianisme, devienne une terre islamique ? »

On aimerait que le pape François soit clair sur d’autres sujets comme l’avortement, par exemple, mais surtout qu’il appelle à l’action contre la pauvreté et la misère. Qu’il condamne aussi celui qui, comme lui, a été l’élève des Jésuites.  Les disciples d’Ignace de Loyola se distinguent par leur remise en cause du système de production aliénant et par leur dévouement aux services des immigrés, incarnation de la figure du pauvre. C’est-à-dire l’exact opposé de la politique de Macron et de l’extrême droite.

François a dit la messe à Marseille et après ?

Bonnet d’âne !

Patrick Pouyanné, le PDG de TotalEnergies, est peu sympathique, mais, malgré son allure bonhomme, il a la répartie acerbe. 

Interrogé sur RMC à propos du projet gouvernemental d’autoriser l            a vente à perte du carburant, il a été cinglant : « Vous vendez souvent à perte vous ? Un peu de bon sens ! »

TotalEnergies, gérant un tiers des stations-service sur le territoire, rejoint ainsi les groupes de grandes surfaces, Carrefour, Leclerc, Intermarché ou encore Système U, peu enthousiastes à l’idée de vendre à perte et d’abandonner des millions d’euros.

Le gouvernement a semble-t-il oublié que TotalEnergies n’est pas qu’un distributeur, mais aussi un raffineur, vers lequel les groupes de grandes surfaces vont s’approvisionner.

A ce point d’incompétence, on doit se poser la question de savoir quel énarque a eu cette idée saugrenue d’avance la solution de la vente à perte du carburant pour redonner du pouvoir d’achat aux citoyens. L’idée n’est ni lumineuse, ni fondée économiquement.

A tergiverser plutôt qu’à rechercher de vraies solutions à l’inflation comme les augmentations de salaires, l’indexation de ceux-ci sur le coût de la vie, sur l’abaissement des taux de TVA, l’augmentation des taxations sur les dividendes et des impôts sur les riches, les brillants ultra-libéraux qui occupent les postes de commandement se sont pris les pieds dans le tapis. Ils ont décroché le bonnet d’âne !

Leur communication a fait un flop retentissant et il est réjouissant d’entendre Patrick Pouyanné, le plus ardent défenseur du système, dénoncer son ineptie et de mettre le doigt sur les impasses du libéralisme en crise profonde.

Emmanuel Macron tentera de se remettre de l’affront en recevant un monarque dévalorisé et désuet à Versailles, puis à la messe papale à Marseille ! Avec des airs d’Ancien Régime, éloignés de la ‘’start-up nation’’.

Le temps des Croisades !

La lettre quotidienne de Charlie Hebdo d’hier soir débute un article par une interpellation ébouriffante et qui m’a interloquée : « Bienvenue à ‘’l’école du diable’’ ».

Les faits rapportés par l’article sont pour le moins étonnants : « À Ploërmel, dans le Morbihan, le premier lycée public vient enfin d’ouvrir… après une lutte de cinq décennies mené par les piliers de l’enseignement catholique dans la ville. À Mona Ozouf, 220 élèves de seconde et de première ont effectué leur première rentrée, le 4 septembre. Jusqu’ici, l’offre scolaire dans la ville était uniquement privée ; un monopole étonnant pour une ville de 10 000 habitants. »

Puissance de l’Eglise catholique ou plutôt démission des institutions d’un Etat laïc ?

Il est difficile de trancher quand Charlie Hebdo nous apprend également que Béatrice Le Marre, maire de la ville de 2014 à 2020 avait dû batailler aussi pour obtenir le retrait d’un crucifix de la salle des mariages et la tenue du conseil municipal dans les bâtiments municipaux plutôt que dans le collège privé du Sacré-Cœur. Cette enseignante, socialiste, a néanmoins réussi à obtenir l’ouverture d’un lycée laïc avant d’être battue en 2020 par un réactionnaire. Sa victoire (pour l’école de la République) a un goût amer ! La calotte a gagné une bataille.

Mais le combat de Mme Le Marre n’a pas été vain : « Nous sommes dans un secteur très ouvrier, où les salaires sont bas et les personnels peu qualifiés. Il y avait un vrai enjeu à offrir la possibilité d’une éducation gratuite. » La preuve ? A la rentrée, la présence de 220 élèves de classe de seconde sur les bancs du nouveau lycée !

La guerre de religion a connu des moments cocasses, dont l’un est rapporté par Charlie Hebdo : « Nombre d’habitants s’étonnent qu’on donne au nouveau lycée public un ‘’nom arabe’’, sans savoir que Mona Ozouf est…bretonne. »

Les agités de la calotte ont avalé leur hostie de travers ; l’obscurantisme et le dogmatisme ont reculé. Mais les crucifix sont toujours là. Avec des défenseurs comme Bolloré ou de Villiers qui ont pris la tête d’une nouvelle croisade au nom de la défense des valeurs de l’Occident. Comme au Moyen-Âge.

A propos de Vincent Bolloré, il est à croire que sa puissance est telle que les institutions de la République se courbent devant lui et ses ouailles. Avec beaucoup de déférence (qu’ils ne méritent pas).

Dimanche, l’émission de France 5 ‘’C médiatique’’, animée par Mélanie Taravant, a osé inviter Cyril Hanouna, qui, sans aucune retenue, s’est livré à une nouvelle attaque contre le service public et, notamment, l’émission Complément d’enquête consacrée au Puy du Fou. Evidemment, il jubilait : « Cette émission sera ma dernière avant un bon bout de temps et je suis venu parce que ce sont des amis, et ça me faisait marrer d’être le premier invité de C médiatique ! » Il en rit encore.

Comment une telle invitation a-t-elle été possible ?

On peut supposer que les grenouilles de bénitier Bolloré et de Villiers ont dû féliciter chaudement l’ignoble Hanouna. Mais tout esprit normalement constitué s’étonne d’une telle faute déontologique en laissant le micro ouvert à un faussaire, adversaire du service public, de l’information complète et vérifiée, condamné de nombreuses fois par l’ARCOM pour ses ‘’dérapages’’ très contrôlés et ignobles.

Les affaires de Ploërmel et de C Médiatique en disent beaucoup sur les compromissions des dirigeants du pays des droits de l’homme avec les forces obscurantistes et réactionnaires. Ont-ils conscience qu’ils labourent le terrain pour le Rassemblement national et ses idées lugubres et inquiétantes ?

Raisins de la colère

Jeremy Corbyn, l’ex-leader du Parti travailliste britannique a lu Les Raisins de la colère, admirable roman de John Steinbeck (et sans doute vu aussi le film non moins admirable de John Ford). 

C’est ce qu’on peut imaginer quand, interrogé sur le site Investig’Action, sur les récents coups d’état survenus en Afrique centrale et de l’Ouest francophone, il a une réponse à la fois malicieuse et pleine de gravité : 

« Je suis très intéressé par ce qui se passe en Afrique de l’Ouest ! Et je me souviens d’une brillante vidéo de 30 secondes sur Youtube dans laquelle on posait une question à un homme marchant dans les rues de Paris. « Désolé Monsieur, puis-je vous poser une question ? », lui dit l’intervieweur. « Quelles sont les ressources naturelles du Niger ? » L’homme répond : « Uranium ». Deuxième question : « Quelles sont les ressources naturelles de la France ? » Il répond : « Niger ! » Cette spontanéité en dit tellement long… »

Les raisins de la colère étaient mûrs au Gabon et au Niger ! Il n’y a que Macron et les néo-colonialistes pour ne pas l’avoir vu.

Sensitivity Readers

Kevin Lambert est un jeune (30 ans) auteur québécois dont le troisième roman, Que notre joie demeure, vient de déclencher une petite polémique littéraire.

L’éditeur de Kevin Lambert, donc, s’est vanté d’avoir eu recours à une ‘’sensitive reader’’, Chloé Savoie-Bernard, poète et professeure de littérature, canadienne elle aussi et d’origine haïtienne.

‘’Sensitive reader’’, ‘’sensitivity readers’’ ? Comment traduire cette expression ? Mot à mot par ‘’lecteur se sensibilité’’ ou, comme le propose Wikipédia par ‘’démineur éditorial’’. Il s’agit d’une personne chargée par un éditeur de relire une œuvre pour en détecter les passages problématiques, touchant à la représentation des minorités, des genres, des groupes religieux etc. Il ne s’agit donc pas d’un correcteur qui, lui, n’intervient pas sur les contenus, mais plutôt du directeur de conscience des auteurs. 

Ecrivain reconnu, lui, Nicolas Mathieu s’est levé contre le recours aux ‘’sensitivity readers’’ dans un texte fulgurant : 

« L’espace d’expression dont nous jouissons aujourd’hui n’est pas un dû, un état de fait, une permanence. C’est une conquête et un immense progrès, notre legs et le résultat d’au moins deux siècles de bataille esthétique et politique. Qu’il faille, lorsqu’on traite un sujet, le faire avec précaution et vigilance, cela va de soi. Le pouvoir de tout dire (ou presque) suppose de ne pas le faire n’importe comment. Un auteur, une autrice, a des responsabilités morales, quant à son point de vue, par rapport à la manière dont il ou elle traite des personnages, des situations, l’histoire, ses protagonistes, a fortiori quand ces derniers ont été éclipsés, ignorés, maltraités par une civilisation toute entière. Effectivement, on n’écrit pas à la légère. Et l’on peut en dépit de ses scrupules, des éditeurs qui se succèdent sur un manuscrit, des amis qui vous relisent, se planter. Les lecteurs alors ne se privent pas de le dire, et d’autres, surtout, peuvent alors écrire d’autres textes, d’autres livres, qui par leur vérité, leur clairvoyance, feront honte au vôtre. C’est le jeu, celui des rapports de force dans le champ artistique. Mais faire de professionnels des sensibilités, d’experts des stéréotypes, de spécialistes de ce qui s’accepte et s’ose à un moment donné la boussole de notre travail, voilà qui nous laisse pour le moins circonspect. Qu’on s’en vante, voilà qui est au mieux amusant, à la vérité pitoyable. Qu’on discrédite d’un mot ceux qui pensent que la littérature n’a rien à faire avec ces douanes d’un nouveau genre, et sous-entendre qu’ils font le jeu des oppressions en cours, c’est tout bonnement une saloperie. Ce type de sorties navrent autant par leur autosatisfaction que par leur malhonnêteté intellectuelle. Et que dire d’auteurs et autrices qui se gargarisent d’être à ce point en adéquation avec l’esprit de leur temps. Ecrivains, écrivaines, nous nous devons de bosser, et de prendre notre risque, sans tutelle, ni police. C’est bien là la moindre des choses. »

A la lumière de ces très belles lignes de Nicolas Mathieu, les ‘’sensitivity readers’’ sont plutôt une façon (inélégante) pour les éditeurs de couler les œuvres dans un moule idéologique. La littérature n’a rien à gagner à une mise au pas des auteurs et autrices. Imagine-t-on Voltaire, Victor Hugo, Baudelaire, Zola accepter de confier leurs œuvres à des censeurs garants des dogmes ultralibéraux ? Imagine-t-on les ravages des ‘’sensitivity readers’’ de Bolloré dans les maisons d’édition d’Hachette ?

Les auteurs, les autrices ont toujours refusé les tutelles et la police de l’esprit. Ils et elles ont besoin de toujours plus de liberté, et, en cette période d’ultralibéralisme triomphant, le temps n’est pas venu d’en céder la moindre parcelle. 

Reconversion

J’imagine que l’embauche de Laurent Berger, désormais ex-secrétaire général de la CFDT, par le Crédit Mutuel va susciter des remarques acerbes dans les milieux syndicaux et politiques.

Dans un monde où les leviers politiques sont sous la dépendance des dogmes des milieux financiers, ce recrutement est incongru, même si le Crédit Mutuel se gausse d’être mutualiste (ce qu’il n’est pas réellement). A qui fera-ton croire que Laurent Berger aura le pouvoir d’influencer le prétendu ‘’virage stratégique’’ d’un établissement qui est encore aux côtés des industriels des énergies fossiles et ne consacre que 15 % de son résultat net à des projets ‘’verts’’.

Les exemples des prédécesseurs de Laurent Berger ne manquent pas d’interroger. Edmond Maire (président des VVF), Nicole Notat (et son agence de notation) et François Chérèque (recasé comme inspecteur général des affaires sociales) ont-ils fait émerger un seul problème sociétal ?

Les illusions se paient très cher. Les journalistes et les ouvriers du Livre de la dizaine de titres de quotidiens régionaux du groupe EBRA, contrôlés par le Crédit Mutuel, eux, ne se bercent plus d’illusions. Ils ont déjà payé.

Cela dit, la reconversion de Laurent Berger met au grand jour un problème du syndicalisme aujourd’hui. Il est évidemment souhaitable d’avoir des dirigeants jeunes, ne consacrant qu’une partie de leur carrière à la chose syndicale. Il est clair que de hauts dirigeants qui ont eu d’énormes responsabilités et acquis des connaissances indéniables ne doivent pas se retrouver sans emploi à la fin de leur mandat.

Faute d’un statut de l’élu syndical, les anciens syndicalistes sont-ils condamnés à retourner dans leur ancien emploi ou, s’ils ont démissionné pour militer, à attendre une offre, qui sera, on s’en doute, toujours interprétée comme une récompense pour services rendus ou comme un alibi ?

Il ne semble pas que l’ultralibéralisme soit prêt à négocier sur le sujet ; on en veut pour preuve une mise à l’écart de plus en plus prononcée des syndicats par une politique autoritaire et verticale.

La reconversion des syndicalistes par la voie de la validation des acquis n’est pas inscrite à l’agenda du capitalisme.

11 septembre

Le 11 septembre 1973 Augusto Pinochet bombardait le palais de la Moneda à Santiago et renversait le président Allende. Il ne s’agissait que d’un épisode d’une vaste opération, baptisée Operacion Condor, menée par la CIA pour amener des dictateurs au pouvoir en remplacement de gouvernements élus démocratiquement, au Chili, en Argentine, en Bolivie, au Brésil, au Paraguay et en Uruguay.

Combien d’assassinats, d’enlèvements, de tortures, de disparitions ont été perpétrés par Pinochet, Videla, Stroessner, Bordaberry, Banzer et Geisel ? Des milliers.

Leurs régimes ont confisqué les libertés et engendrés la misère des peuples.

José Saramago relevait à juste titre dans son Cahier, en 2008, que « souvent, sous l’horreur, il y a des intérêts économiques, des délits clairement identifiés perpétrés par des personnes et des groupes concrets qui ne peuvent être ignorés dans des Etats qui se proclament de droit ».

Salvador Allende et son ami Augusto Olivarès se sont suicidés le 11 septembre sous les bombes des putschistes ; Pablo Neruda a été assassiné quelques jours plus tard, comme Orlando Letelier, ministre de la défense (victime d’un attentat à la voiture piégée à Washington où il s’était réfugié). Pinochet a permis les assassinats de plus de 3200 opposants et disparus ; le nombre de personnes torturées est estimé à plus de 38 000 et plus de 250 000 Chiliens se sont exilés ou ont été expulsés. 

Des tortionnaires français ont participé à alimenter le bilan terrible de ces crimes contre l’humanité.

On ne doit rien oublier de cet épisode horrible. En France, les partis d’extrême droite (et parfois ceux de droite) ont eu des sympathies affirmées pour les dictateurs d’Amérique du Sud. Ils partagent les mêmes idéologies, même si, aujourd’hui, ils sont dédiabolisés par des médias aux mains des milliardaires illuminés et menant une croisade pour les valeurs de la France qu’ils qualifient d’éternelle.

Nous ne pouvons pas dire que nous ne savions pas. En France, les vrais démocrates n’ont pas envie de mesurer les conséquences de l’arrivée au pouvoir d’ultralibéraux qui, sous couvert, de lutter contre l’envahissement du pays par des ‘’immigrés-délinquants’’, visent à imposer un régime autoritaire où leurs affaires pourront prospérer sans entrave.

Le 11 septembre 1973 ? C’était hier. Nous devons commémorer cette date et apprendre de l’histoire pour éviter de plonger dans la même terreur.

Pauvres Marocains

Quand la terre se déchire apparaissent au grand jour les inégalités dans les pays touchés par les séismes.

Le peuple marocain souffre et ne cesse de dénombrer ses victimes ; les moins riches comme en Turquie en février dernier sont les premières victimes.

On connaît les causes du bilan terrifiant : habitat vétuste à base de mâchefer ou de terre, absence de normes antisismiques, mais pas seulement. Quand les pauvres n’ont plus rien à espérer de leurs lopins de terre, ils se tournent vers une auto-construction avec des matériaux sommaires dans des zones d’urbanisation rapides où ils espèrent trouver un petit emploi qui leur permettra de vivre moins mal.

Certes, des riads et des villas pour classes aisées et touristes ont été anéanties, elles aussi, mais les pauvres paient le plus lourd tribut. Comme en Turquie, comme partout.

Les régimes libéraux ou archaïques (comme le Maroc) sont responsables de toutes les tragédies en fermant les yeux devant les inégalités assumées au nom du Marché.

On ne peut pas dire qu’on ne savait pas ; un rapport de la Banque mondiale publié en 2020 notait que : « La persistance d’un habitat non-réglementaire etvétuste, la littoralisation accentuée de l’urbanisation, le changement climatique, la fragilisation du patrimoine bâti ancien, constituent autant de facteur de vulnérabilité. » Le roi Mohamed VI l’a-t-il lu ? Et s’il l’a lu qu’a-t-il fait ?

Autoritaire et répressif, vautré dans le luxe, le monarque despotique d’un autre âge a des comptes à rendre.

Des Français ont faim

Le Secours populaire vient de publier la 17e édition du baromètre de la pauvreté et de la précarité. Il fait le constat que les privations atteignent des niveaux record.

Selon le rapport, « Presqu’un Français sur deux (45%, +6 points) assure s’être retrouvé dans l’incapacité, absolue ou partielle, de payer certains actes médicaux ; et un sur trois (32%) n’est pas en capacité de se procurer tous les jours une alimentation saine en quantité suffisante pour manger trois repas par jour. »

Une situation que l’on retrouve dans toute l’Europe !

En 2023, dans l’un des pays les plus riches de la planète, des gens ont faim.

En 2023, des enfants scolarisés couchent dehors.

En 2023, des gens n’ont plus accès aux soins les plus élémentaires.

Ce n’est pas plus acceptable aujourd’hui qu’hier et bien moins que demain.

Les Restos du cœur ont lancé un cri d’alarme. Il a été repris par les autres associations, Secours populaire, la Croix-Rouge. L’argent manque. Les bénévoles sont moins nombreux et les gens crèvent de faim ou faute de soins.

Emmanuel Macron et son gouvernement ont fait un petit geste aux seuls Restos du cœur ; laissant le terrain au mécénat des ultra-riches, genre Bernard Arnault et François Pinault, qui, eux, ne manquent de rien, assis sur une fortune considérable.

En 1954, l’abbé Pierre avait déjà lancé un cri d’alarme. Coluche a lancé ses Restos du cœur en 1986. Et la pauvreté s’étend toujours et gagne du terrain jusqu’en direction des classes moyennes. Faisant mentir les paroles de la chanson des Restos du cœur : « Aujourd’hui, on n’a plus le droit ni d’avoir faim, ni d’avoir froid. » Paroles écrites il y a 37 ans. Hélas.

« Dépassé le chacun pour soi », chantait encore Coluche.

Il faut agir vite pour ne plus avoir honte de la situation et  pour que la 18e édition du baromètre du Secours populaire nous redonne espoir que tous les Français n’auront bientôt plus faim.

Un pays en manque

Quelle rentrée ! Jamais notre pays n’aura eu un président et un gouvernement aussi éloignés des préoccupations des citoyens.

Plutôt que de dresser l’inventaire des problèmes qui assaillent le quotidien et apporter des solutions, ceux qui prétendent gouverner détournent la tête et évitent le débat en sortant les épouvantails, toujours les mêmes.

Il manque des professeurs dans toutes les écoles, collèges et lycées, on ressort l’abaya.

Il manque des conducteurs de bus pour assurer le ramassage scolaire, on évite d’en parler. Silence. Circulez, il n’y a rien à dire et rien à voir.

Il manque, au bas mot, plus de 200 000 places de crèche, Elisabeth Borne assure que 100 000 lits seront créés d’ici à 2027. A ce rythme-là, le déficit ne sera jamais comblé. Elle oublie de préciser que ce sont essentiellement les grands groupes spécialisés dans la petite enfance, mais tous adossés à des fonds d’investissement qui assureront l’essentiel avec des subventions généreusement attribuées. Les dirigeants de Babilou Family, les petits chaperons rouges (groupe Grandir), People et Baby ou La Maison bleue calculent déjà leurs dividendes, comme les groupes du grand âge. Et le cash qui leur permettront de continuer à racheter les petites structures.

Pendant le même temps, les jeunes couples hésitent à faire des enfants et la France vieillit ! Le capitalisme est fou et le service public laissé en jachère. Pour le plus grand bonheur des fonds d’investissement.

Crèches, écoles, hôpitaux, EHPAD, notre vie, de notre naissance à notre mort, est entre les mains du privé.

En revanche, la France ne manque pas de pauvres ; les associations doivent suppléer les carences de l’Etat pour éviter une famine, comme au Moyen-Âge. Mais tous les relais de solidarité croulent sous le poids de l’expansion vertigineuse de l’extrême pauvreté. L’Etat répond chichement et compte sur les ‘’généreux mécènes’’, ceux qui multiplient les bénéfices et ne paient pas d’impôts (ou si peu).

La planète brûle et Emmanuel Macron tourne la tête pour ne rien voir et éviter de mettre en place une véritable politique environnementale digne de ce nom. Pendant la canicule, les affaires continuent.

Pour occuper néanmoins l’espace médiatique, il avance une idée lumineuse et très écologique : que chaque élève des classes de 6e plante un arbre. L’idée est à la fois saugrenue et implique des enfants qui ne sont nullement responsables de la situation catastrophique de la planète Terre. Macron a ‘’oublié’’, semble-t-il, un petit détail : où qu’ils soient plantés (rien n’est précisé), les jeunes arbres auront besoin d’arrosage.

Nous sommes vraiment dans un pays en manque. Manque de services publics à la hauteur des enjeux sociétaux. Manque d’idées d’avenir.

Les résultats financiers immédiats sont la seule boussole des patrons et des politiques. L’immédiateté, ennemi de l’avenir.

Grandes dames (modestes)

Le hasard a voulu que deux publications du même groupe publient les interviews de deux grandes dames d’exception.

Télérama a conversé longuement avec Esther Duflo, la plus jeune lauréate du prix Nobel d’économie. Elle consacre toute sa vie à la lutte contre l’extrême pauvreté. Le Monde, lui, a rencontre Henriette Steinberg, la secrétaire générale du Secours populaire, dans le cadre de la rubrique « Je ne serais pas arrivée là si… ». Elle aussi participe à la lutte contre la pauvreté. Depuis l’enfance. De tout son être !

Deux engagements totaux, profonds, de conviction. Les deux trajectoires sont parallèles au fond et finissent par se ressembler, même si l’une est enseignante-chercheuse et l’autre bénévole.

Les deux entretiens sont passionnants.

Mais il existe une différence essentielle entre ces deux femmes. Quand Télérama demande à Esther Duflo s’il faudrait remettre en question le système capitaliste, elle réponde très franchement : « Je ne sais pas. C’est très bien que des gens réfléchissent au système, mais ce n’est pas mon sujet. » Henriette Steinberg, elle, milite au Parti communiste et veut changer le système qui secrète la pauvreté. En revanche, elle ne voit pas de contradiction dans son action d’aider les pauvres : « Avant de faire la révolution, il faut savoir ce qu’on va manger le lendemain ». Et, pour se faire bien comprendre, elle ajoute : « Quand quelqu’un se noie, on ne lui demande pas pourquoi il n’a pas appris à nager, on lui jette une gaffe ou on plonge pour le sortir de l’eau. J’ai toujours adhéré à cette démarche. » 

Une chose est sûre, ces deux grandes dames (modestes) ont, hélas, des motifs de lutter. A la question de savoir si la situation s’est améliorée sur le front de la pauvreté, Henriette Steinberg est catégorique : « Non, c’est de pire en pire. Et ça se dégrade de plus en plus vite. La casse profonde du service public est une véritable catastrophe pour le pays, notamment dans l’éducation nationale. »

Esther Duflo la rejoint quand elle déclare : « Moi, ce que j’essaye de dire, c’est que dans le monde actuel tel qu’il est, il existe énormément de marges d’action. À condition d’adopter la bonne attitude — c’est-à-dire à la fois de ne pas compter sur le système capitaliste pour naturellement prendre soin des plus vulnérables, mais aussi de ne pas compter sur nos intuitions pour comprendre ce dont les gens ont besoin et ce qui va marcher pour résoudre leurs problèmes —, quel que soit le système dans lequel on vit, on se rend compte qu’il y a déjà énormément à faire là, tout de suite, maintenant, sans attendre le grand soir d’une révolution. »

Leur détermination est totale ; malgré de telles femmes, la pauvreté gagne du terrain. Saloperie de système capitaliste.

La confusion comme programme

Le moteur politique d’Emmanuel Macron, c’est la « destruction créatrice », la théorie de Joseph Schumpeter. Selon le philosophe allemand, des processus de mutation industrielle se créent continuellement, « appâtées par le profit (…) il se produit une réorganisation complète de l’industrie, avec hausse de la production, concurrence acharnée, disparition des entreprises obsolètes, licenciements éventuels ».

Emmanuel Macron ne dit rien d’autre ; la société numérique est l’avenir et, en même temps, porteuse de nouveaux profits pour les premiers de cordée qui ont investi dans les nouvelles technologies. Au diable, les laissés pour compte, victimes de la prétendue obsolescence des industries traditionnelles.

Le président de la République n’éprouve aucun regret de voir les fonderies disparaître ; il ne vole pas au secours de leurs salariés, malgré leurs longues années de dur labeur !

La destruction créatrice est l’idéologie assumée des ultra-libéraux comme Macron, qui n’hésitent pas à se complaire dans le confusionnisme.

Il prétend apaiser les soignants et annonce une revalorisation des primes de nuit et du dimanche, quand ils réclament des emplois et des augmentations de salaires ; il avait fait applaudir les mêmes soignants tout en faisant fermer des lits. Il dénonce les violences policières, mais il permet l’expulsion des prétendues familles d’émeutiers de leur logement social. Il dit que le colonialisme est un crime contre l’humanité, mais il condamne les coups d’Etat chassant les dictateurs suppôts du néo-colonialisme. Il annonce une revalorisation des pensions des retraités les plus modestes, mais le coup de pouce ne sera pas pour tous, la Caisse d’assurance vieillesse étant dans l’incapacité de reconstituer toutes les carrières.

On pourrait continuer à énumérer les confusions de Macron. On s’en tiendra à ces quelques exemples de la confusion entretenue par des effets d’annonces confrontés à la réalité.

C’est toute la politique des ultra-libéraux dont Emmanuel Macron est le porte-drapeau le plus caricatural.

Jeu de dupes

Tout ça pour ça ! Emmanuel Macron a ‘’échangé’’ avec les responsables de partis pendant 12 heures (la réunion s’est terminée, faut-il y croire, vers 3 heures ce matin).

Les douze heures d’échanges ressemblent fort à une nouvelle opération de communication d’un président de la République à bout de souffle et aux abois.

Les dirigeants des partis de gauche sont sortis amers : « On est venus, on a vu et on a été déçus », ont-ils déclarés à l’unisson.

Pouvait-il en être autrement ?

Deux jours plus tôt, la première ministre, Elisabeth Borne, et le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, étaient devant un parterre de grands patrons lors de l’université d’été du Medef, baptisée Rencontre des entrepreneurs de France (REF). On remarquera qu’on ne parle plus de patrons mais d’entrepreneurs !

Le quotidien La Tribune titrait son information : « Fiscalité : après Macron et Borne, Le Maire continue de cajoler le patronat ». Le Maire a été clair : « Nous continuerons à baisser les impôts des entreprises dans les années qui viennent, je ne veux laisser aucun doute sur ce sujet. » Baisser les impôts des entreprises pour gonfler les dividendes, mais pas pour améliorer les services publics de l’école, des hôpitaux, ni pour réduire l’inflation. Tout était dit. Macron écoute attentivement et obéit scrupuleusement aux patrons, qu’il cajole.

Alors, que pouvait-il sortir des échanges de Saint-Denis ? Sinon un simulacre de concertation. Une vulgaire opération de communication, même si le scénario était différent des précédentes.

Le jeu de dupes est grossier !

Dans les plis de l’abaya

Si l’abaya est un vêtement traditionnel, les islamistes radicaux l’ont transformé en un symbole religieux. Pour autant, faut-il l’interdire à l’école en invoquant le respect de la laïcité ?

Assurément, l’annonce de son interdiction par Gabriel Attal ne visait pas à répondre à une vaste question de société.

Dans le discours de rentrée de l’improbable ministre de l’éducation nationale, l’abaya n’était qu’un artifice (grossier) pour évacuer les questions beaucoup plus graves qui minent le système de l’instruction : manque de professeurs, réformes idiotes et incessantes, ségrégation sociale, augmentation des fournitures scolaires, manque de logements pour les étudiants, etc.

De nombreux rapports font le bilan catastrophique d’un ministère qui entend favoriser, coûte que coûte, le privé et les riches en affaiblissant l’école publique, obligatoire, gratuite et laïque. L’école de la République qui forme des citoyens n’est plus une priorité du gouvernement des riches.

L’un des plus récents note l’écart croissant entre privé et public en matière de mixité sociale. Les enfants d’ouvriers ou d’inactifs (définis comme venant d’un milieu défavorisé) sont 34,7% à fréquenter un collège, mais 58,8% sont scolarisés dans un dixième des collèges les plus défavorisés et 11,9% seulement dans le dixième des collèges les plus favorisés. Bonjour les ghettos !

La ségrégation sociale est plus marquée encore en milieu urbain. Elle se mesure dans les établissements privés sous contrat où les élèves d’un milieu très favorisé sont 41,7% contre 16% d’un milieu défavorisé.

Le bilan du ministère se mesure à tous les échelons jusqu’au doctorat où le nombre d’étudiants inscrits en première année de thèse a diminué de 4% en 2022 et le nombre d’étudiants ayant obtenu leur diplôme en baisse continue depuis 2012.

Selon un rapport, « Une des difficultés rencontrées par les étudiants est lefinancement de leurs travaux de recherche.À la rentrée 2022, seuls 79% des doctorants bénéficient d’un financement lors de leur première année de doctorat. La situation financière des doctorants diffère grandement selon le domaine d’étude. Ainsi, les étudiants en sciences exactes et applications sont financés à 97% et ceux en sciences du vivant à 86%. À l’inverse, un doctorant sur deux (51%) en sciences humaines et sociales bénéficie d’un financement pour sa thèse. Ceux qui n’ont pas réussi à décrocher de contrat doctoral ou d’autre type de financement sont souvent contraints de travailler en parallèle de leur thèse. C’est le cas de 29% des doctorants en sciences humaines et sociales, contre 13% des doctorants en sciences du vivant et 3% des doctorants en sciences exactes et applications. »

Ce que ne dit pas le rapport, c’est que le nombre d’étudiants, enfants d’ouvriers, est en baisse constante dans les universités et plus encore en doctorat.

Alors, on se préoccupe de l’augmentation du port de l’abaya à l’école ou on règle de toute urgence les innombrables problèmes qui minent l’éducation nationale ? Hélas, après avoir entendu le ministre, boîte de résonnance de la Macronie, on reparlera plus volontiers de l’abaya !

Question d’actualité

Gérald Darmanin a les dents longues ; le jeune Rastignac de Tourcoing se voit un destin présidentiel (il n’est pas le seul).

Ministre de l’intérieur, il s’impose sur tous les lieux où se produisent des incidents, des accidents, des incendies, des crimes crapuleux ; il parle beaucoup, pour parler et occuper le terrain médiatique. Il a endossé le costume de la fonction et, compte tenu de corpulence, il a choisi celui que portait Nicolas Sarkozy.

La paraître a pris le pas sur le faire !

Fils de bistrotier et de concierge, il serait plutôt ‘’transclasse’’. Elevé dans les écoles catholiques, tendance traditionaliste, il a longtemps côtoyé les milieux d’extrême droite, collaborant par exemple à Politique magazine, l’organe d’Action française, héritière de la pensée de Charles Maurras. Volontiers homophobe (maire de Tourcoing il disait refuser le mariage des couples homosexuels), il s’est surtout distingué en appelant à « stopper l’ensauvagement d’une certaine partie de la société », expression empruntée à Marine Le Pen.

Il a multiplié les déclarations polémiques et nauséabondes ; il a multiplié les coups de menton tendant à vanter ses actions sécuritaires, s’en prenant aussi bien à la Ligue des droits de l’homme qu’à des mouvements écologistes. Il a eu aussi quelques démêlés avec la justice.

Bref, le petit Gérald Darmanin est peu fréquentable, mais il ose tout. Vexé de ne pas avoir été nommé premier ministre (son ego est incommensurable), il a voulu le faire savoir et, aujourd’hui, il a donc décidé d’affirmer de toute urgence son ambition d’être candidat à l’élection présidentielle de 2027. Il tient donc meeting à Tourcoing. En grande pompe et, surtout, en présence de la première ministre, qui a reçu l’ordre d’Emmanuel Macron d’assister à l’intronisation du jeune homme pressé plutôt que de vibrer à une rencontre de l’équipe de France de rugby.

Le discours de l’effroyable Darmanin (qui trouve Marine Le Pen un peu molle) a même été retransmis par les chaînes d’information en continu. 

La machine médiatique de droite (et d’extrême droite) est en marche ! Au mépris de la hiérarchie de l’actualité.

Mais dans quel monde vivent ces gens qui sont au pouvoir ! Alors que la rentrée scolaire s’annonce catastrophique (du primaire à l’université), que les hôpitaux craquent, que les Français se serrent la ceinture en raison des hauses de prix et du blocage des salaires, que la réforme des retraites rejetée par tous entre en vigueur, que la terre flambe, que les immigrés sont pourchassés et meurent en Méditerranée, que les luttes de clans pour s’approprier les territoires de ventes de la drogue font des dizaines de victimes, etc., Darmanin, le ministre de l’intérieur, ne pense qu’à son destin en 2027 ! Insupportable et fascinant d’égoïsme.

Emmanuel Macron se prête à un jeu sinistre, Elisabeth Borne également. Et ceux qui ne disent rien sont coupables de non-assistance à peuple en danger.

Ainsi va le capitalisme. Et une question me taraude : où est la gauche pour stopper cette mascarade funeste et les ambitions des serviteurs zélés des milieux d’affaires ?

Le camouflet

Les BRICS, acronyme de Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud, tiennent leur quinzième réunion au sommet, actuellement à Johannesburg. Les cinq pays se sont rapprochés au tournant des années 2000 pour revendiquer un nouvel ordre économique mondial dicté par les pays du Nord après 1945.

Le président sud-africain, Cyril Ramaphosa, a invité une soixantaine de pays à participer à la réunion ; parmi eux, vingt-trois ont déjà annoncé leur volonté d’adhérer à cette instance et les ponts seront jetés pour créer les BRICS+.

Emmanuel Macron avait fait savoir à son homologue sud-africain qu’il souhaitait participer à ce rassemblement en prétextant, sans rire, un non-alignement de Paris sur la politique américaine.

Cyril Ramaphosa avait trouvé l’idée « assez amusante » et l’avait rejetée poliment, mais fermement. Le camouflet est curieusement passé sous silence dans les médias.

Etonnant, non ?

Les BRICS s’estiment suffisamment adultes pour discuter de leur affranchissement du dollar, de la composition désuète du Conseil de sécurité de l’ONU (d’où les pays du Sud sont exclus), de leur système de coopération pour assurer leur développement sans être pillés par le Nord ; bref pour entreprendre de changer l’ordre économique, politique et culturel mondial d’aujourd’hui.

N’en déplaise à Emmanuel Macron !

Bolloré adoubé par Macron

Le Journal du dimanche (JDD) d’avant Bolloré était le journal officiel de la ‘’minorité présidentielle’’ ; le ‘’JDD Bolloré’’ (sous la direction de Geoffroy Lejeune) reste la voix de ceux qui logent actuellement à l’Elysée.

Ainsi en a décidé le locataire du palais qui a hébergé la Pompadour !

La version extrême droite de ce quotidien dominical s’enorgueillit en effet d’avoir publié une interview de Sabrina Agresti-Toubache, secrétaire d’Etat chargée de la ville, puis, huit jours plus tard, une tribune de Karl Olive, député des Yvelines et ex-maire de Poissy.

Les deux personnages publics ont un lourd passé sulfureux et déclarent être des amis très proches d’Emmanuel Macron. Ce qui n’est pas démenti.

Le président du groupe Renaissance au Palais-Bourbon, l’inconnu Sylvain Maillard, doit ravaler sa condamnation des ‘’collaborations’’ avec le JDD ; ses consignes de ne pas répondre aux sollicitations de la feuille qui a de forts relents de la droite pétainiste ne datent pourtant que du 11 août !

Selon Le Monde, si « le camp présidentiel se trouve dans l’incapacité de tenir une postion collective sur le sujet, c’est aussi parce que l’Elysée se tient en retrait ». Et rappelle qu’Emmanuel Macron a lui-même « accordé une longue interview sur l’immigration et l’islam à Valeurs actuelles en 2019 ». Un conseiller du président de la République a confié au quotidien vespéral : « Il ne faut pas segmenter, mettre de côté ou ignorer ce que les Français regardent, lisent et écoutent ». Tout est autorisé par le ‘’premier de cordée’’ et il ne s’agit plus seulement d’une ‘’tolérance présidentielle’’ à l’égard de deux brebis égarées, mais d’un choix politique.

Vincent Bolloré est adoubé par Emmanuel Macron ; Geoffroy Lejeune aussi.

Quel mépris pour les journalistes qui sont entrés en résistance ! Quel aveu à propos du véritable positionnement idéologique du président de la République !

La France catho d’avant la Révolution retrouve ses valeurs.

L’ami meurtrier

Les révélations de Human Rights Watch, ONG enquêtant sur les abus commis à travers le monde, sont insupportables. Au terme d’investigations pendant deux ans et de recoupements d’analyses de centaines de documents divers, il est avéré que « les gardes-frontières saoudiens ont tué au moins des centaines de migrants et demandeurs d’asile éthiopiens qui ont tenté de franchir la frontière entre le Yémen et l’Arabie saoudite entre mars 2022 et juin 2023. »

Le rapport de 73 pages publié par HRW sous le titre : « Arabie saoudite : Massacres de migrants à la frontière du Yémen » révèle que « les gardes-frontières saoudiens ont utilisé des armes explosives pour tuer de nombreux migrants et en ont abattu d’autres à bout portant, y compris de nombreuses femmes et enfants, dans le cadre d’une série d’attaques généralisées et systématiques. » Les faits ont été authentifiés par les membres du groupe d’experts médico-légaux indépendants du Conseil interrnational de réhabilitation pour les victimes de la torture.

Le rapport de HRW décrit une horreur absolue et indicible et les cruautés du régime de Mohammed ben Salmane, déjà accusé du meurtre du journaliste Jamal Khashoggi à l’ambassade d’Istanbul et d’une répression féroce à l’encontre des opposants. Nadia Hardman, chercheuse sur les droits des réfugiés et des migrants à HRW, a pu déclarer : « Dépenser des milliards pour acheter des clubs de golf professionnels, des clubs de football et organiser de grands événements de divertissement de renommée mondiale pour améliorer l’image de l’Arabie saoudite ne devrait pas détourner l’attention des ces crimes horribles. »

HRW demande à l’Arabie saoudite de « revenir sur sa politique meurtrière » et a saisi l’ONU.

La publication du rapport devrait susciter une vague de réprobation mondiale et des actes de la part de tous les pays se réclamant encore des Droits de l’Homme, dont la France. Ces meurtres systématiques constituent en effet des crimes contre l’Humanité.

Hélas, on n’attendra rien de la France alors que son président, Emmanuel Macron, n’hésite pas à recevoir le prince héritier à l’Elysée (en juin dernier) ou à dîner avec lui au sein même du Louvre (en 2018) !

Philosophie du football (suite)

Que l’équipe féminine espagnole soit sacrée championne du monde de football est vraiment réjouissant. La Roja, son surnom, pratique le jeu qu’on aime, celui qui est basé sur la passe courte et le collectif. Et à ce jeu-là, elle a logiquement battu une équipe d’Angleterre qui, elle, privilégie le jeu long, c’est-à-dire en envoyant des ballons très aléatoires, exigeant des courses harassantes, à des attaquantes au physique impressionnant.

Triomphe donc de la finesse sur la force, de l’intelligence créatrice sur le stéréotype.

Dommage pour les jeunes Anglaises qui méritent mieux que les choix d’une ‘’coach’’ rétrograde, car elles ont démontré à quelques moments de belles qualités techniques aussi.

Dans ce contexte, on aurait aimé voir une finale entre l’Espagne et l’équipe de France, dont le style est identique.

Pourquoi pas à l’occasion du tournoi des Jeux olympiques de 2024 ? C’est ce qu’on pourrait espérer de mieux pour la promotion d’un football féminin moins frelaté par l’argent que le football masculin où les milliards coulent à flot et pervertissent le jeu collectif.

Le monde est fou (suite)

La terre continue de brûler partout ; à Hawaï, le bilan est, aujourd’hui, de plus de 100 morts et de 1300 disparus. Dans le Grand Nord canadien,168 000 personnes ont été évacuées ; l’état d’urgence a été décrété à la suite d’incendies monstrueux consécutives à un réchauffement inédit, avec une température record de 49,6° C enregistré à Lytton.

Que font les politiques ? Des discours !

Le World Resources Institute rapporte que 4 milliards de personnes, soit la moitié de la population mondiale, affrontent ce qu’il appelle un ‘’stress hydrique’’. En cause, l’agriculture irriguée, la production d’énergie et l’industrie gourmandes en eau, les besoins de la population.

Que font les politiques ? Des discours !

L’organisation internationale pour les migrations (OIM) a recensé 27 364 morts et portés disparus en mer Méditerranée depuis 2014 et 2 063 pour les premiers mois de 2023. Les migrants sont essentiellement en provenance de l’Afrique subsaharienne.

Que font les politiques ? Des discours ! Là, ils agissent en fermant les frontières en érigeant des murs honteux, retardant les secours et attisant la peur de l’immigré fauteur de troubles !

L’actualité est ainsi faite d’informations tragiques qui interpellent l’honnête homme pour qui le mot humanité a encore un sens.

La politique doit être soucieuse du bonheur des peuples ; mais, aujourd’hui, les intérêts économiques de quelques oligarques sont plus importants que les intérêts de milliards d’hommes et de femmes.

Ces informations sur le quotidien tragique de la planète font quelques lignes dans les quotidiens, quelques images dans les journaux télévisés. Les scientifiques qui tirent le signal d’alarme depuis de trop nombreuses années et les ONG qui déploient des montagnes d’imagination pour apaiser les malheurs des plus faibles, n’en peuvent plus de tant d’immobilisme et de tant d’égoïsme.

Dans les médias sur lesquels les oligarques ont fait main basse, on préfère étaler le feuilleton du transfert du footballeur brésilien Neymar, ami de Bolsonaro et fêtard avéré, du PSG vers l’Arabie saoudite. Les appétits d’un émir sanglant n’ont plus de secret pour des populations en perte de repères.

Le monde est fou.

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