La Chouette qui hioque

Mois : mars 2022

Hollywood rêve-t-il encore ?

La réponse est lapidaire, c’est non !

La question était posée par Les Cahiers du cinéma du mois de mars ; elle est d’autant plus d’actualité après la cérémonie des Oscars lundi dernier, qui a vu Coda désigné comme le meilleur film de l’année.

L’histoire de Coda (acronyme de Child of Deaf Adult, ou Enfant entendant de parents sourds) est singulière puisqu’il s’agit du ‘’remake’’ du film franco-belge d’Eric Lartigau, La famille Bélier, sorti en France en 2014.

Les Américains n’aiment pas les films doublés ou sous-titrés et ils n’hésitent pas à acheter les droits de films à succès pour réaliser des films très américains. Merci pour le respect de l’exception culturelle ! D’autant plus qu’eux n’hésitent pas à inonder nos écrans et nos salles de leurs productions doublées ou sous-titrées.

Les spectateurs américains ne verront donc ni Karin Viard, ni François Damiens, ni Louane Emera, ni Eric Elmosnino, mais Emilia Jones, Marlee Matlin, Troy Kotsur et Eugenio Derbez. L’action ne se déroulera pas à la campagne, dans une ferme laitière, mais dans une ville de pêcheurs du Massachusetts.

On ne verra peut-être jamais Coda au cinéma sur un grand écran, puisque les droits de distribution pour le monde entier ont été acquis par AppleTV+ pour 25 millions de dollars (soit 2,5 fois le budget du film) ; d’ailleurs les Oscars 2022 ont fait la part belle aux films produits par les plateformes : 14, dont 6 de Netflix, 4 de Disney+, 2 de Prime Video et d’AppleTV+. Cruelle défaite pour Hollywood !

Les plateformes de streaming font courir un réel danger au cinéma et à la culture en général. Regarder un film sur un terminal mobile branché sur Netflix ou sur Prime Video, tête baissée, dans le train, le métro ou à son domicile, quelle aberration. La culture qui rassemble est à l’agonie, terrassée par les algorithmes qui pensent à votre place et choisissent le film ou la série qui correspond à votre profil. La tendance a fait écrire à Annie Le Brun dans Télérama : « Les algorithmes ne vous proposent plus que des contenus qui flattent vos goûts ou confirment vos opinions, vous faisant ainsi entrer malgré vous dans des groupes virtuels, des communautés, partageant vos choix. »

Hollywood ne rêve plus et nous non plus : les GAFA nous volent nos rêves et notre imaginaire.

Scandale d’Etat

Il est quand même curieux que le Sénat, majoritairement à droite toute (comme le candidat-président) ait enquêté pendant quatre mois sur l’influence croissante des cabinets privés sur les politiques publiques. Il faut que le phénomène ait atteint un niveau tellement scandaleux pour que des élus proches des milieux d’affaires et, par ailleurs, pourfendeurs des fonctionnaires parlent de « phénomène tentaculaire » et d’une trop grande pression sur les politiques publiques.

Le rapport estime que les dépenses de l’Etat en 2021 en prestations de conseils de cabinets privés, tels McKinsey, ont coûté un milliard d’euros. Il dénonce, surtout, la place réduite de l’autorité publique face aux orientations stratégiques préconisées par les consultants privés. Pour les sénateurs, le recours aux consultants est devenu un « réflexe », notamment quand il s’agit d’envisager de grandes réformes ou de la gestion de la crise sanitaire : approvisionnement, stockage et distribution des masques, conseils de relations avec la presse ont été sous-traités. Le rapport souligne encore que le cabinet McKinsey s’est vu confier quatre missions en un an concernant la vaccination.

Le rapport dénonce le « poids dans la décision publique » des cabinets privés et s’en inquiète. Les sénateurs ont-ils eu une lueur de sagesse ; on ne remerciera néanmoins que mollement ceux qui ont attendu le dévoilement du scandale McKinsey pour réagir (quand l’Assemblée nationale, elle, reste muette).

Les sénateurs de droite ne font pas le lien entre la politique de droite du gouvernement, la réduction du nombre de fonctionnaires (entre 3500 et 4000 à la seule Direction générale des finances publiques) et l’évasion fiscale, dont il me semble que le phénomène est lié. 

En effet, on a appris que le cabinet McKinsey, omniprésent et grassemment rémunéré, n’avait pas payé d’impôt en France depuis une dizaine d’années ! L’évitement du cabinet américain dont le siège est situé dans le Delaware, un paradis fiscal, n’est qu’une goutte d’eau dans cette formidable évasion dûe à la fraude des grandes entreprises. Les partis de gauche et les associations comme ATTAC ou Oxfam, estiment l’évasion fiscale à 80 milliards d’euros par an.

Un non problème pour Macron, un scandale d’Etat pour les Français !

La fabrique des saints

Je suis un mécréant invétéré, je ne m’étais jamais posé la question du pourquoi et du comment l’Eglise catholique fabrique des saints. Jusqu’à ce jour où un excellent entretien de Julie Klotz (Le Monde) avec un économiste (qui m’est inconnu) a retenu toute mon attention : les propos d’Augustin Mohrer sont originaux et fort convaincants. Je lirai donc son livre.

J’ai retenu de son entretien que l’Eglise romaine a ‘’fabriqué’’ des saints entre 300 et 350 à la suite d’une grave crise économique et parce que « les dieux souvent bienveillants de l’époque – entre 1000 et 2000, avec Jupiter en haut du panthéon – n’étaient plus en adéquation avec les besoins d’une population dont le quotidien était devenu plus austère. »

L’économiste observe ensuite que « c’est à partir du Ve siècle que les édiles chrétiens se sont aperçus qu’il manquait une figure symbolisant la bonté. Marie est ainsi venue remplacer la déesse égyptienne romanisée Isis pour incarner la symbolique féminine. » Mohrer a également noté que les saints patrons remplissent une dimension économico-politique : « A la fin de la féodalité, quand les marchands acquièrent une puissance économique capable de contrebalancer celle des seigneurs, l’Eglise va intronier des saints patrons pour essayer de s’attirer les faveurs économiques des marchands ».

Reste Jeanne d’Arc, héroïne nationale, qui a dû attendre des siècles ; elle n’a été béatifiée qu’en 1909, puis sanctifiée qu’en 1920, 500 ans après sa mort.  Evidemment, Mohrer a, là aussi, une explication à cette sanctification politique : « En 1920, deux ans après la guerre, la France, humiliée par la Prusse et l’Allemagne, avait besoin d’une personnalité redonnant espoir et gloire au sentiment national. En incarnant la Française libérant le pays de ses ennemis, Jeanne d’Arc intervient comme un symbole fort. »

Les démonstrations semblent fort pertinentes et fondées. Reste à se plonger dans les 240 pages du livre d’Augustin Mohrer pour approfondir ce sujet traité à l’aide d’outils d’analyse économique. Surprenant et attirant.

La gangrène

Nicolas Sarkozy est rancunier (terriblement), imbu de sa (petite) personne et d’une rare méchanceté. En 2006, après que Paris Match eut publié une photo de celle qui était encore son épouse, Cécilia, en compagnie de son amant, Richard Attias, à New York, il avait obtenu le départ du directeur du magazine people, Alain Genestar. 

Aujourd’hui, deux jours aprè un article d’une pleine page dans Le Monde révélant les interventions de l’ex-président au sein du groupe Hachette pour menacer ceux qui ont osé publier des enquêtes de journalistes rappelant ses déboires judiciaires, on apprend le départ de Sophie de Closets de Fayard.

Si on en croit Le Monde, le sort de Sophie de Closets était scellé depuis la fin de 2021 ; au cours d’un entretien tumultueux avec Olivier Nora, patron de Grasset (autre maison d’Hachette), Nicolas Sarkozy eut le toupet de rétorquer à celui qui considérait que le départ de la présidente de Fayard serait une perte considérable : « On disait déjà ça pour M. Nourry et la maison continue de très bien tourner. »

Que les menaces de Sarkozy soient suivies d’effets, voilà qui en dit long sur la censure régnant dans les médias et la culture en France !

Emmanuel Macron semble marcher sur les mêmes traces que son ami Sarkozy. Aujourd’hui, le président-candidat (qui n’a pas le temps de faire campagne) veille néanmoins sur tout et sur le moindre détail. On apprend que Pierre Lescure est remplacé à la présidence du Festival de Cannes par Iris Knobloch après intervention de Dominique Boutonnat (soutien de Macron et placé par ce dernier à la présidence du CNC) et de Roselyne Bachelot. 

La nouvelle présidente a été cependant très mal élue. Certains administrateurs ont jugé que le parcours de cette juriste de formation n’était pas compatible avec cette tâche : elle a été une dirigeante de la Warner Bros à Los Angeles puis à Paris pendant plus de vingt ans. On lui reproche son profil très ‘’business’’, mais aussi d’être administratrice de la banque Lazard et vice-présidente du conseil d’administration du groupe Accor, puis, après avoir quitté la Warner en juillet 2021, d’avoir créé un fonds d’investissement dans lequel on retrouve, par hasard (?) Matthieu Pigasse et Artemis, la holding du groupe de la famille Pinault.

Un producteur, Saïd Ben Saïd, a osé ‘’twitter’’ : « Est-ce qu’on ne fait pas une erreur en nommant à la tête des institutions culturelles des personnes, certes très qualifiées dans leur domaine de compétence, mais pour qui la culture et l’art ne sont que des colonnes de chiffres ? »

Cinéastes, producteurs et distributeurs indépendants, exploitants de salles ont fait savoir à Pierre Lescure leur condamnation du processus de nomination d’Iris Knobloch, un choix venu d’en haut. Et la SACD a enfoncé le clou en termes clairs : « C’est la première fois qu’on a une présidence mal élue, et que l’État, qui a une présence très forte au sein du Festival de Cannes, impose son candidat sans concertation d’aucune sorte, passant outre la très grande hostilité de la profession ».

Sarkozy orchestre les mises à l’écart et Macron les nominations. Dans un cas comme dans l’autre, on verrouille la liberté d’expression d’un simple coup de fil.

Notre démocratie est gangrénée. Le seul remède à la putréfaction du tissu de la démocratie est l’amputation. C’est-à-dire la mise hors d’état de nuire de ceux qui attentent chaque jour aux principes républicains. Il faudra bien qu’un jour, proche, le peuple reprenne le pouvoir et soigne la démocratie en écartant définitivement les Sarkozy et autres Macron.

Mauvais rêve et réalité

Est-ce que je rêve ? Je crois plutôt que je me réveille d’un atroce cauchemar ?

Tout s’embrouille dans ma tête, tant le monde me semble de plus en plus fou, déboussolé et difficile à vivre.

La guerre est à nos portes, en Ukraine, faisant passer sous silence les combats au Yémen et ailleurs.

Reste-t-il un soupçon d’humanité à Poutine ? On en doute à voir la sauvagerie avec laquelle ses soldats s’acharnent sur certaines cités. Osera-t-il raser Odessa comme il a rasé Marioupol ? Odessa, ville symbole de l’insurrection du cuirassé Potemkine de 1905 et de la révolution contre le régime tsariste, trouvera-t-elle grâce à ses yeux ou voudra-t-il anéantir ce symbole des luttes de toujours des peuples contre l’absolutisme dont il n’est qu’un avatar ?

A des millers de kilomètres de l’Ukraine, les scientifiques ont relevé des températures inquiétantes dans la région la plus froide de la planète, l’Antarctique : -11,5° C, contre -50° C habituellement. Un tel réchauffement devrait inquiéter tous les dirigeants politiques de ce monde ! La catastrophe climatologique fera, dans quelques années, plus de morts que la guerre de Poutine. Mais si les scientifiques sont atterrés, les politiques n’y prêtent guère attention.

On ne prête guère plus d’attention à la crise de l’industrie pharmaceutique. La France laisse filer ses laboratoires et voit ses parts de marché décliner dangereusement : alors qu’en 2000, elle asssurait 23 % des exportations mondiales de vaccins, en 2020, elle n’en assurait plus que 14 %. Il s’agit du résultat de la réduction des financements publics à la recherche fondamentale. Des économistes du CEPII ont relevé que la dépendance française aux importations concerne aussi l’ensemble du petit matériel de santé et celui « des équipements de technologie médicale, fortement intensifs en R&D, et dont la fabrication nécessite une main-d’œuvre qualifiée (imagerie médicale, appareils respiratoires, dispositifs implantables…). Pour ces équipements, la France est légèrement déficitaire, avec une part de marché faible et en déclin (3 % des exportations mondiales en 2020). »

La France s’apprête à élire un président de la République par défaut, sans campagne électorale digne de ce nom, sans débat. Mais, à droite toute.

Les programmes des candidats, particulièrement ceux de droite, sont affligeants et nous annoncent des jours malheureux. Et, surtout, sans culture, étrangement absente de leurs programmes. 

Si je me morfonds, les riches, eux, sont aux anges : malgré les crises, les profits gonflent et les dividendes seront encore en hausse. Pendant la guerre, les affaires continuent.

Bolloré peaufine son OPA sur Lagardère et le couple Martin Bouygues – Nicolas de Tavernost la fusion de TF1 et de M6.

Les actionnaires du groupe M6 sont tellement satisfaits de la gestion de son patron, qu’ils ont décidé de lui octroyer un bonus de 3,58 millions d’euros, venant compléter un salaire de 1,9 million d’euros et des attributions gratuites d’actions gratuites. Soit un total de 5,88 millions.

Combien de laboratoires et de chercheurs pourrait-on financer avec ces sommes-là ? Combien de recherches sur les énergies renouvelables pourrait-on financer en abolissant les guerres ? 

Est-ce que je rêve ?

En finir avec la guerre

Combien de morts faut-il dénombrer en Ukraine pour que l’ONU se réveille, fasse appliquer sa charte et donne l’occasion à son secrétaire général de s’exprimer et d’agir ?

L’escalade s’accentue chaque jour, inquiétante et terrible pour ceux qui meurent sous les bombes, faisant planer le risque du déclenchement d’une nouvelle guerre mondiale. Les faucons sont à l’affût et les politiques semblent ne plus rien maîtriser. Mais trop, c’est trop. Les peuples ne demandent pas la guerre et, au contraire, aspirent à la paix et n’en peuvent plus de la pauvreté qui s’étend partout.

Vladimir Poutine poursuit son œuvre destructrice et sème la mort sur tout le territoire ukrainien. Les pays membres de l’OTAN prétendent ne pas intervenir mais fournissent des subsides et des armes à Zelensky, alimentant la spirale mortifère quand il faudrait rechercher la fin des opérations et imposer la voie diplomatique.

Mais où est l’ONU ? Où sont les belles déclarations de son préambule : « Nous, peuples des nations unies résolus, à préserver les générations futures du fléau de la guerre qui deux fois en l’espace d’une vie humaine a infligé à l’humanité d’indicibles souffrances, à proclamer à nouveau notre foi dans les droits fondamentaux de l’homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l’égalité de droits des hommes et des femmes, ainsi que des nations, grandes et petites, à créer les conditions nécessaires au maintien de la justice et du respect des obligations nées des traités et autres sources du droit international, à favoriser le progrès social et instaurer de meilleures conditions de vie dans une liberté plus grande, et à ces fins, à pratiquer la tolérance, à vivre en paix l’un avec l’autre dans un esprit de bon voisinage, à unir nos forces pour maintenir la paix et la sécurité internationales, à accepter des principes et instituer des méthodes garantissant qu’il ne sera pas fait usage de la force des armes, sauf dans l’intérêt commun, à recourir aux institutions internationales pour favoriser le progrès économique et social de tous les peuples » ?

S’agit-il des engagements d’un autre siècle ?

Les cinq membres permanents du Conseil de sécurité (Chine, Etats-Unis, France, Royaume-Uni, Russie) se sont arrogés des droits exorbitants de veto que rien ne justifie, mais qui ont sclérosé le fonctionnement de l’ONU et, notamment de son article 51.

Celui-ci reconnaît le ‘’droit naturel de légitime défense’’ mais seulement « jusqu’à ce que le Conseil de sécurité ait pris les mesures nécessaires pour maintenir la paix et la sécurité internationales. » L’article 51 ajoute que les mesures prises dans l’exercice du droit de légitime défense « n’affectent en rien le pouvoir et le devoir qu’a le Conseil (…) d’agir à tout moment de la manière qu’il juge nécessaire pour maintenir ou rétablir la paix et la sécurité internationales ».

Que fait l’ONU ?

On ne parle aujourd’hui que de l’OTAN et des décisions de ses membres d’augmenter leurs crédits militaires comme le souhaitait ce fou de Donald Trump, à l’image de l’Allemagne.

Les peuples souffrent et souffriront davantage demain, par la faute de quelques dirigeants, souvent élus par défaut, qui endossent allègrement les uniformes de chefs de guerre (surtout en période électorale) comme Emmanuel Macron. Aucun d’entre eux ne fait plus référence à la Charte de l’ONU.

Si Poutine a pu déclencher ‘’sa’’ sale guerre (comme toutes les guerres), c’est aussi parce qu’il savait que l’ONU, supplantée par l’OTAN, serait dans l’incapacité de s’interposer en Ukraine comme ailleurs.

Pour en finir avec la guerre (partout et pas seulement en Ukraine), il y a urgence à réformer l’ONU. Aux peuples qui souffrent de l’imposer.

A droite toute !

Même les économistes les plus libéraux s’interrogent comme Philippe Mabille, directeur de la rédaction du quotidien La Tribune ! Dans sa chronique « Votre Tribune de la semaine » sur Internet, il écrit sous le titre « Et de droite et de droite, le ‘’En même temps’’ de 2022 » :

« Les jeux de l’Elysée sont-ils faits, vraiment ? interroge Marc Endeweld dans sa chronique Politiscope, ce vendredi. Pas si sûr. Certes, à plus de 30 % au premier tour, le président creuse l’écart et seul Marine Le Pen reste au contact. Mais en filigrane de la guerre, ce qui inquiète les Français, au-delà de la fin du monde, cela reste la fin du mois. Et si le vent avait déjà commencé à tourner ? Alors que le candidat Macron présente un programme à droite toute, un nouveau front s’ouvre, celui des prix de l’essence. »

Philippe Mabile enfonce le clou :

« Où est passé le ‘’en même temps’’ de 2017 ? Son centre de gravité s’est juste déplacé à droite toute. »

Emmanuel Macron, à droite toute ? Qui en doutait encore ? En revanche, si La Tribune peut se permettre d’écrire que le vent commence à tourner, c’est que le patronat commence à s’inquiéter. Et à craindre une extension des luttes pour les salaires. Devront-ils accorder des hausses de salaires et limiter le versement de dividendes somptueux ?

Les oligarques craignent-ils de voir les électeurs sanctionner un président-candidat à droite toute, c’est-à-dite trop ouvertement à droite. Le candidat de 2017 a menti et a leurré un très (trop) grand nombre de Français ; en 2022, le président-candidat ne trompe plus personne avec son programme de régression sociale et de privatisation accélérée des services publics.

Mais si Macron est vraiment dévalorisé, au profit de qui ? Hélas, pas de la gauche, la vraie, c’est-à-dire celle qui veut une vraie rupture avec le libéralisme.

Changer l’Europe

Pendant la guerre en Ukraine, les affaires continuent. Les marchands d’armes (la France est bien placée) se frottent les mains et leurs actionnaires font des projections sur les dividendes qu’ils toucheront l’an prochain.

Mais il ne faut pas croire que les affaires se cantonnent à la vente d’armes. En ces temps troublés, la Commission européenne a eu le temps de se pencher sur le rachat des studios de la Metro Goldwyn Mayer (MGM) par Amazon.

Pour les libéraux de Bruxelles « l’opération envisagée ne poserait pas de problèmes de concurrence sur aucun des marchés examinés dans l’Espace économique européen ».

C’est cynique.

L’opération est très contestée aux Etats-Unis. Le rachat n’est qu’un épisode de la guerre entre les grandes plateformes du cinéma pour contrôler les catalogues de films et Amazon va pouvoir présenter la décision européenne pour faire taire les opposants outre-Atlantique.

Avec ce rachat, Jeff Bezos va mettre la main sur plus de 4000 films, dont la série de James Bond, de Rocky ou encore Basic Instinct, le Silence des agneaux, et présenter un catalogue de 56 000 titres, beaucoup plus que Netflix qui a aujourd’hui un catalogue de 20 000 titres. 

Aujourd’hui, Netflix prétend avoir 210 millions d’abonnés dans le monde, contre 175 millions à Amazon.

Pour voir des films-cultes, il faudra bientôt s’abonner à Netflix ou Amazon. Et les chaînes gratuites en seront privées. Mais la commission européenne ny voit pas de problèmes.

En changeant de président dans quelques semaines, on pourrait peut-être aussi changer l’Europe des libéraux pendant qu’on a encore le pouvoir de rêver.

Halte à l’armement

L’Allemagne se réarme et ce n’est pas une bonne nouvelle.

Le nouveau chancelier, Olaf Scholz (social-démocrate), a annoncé vouloir consacrer 100 milliards d’euros à la modernisation de l’armée de son pays et, aussitôt, la ministre de la défense, Christine Lambrecht, elle aussi social-démocrate, a dévoilé que la Luftwaffe allait acheter jusqu’à 35 avions furtifs américains, les F-35 de Lockheed Martin. Provoquant l’étonnement d’Emmanuel Macron qui militait, lui, pour le projet de l’avion de combat du futur (SCAF) d’un consortium franco-germano-espagnol.

Les motivations allemandes sont inquiétantes ; Berlin a fait le choix du seul avion homologué pour le transport de bombes nucléaires américaines. Le chancelier Olaf Scholz rompt avec la politique d’Angela Merkel et de ses prédécesseurs qui avaient choisi de ne pas développer un arsenal atomique.

En se rangeant sous pavillon américain, l’Allemagne choisit de perpétuer son engagement de transporter des bombes nucléaires dans les missions d’urgence, décrétées par les faucons de Washington et de l’OTAN.

L’Allemagne joue un jeu dangereux, au moment où la guerre de Poutine en Ukraine peut déraper à tout moment et plonger le monde dans une guerre nucléaire sur toute la planète et où ces mêmes faucons tentent de ranimer une organisation, l’OTAN, que Macron avait déclaré en état de mort clinique.

Les Etats libéraux font le choix de rapports belliqueux sous la pression de leurs oligarques respectifs soucieux de s’approprier les ressources naturelles nécessaires à leur business ; au détriment des peuples, asservis et appauvris. Quand les peuples d’Afrique, notamment, crient famine.

Quel monde pourri !

Un autre monde

Au lendemain de la conférence que j’ai donnée à Dijon devant les adhérents de la Libre Pensée, je mesure plus encore qu’hier le désarroi des citoyens face à une information entre les mains de la doxa libérale.

Les attentes sont fortes parmi les lecteurs, auditeurs et téléspectateurs, mais aussi les internautes. Les critiques sont sévères et ce sont les journalistes qui sont considérés comme les responsables de la désinformation. Il faut une débauche d’arguments pour démonter la ‘’fabrique de l’information’’ et mettre en cause les propriétaires des médias, les quelques milliardaires qui, comme Bolloré, Arnault, Bouygues, Niel et quelques autres, verrouillent les rédactions grâce à une hiérarchie aux ordres.

Il m’est revenu à l’esprit une phrase que Robert Guédiguian fait prononcer à Pascale Roberts dans le film ‘’Marius et Jeannette’’ :

« S’il y avait plus de journalistes issus de notre monde, ils parleraient mieux de nous. »

Assurément. Encore faut-il libérer les médias pour libérer l’information ; c’est ce qu’on appelle l’appropriation des outils de production.

Mais cela n’adviendra que dans un autre monde, libéré du libéralisme.

La culture pour la paix

L’appel au boycott des artistes russes s’étend partout dans le monde, y compris du côté de Saint-Germain-des-Prés dans les cafés chics fréquentés par l’homme à la chemise blanche, Bernard-Henri Lévy.

C’est idiot, contre-productif et c’est ignorer ce qui se passe en Russie où de nombreux artistes, au péril de leur liberté, se prononcent contre la guerre de Poutine en Ukraine.

Sergeï Loznitsa, brillant mathématicien ukrainien (né en Biélorussie soviétique), devenu un grand réalisateur, auteur, notamment, de ‘’Donbass’’ (2018), a démissionné avec fracas de l’Académie européenne du cinéma, en dénonçant un communiqué dans lequel le directeur de l’EFA qualifiait l’offensive russe « d’événements actuels » et n’employait pas le mot guerre. 

Pour autant, Sergeï Loznitsa ne condamne pas ses amis russes. Il a publié un communiqué dont BHL (et ses amis va-t-en-guerre) aurait été bien inspiré de lire avant de prononcer la mise au ban des artistes :

« Le 24 février 2022, alors que les régiments russes venaient juste d’envahir l’Ukraine, le tout premier message que j’ai reçu émanait de mon ami Viktor Kossakovski, metteur en scène russe : « Pardonne-moi. C’est une catastrophe. J’ai tellement honte. » Puis, plus tard dans la journée, Andreï Zviaguintsev, très faible encore après sa longue maladie, enregistrait son message en vidéo : « Beaucoup de mes amis et collègues, des cinéastes russes ont critiqué cette guerre folle. Et quand j’entends aujourd’hui des appels à interdire les films russes, je pense à mes amis qui sont des gens honnêtes et respectables. Ils sont autant que nous victimes de cette guerre. Ce qui se passe aujourd’hui sous nos yeux est terrible mais ne sombrons pas dans cette folie. On ne peut juger des gens sur leurs passeports mais sur leurs actes. Le passeport est lié au hasard de la naissance, alors que les actes, c’est ce qu’accomplit l’être humain lui-même. »

Des cinéastes russes ont créé un collectif contre la guerre en Ukraine ; des milliers d’artistes et d’acteurs culturels ont fait de même et ont signé une lettre ouverte intitulée ‘’Non à la guerre’’, dans laquelle ils dénoncent « le plus grand échec moral de notre siècle » et qualifient l’invasion de l’Ukraine de « honte ». Au risque d’être emprisonnés.

Roselyne Bachelot, ministre de la culture, a pris le contrepied de BHL et a déclaré : « On ne va pas arrêter Moussorgski, on ne va pas arrêter Tchaïkovski, on ne va pas arrêter de jouer Tchekhov. Il y a des demandes de boycott qui ne correspondent pas à ce qu’est pour nous la culture ».

La culture est plus que jamais nécessaire pour faire taire les armes. Car la culture est synonyme d’échange, de compréhension de l’autre et d’intelligence.

Alors, BHL, taisez-vous !

Une idée pour le journalisme

Valérie Heurtel présente une rubrique quasi quotidienne dans le journal de 13h de France 2, ‘’Une idée pour la France’’. La journaliste est loin d’être sotte, le titulaire du journal, Julian Bugier, également. Mais ils apparaissent béats d’admiration durant toute la durée de la rubrique, ébahis devant l’ingéniosité vantée des Français.

Le site de France 2 présente ainsi la séquence :

« Créer un service innovant pour personnes âgées, inventer des solutions de recyclage, faire renaitre un village avec des idées originales… Tous les jours, des Français expérimentent des solutions locales pour résoudre des problèmes du quotidien. Associations, particuliers, élus, chefs d’entreprise, ils se mobilisent pour faire avancer leur cause, et bien souvent ces initiatives concrètes ne sont pas connues du grand public. Avec la rubrique « Une idée pour la France », le journal de 13 heures de France 2 souhaite mettre en avant ces opérations et leurs initiateurs. Mais pour cela, les équipes de France Télévisions ont besoin de vos contributions. »

Les organisations syndicales de France 2 dénoncent « cette nouvelle marotte appelée ‘’journalisme de solutions’’, demandant notamment s’il s’agissait d’une nouvelle façon de faire du journalisme, et si cela revenait à abandonner la sacro-sainte neutralité du service public en présentant certaines solutions à des problèmes sous un jour favorable. Quelles solutions en effet seront mises en avant pour régler les grands problèmes de notre époque ? Des solutions mises en avant par des ONG, des associations, faisant partie de l’économie sociale et solidaire, par des collectivités locales, des entreprises privées ou même des multinationales ? Aucune solution n’est neutre politiquement ou économiquement. »

Les syndicats s’inquiètent de l’abandon du nécessaire travail d’enquête et de vérification de l’information ; en effet, « par manque de temps ou d’effectif, il est parfois compliqué d’effectuer des recoupements en région. Aussi pour éviter des erreurs, certaines informations ne sont pas données à l’antenne. »

On a bien compris que cette rubrique est une réponse au populisme du journal de 13h de TF1 et de son ancien présentateur, Jean-Pierre Pernaut. Mais est-ce le rôle du service public de ‘’singer’’ une chaîne privée dont la finalité est de vendre du temps de cerveau humain disponible à Coca-Cola ?

Revendication et action de classe

Alain Badiou livre dans la collection Tracts de Gallimard un brillant essai sur la désorientation du monde, mis davantage en lumière avec la pandémie du Covid.

Pour le philosophe, le désordre du monde est général et préexiste à la pandémie ; il faut en rechercher les causes dans l’idéologie dominante, le capitalisme et son appellation actuelle, l’ultralibéralisme.

Il consacre un chapitre à « la différence radicale entre ‘’revendication’’, au niveau syndical, et ‘’action de classe’’, au niveau politique ». Il la formule ainsi :

« L’opposition fébrile à des mesures gouvernementales particulières n’est qu’une négation localisée, et finalement réformiste, de la politique dominante. On le voit clairement de ce que, dans ce genre de situation, réclamer satisfaction revient en fait à admettre, premièrement que le régime en place a le monopole des décisions politiques, deuxièmement qu’on le croit en vérité capable de concessions sur le point en jeu. »

Il ajoute en conclusion du chapitre :

« Tout cela indique que la désorientation contemporaine – notamment le caractère abstrait et inefficient des mouvements populaires ‘’coléreux’’, vu leur intériorité à l’ordre dominant et leur dépendance des décisions de l’Etat bourgeois, vu par conséquent la faiblesse de leur négation – loin d’être une conséquence de la pandémie, est une étape du capitalisme mondialisé pour fixer les nouvelles et juteuses lois du profit quand le processus de la politique communiste est provisoirement plongé dans une crise particulièrement sévère. »

Si je partage largement nombre de ses thèses, Alain Badiou me semble ici, et sur ce point précis, en décalage avec la réalité. Sa condamnation du syndicalisme réformiste ne peut pas être prononcée à l’encontre de toutes les organisations. La CGT affirme dans ses statuts lutter pour la transformation de la société et la libération de l’exploitation capitaliste ; il s’agit de formules qui revendiquent avec d’autres mots l’appropriation collective des grands moyens de production, d’échanges et du système financier.

La question est toujours d’actualité, sans attendre le grand soir. La CGT, dont on ne peut pas nier qu’elle pratique un syndicalisme de combat, contrairement aux syndicats réformistes, n’a jamais abandonné la transformation de l’Etat qui puisse permettre à tous les citoyens, qu’ils soient salariés ou élus du peuple, de décider et de contrôler les politiques industrielles, commerciales et financières. Il ne me semble pas que cette vision du syndicalisme soit à opposer à « un nouveau départ du communisme ».

Il y a en revanche une différence de responsabilité, les syndicats n’ayant pas de responsabilité politique depuis la Charte d’Amiens et n’étant pas adhérents à une quelconque organisation politique comme c’est le cas en Grande-Bretagne ou dans les pays nordiques.

Les syndicats combatifs contestent de plus en plus fermement le monopole de décisions politiques et n’hésitent pas à s’opposer au gouvernement et les mobilisations créent les conditions pour contraindre gouvernement et patronat à faire des concessions.

Néanmoins, il faut admettre que les syndicats combatifs sont en grande difficulté aujourd’hui en raison d’un contexte bouleversé et d’absence de perspective de changement politique crédible.

Il est vain de vouloir distinguer revendication et action de classe.

(Remarques sur la désorientation du monde, Alain Badiou, Collection Tracts, 52 pages, 3,90 €)

La Voix de son maître

La Voix du Nord n’a pas publié la lettre de candidature d’Emmanuel Macron dans son intégralité dans l’édition ‘’papier’’ (mais reprise in extenso sur son site) et son rédacteur en chef, Patrick Jankielewicz, a expliqué que « Emmanuel Macron candidat n’est pas Emmanuel Macron président. S’il s’exprime dans le cadre de la campagne, il le fait comme tous les autres candidats, qui ont généralement annoncé leurs intentions lors de conférences de presse. Nous avons pu les interroger et leurs réponses ont été analysées et disséquées avant d’atterrir sur nos pages. »

Le journaliste a ajouté que « Nous ferons de même si d’autres candidats nous transmettent un tel texte. »

Le quotidien nordiste s’était déjà distingué en 2018 en refusant de publier une interview du président de la République recueillie par quelques représentants de la presse quotidienne régionale, triés sur le volet, pour protester contre la réécriture des réponses par les conseillers politiques de l’Elysée.

L’attitude de la rédaction du quotidien est remarquable ; elle a ainsi refusé de se prêter à la communication politique et affirmé sa volonté de respecter les lecteurs en restant maîtresse de l’information.

L’Elysée avait négocié la publication de la lettre du candidat avec le syndicat des quotidiens régionaux, qui, une fois encore, a accepté de prêter son concours à la communication d’Emmanuel Macron, piétinant sans vergogne l’éthique et les principes professionnels des journalistes en s’adressant directement aux lecteurs et en marquant sa volonté de se rapprocher des électeurs du territoire (« Avec vous, pour vous. »), loin du ’’microcosme parisien’’.

La décision de la Voix du Nord s’explique d’autant mieux que la fameuse lettre était sur tous les réseaux sociaux dès la veille de sa publication par la PQR.

Il est toutefois regrettable que d’autres rédacteurs en chef n’aient pas imité la Voix du Nord, laissant accréditer l’idée que le quatrième pouvoir n’était pas autonome et avait abdiqué son rôle social de contrepoids dans une société authentiquement démocratique.

La Voix du Nord, elle, s’est refusée à n’être que la Voix de son maître !

Silence, on ferme

Le Figaro annonce qu’Amazon, le géant de la vente en ligne, fait le ménage parmi ses magasins physiques. La firme va fermer ses 24 librairies, mais aussi les Amazon 4-Star, où les acheteurs pouvaient trouver les produits les mieux notés par les acheteurs en ligne, et les ‘’pop-up stores’’ ouverts dans des centres commerciaux. Ce sont au total 66 magasins qui doivent fermer dès cette année, dont 2 au Royaume-Uni.

L’abandon des librairies physiques est particulièrement symbolique ; les livres proposés aux acheteurs étaient sélectionnés en fonction des notes attribuées par les clients de la plateforme sur Internet, donc, en priorité, les best-sellers. Amazon était devenu de 2015, date de la première ouverture d’une librairie à Seattle, à aujourd’hui la 5e chaîne des Etats-Unis. L’expérience a tourné court, jugée insuffisamment rentable ; ce qui fait écrire au Figaro : « Le géant de Seattle a pris l’habitude de tester de nouveaux concepts et d’arbitrer ensuite. » Les employés apprécieront.

Jeff Bezos n’est pas le premier à connaître un échec dans les librairies. Le groupe Lagardère avait racheté les 16 magasins Virgin Stores à Richard Branson au lendemain de son échec dans le e-commerce en 2001. Arnaud Lagardère tonitruait et parlait alors de nouvelles conquêtes, d’un nouveau label, jeune et à forte notoriété. La conquête s’est vite transformée en défaite en rase campagne : Arnaud Lagardère revendait à perte (lourde) les 16 magasins six ans plus tard, en 2007 à un fonds d’investissement, Butler Capital Partners.

Jeff Bezos n’est pas soumis aux mêmes contraintes financières, mais il fait la démonstration de ses limites industrielles en se lançant dans des stratégies hasardeuses.

Cette piètre expérience ne l’empêche pas de continuer à rechercher de nouvelles sources de profit, au risque de perdre encore des millions de dollars : il a annoncé l’ouverture prochaine d’un magasin de mode à Los Angeles, où ses algorithmes feraient le choix des vêtements à proposer aux clients.

On attend l’annonce de la fermeture dans quelques mois !

L’ensauvagement du capital

Des morts, le chaos en Ukraine ; une guerre d’oligarques par pantins interposés ; mais des peuples qui souffrent davantage chaque jour. Le libéralisme continue à faire des ravages sur une planète en danger ! Raisons de plus pour dénoncer les ravages d’une idéologie, lire celles et ceux qui dénoncent ses méfaits et avoir une claire conscience des enjeux de la situation. C’est ce que vient de faire Ludivine Bantigny.

En 60 pages, Ludivine Bantigny dresse en effet le réquisitoire du capitalisme avec véhémence mais justesse. Ses mots sont précis, ses phrases redoutables.

Tout est inventorié en quelques lignes, le néo-colonialisme, les conditions de travail, les évasions fiscales et les fraudes des riches, les atteintes à l’environnement, les vies fauchées, les destructions des services publics, etc. Ludivine Bantigny frappe fort, mais elle parle vrai et dénonce les sarcasmes et le cynisme des libéraux qui confisquent le pouvoir.

Elle dénonce ‘’l’ensauvagement’’ du capitalisme « dont les « origines sont tachées de sang », mais qui « n’est pas réservé au passé ».

En conclusion, elle s’interroge en reprenant une phrase écrite par un socialiste anglais, peinte et poète en 1884 : « comment nous pourrions vivre » et qui concluait un discours par une très belles expression et un programme enthousiasmant : « Ce n’est pas une revanche que nous désirons pour les pauvres, c’est le bonheur. »

En 60 pages, donc, qu’on lit d’un trait, nous sommes invités à réaffirmer le droit au bonheur pour tous. Grâce à une nouvelle collection du Seuil, intitulée Libelle, très proche de la collection Tracts de Gallimard, pour un prix modeste (4,50 euros).

Il faut lire Ludivine Bantigny et ‘’L’ensauvagement du capital’’. A lire avant d’aller voter (et même sans voter), de toute urgence.

Confusion

Mais qu’arrive-t-il aux Verts ? Leur programme préconise la sortie de notre pays de l’OTAN ; puis, aujourd’hui, Yannick Jadot, leur candidat, prône au contraire son élargissement et la livraison d’armes létales à l’Ukraine. Peut-on parler d’opportunisme ou de navigation à vue ?

Mais qu’arrive-t-il à Anne Hidalgo et François Hollande, prétendument socialistes ? Ils ont répondu favorablement à l’invitation de l’ancien ‘’nouveau philosophe’’ à la chemise blanche, devenu très réactionnaire, l’ineffable Bernard-Henry Lévy, qui organise un meeting au Théâtre Antoine après avoir appelé à envoyer des militaires français en Ukraine avec du matériel lourd. Que Valérie Pécresse et Christophe Castaner (ex-socialiste) participent à cette soirée belliciste n’étonnera pas, mais que des socialistes revendiqués participent à cet appel à la guerre quand Jean Jaurès, en vrai socialiste, déclarait : « On ne fait pas la guerre pour se débarrasser de la guerre » est franchement inquiétant.

Le fou du Kremlin a semé la guerre ; on a constaté, hélas, que Poutine a aussi semé la confusion dans les cerveaux de nos politiques. La force n’a jamais permis de régler les conflits, ils le savent (les exemples ne manquent pas, y compris récemment) ; cependant certains continuent à tourner le dos à la raison : aujourd’hui, c’est d’un appel à l’arrêt de la guerre et de la violence sous l’égide de l’ONU dont nous avons besoin. Contrairement à ce qu’affirme Emmanuel Macron, pour qui la guerre sera longue comme pour tout justifier.

En envoyant des armes aux Ukrainiens et des troupes en Roumanie, la France contribue à l’escalade belliqueuse ; en réaffirmant haut et fort avec Jean-Yves Le Drian que l’OTAN est une « alliance nucléaire », nos dirigeants et certains candidats à l’élection présidentielle donnent une occasion à Poutine de franchir, lui aussi, une nouvelle étape mortifère en brandissant la menace nucléaire.

Il faut sortir de cet engrenage de la propagande guerrière. Le peuple ukrainien n’a rien à y gagner ; l’Europe non plus. Les peuples veulent la paix !

Bannir la guerre et contribuer à instaurer la paix, il n’y a pas de plus beau programme.