La Chouette qui hioque

Mois : mai 2022 (Page 1 of 2)

Mensonges de Darmanin, politique d’Etat

Gérald Darmanin est un fieffé menteur.

La finale de la Coupe d’Europe de football entre le Real de Madrid et le Liverpool FC au stade de France a tourné au fiasco et le ministre de l’intérieur et a étalé aux yeux du monde entier un dispositif sécuritaire répressif et honteux, uniquement répressif des forces de l’ordre.

Gérald Darmanin ose avancer, sans citer ses sources, que 30 000 à 40 000 supporteurs anglais étaient porteurs de faux billets et parle de fraude massive. Plus le mensonge est gros… S’est-il rendu compte de l’absurdité des chiffres avancés, qui représentent la moitié de la capacité du stade !

Le passé sulfureux des hooligans permet au ministre de l’intérieur de justifier l’injustifiable, l’utilisation des gaz lacrymogènes et des matraques. De nombreux témoins affirment, au contraire qu’il n’y a pas eu d’incidents provoqués par des Anglais.

Un éditorialiste anglais s’est étonné que la ministre des sports continue de coloporter le récit d’un chaos provoqué par les supporters de Liverpool munis de faux billets. 

Celui qui était à la manœuvre samedi soir était le préfet Didier Lallement, qui s’est signalé dans la répression des manifestations de gilets jaunes ou des cortèges syndicaux. Il a encore failli en assimilant nécessairement les supporteurs anglais à des voyous.

Le football est un sport populaire et, à ce titre, les supporteurs sont assimilés à des délinquants, comme les gilets jaunes ou les syndicalistes. Le préfet en question n’a qu’une doctrine de maintien de l’ordre, la répression, féroce et disproportionnée, qui blesse, mutile, place en garde à vue, pour décourager les prétendus ’’voyous’’, le peuple, de participer aux manifestations, y compris festives comme celles d’un match de football.

Aujourd’hui, comme auparavant après chaque répression, Gérald Darmanin n’a qu’un argument pour se dédouaner lui et son préfet, le mensonge.

Il faut remarquer que la nouvelle ministre des sports, Amélie Oudéa-Castera en reprenant les propos de Darmanin, accrédite que la doctrine du maintien de l’ordre de Darmanin mise en œuvre par Lallement est une doctrine d’Etat, partie intégrante de la doctrine du pouvoir vertical et libéral du président de la République.

Les libertés individuelles et collectives sont en grand danger.

Voilà en fait !

Les tics de langage se multiplient et rien n’est plus insupportable quand ils sont très invasifs. Il y eût l’utilisation de l’adverbe ‘’voilà’’ qui ponctuait toutes les phrases ; et voilà qu’il semble s’essouffler et ne plus être autant utilisé.

Mais, aussitôt, voilà que la locution adverbiale ‘’en fait’’ envahit toutes les interventions à la radio, à la télévision et s’impose dans les conversations courantes.

Les tics de langage auraient-ils aussi leur mode (passagère), un tic chassant l’autre ?

On pourrait le croire.

Après tout, pourquoi pas, si ‘’en fait’’ n’était pas employé de façon déraisonnée et dans un sens éloigné de sa définition : en réalité, effectivement.

Voilà qui ne bouleversera pas la marche du monde, mais qui démontre en fait que le français est une langue bien vivante, même si, parfois, les tics de langage sont irritants et désagréable à l’oreille. Voilà !

Le mépris du pantin grotesque

On savait Donald Trump dénué d’intelligence, figure emblématique de la pure bêtise, héritier d’une fortune mais d’une ignorance épouvantable, orgueilleux et méprisant en permanence. En résumé, un pantin grotesque, capable de tout.

Le tout a cependant été dépassé à Houston, Texas, à moins de 500 kilomètres d’Uvalde, également au Texas, où le lobby des armes, la National Rifle Association (NRA) tenait sa convention annuelle vendredi et qui n’a pas hésité un seul instant à maintenir la réunion des tueurs en puissance, malgré les accusations pesant sur elle après le carnage d’Uvalde.

Donald Trump y était l’invité d’honneur et il a dépassé les bornes de la décence ; non seulement il n’a pas eu un mot pour les pauvres petites victimes de la tuerie perpétrée par un malade des armes de 18 ans, mais il a osé déclarer à la tribune : « L’existence du mal dans notre société n’est pas une raison pour désarmer des citoyens respectueux de la loi (…) L’existence du mal est la raison pour laquelle il faut armer les citoyens respectueux de la loi. »

Il a qualifié le jeune assassin de « lunatique hors de contrôle », comme pour l’excuser, expliquant qu’il « brûlera en enfer », avant de dénoncer les démocrates qui exploitent politiquement « les larmes des familles ». Enfin, il a appelé à renforcer la sécurité dans les écoles en installant des clôtures robustes et des détecteurs de métaux, mais aussi en armant les enseignants.

Cette logorrhée confuse est hélas habituelle chez le milliardaire, incapable de se défaire de l’image du cow-boy à l’assaut du Far-West, tuant tout sur son passage. Il est affligeant de constater que Trump a été ovationné et que ses mots étaient largement approuvés à Houston. La surenchère verbale était la règle parmi les participants pour défendre le deuxième amendement de la Constitution des Etats-Unis.

La puissance de la NRA est effrayante ; elle a largement aidé Trump dans sa campagne présidentielle (31 millions de dollars en 2016 et 29 en 2020) ; elle est prête à renouveler ses subventions. Hélas, l’association n’est pas la seule à constituer le lobby pro-armes.

Tout ce que les Etats-Unis comptent comme intelligence doit s’allier pour, enfin, interdire les armes et éviter un second mandat de Trump dans deux ans. Les démocrates sont-ils prêts à affronter la NRA et le lobby.

Wauquiez, maître et seigneur

Laurent Wauquiez agit comme s’il était maître et seigneur de toute la région Auvergne-Rhône-Alpes, relent d’un atavisme familial ; ses ancêtres étaient déjà de fieffés industriels conservateurs.

Officiellement, au nom d’un prétendu équilibrage de l’affectation des subventions, il a décidé, seul dans son bureau présidentiel, de raboter, voire de supprimer, les aides à quelques cent cinquante institutions situées dans les grandes agglomérations de la région, parmi lesquelles l’Opéra de Lyon, le TNP de Villeurbanne, la Comédie de Saint-Etienne, etc. La punition atteint la somme de 4 millions d’euros, alors que les programmations sont déjà engagées et les contrats signés. 

 Wauquiez prétend ainsi vouloir favoriser les territoires les plus éloignés de la culture. La justification de Wauquiez est un gros mensonge et le résultat d’une magouille politicienne ; les institutions les plus impactées par ses décisions se situent dans des villes dirigées par la gauche et les institutions rurales ont été également visées par cette politique de gribouille.

Il n’a échappé à personne que la décision, arbitraire et destinée à flatter le populisme, intervient en pleine période électorale et qu’elle relève du fait du prince puisqu’elle n’a été précédée d’aucune concertation avec les institutions concernées.

Je n’ai jamais apprécié Laurent Wauquiez. Passé dans les plus grandes écoles de la République, Normal Sup, Sciences Po et l’ENA, il fait preuve d’une bêtise sans borne, étalant une idéologie rance. Bigot invétéré, il a déjà démontré une rare étroitesse d’esprit en soutenant la ‘’Manif pour tous’’ et en dénonçant les dérives de l’assistanat des chômeurs. En affichant aussi ses proximités idéologiques avec Marion Maréchal.

En s’attaquant avec une violence revendiquée à ce qui fait culture, Laurent Wauquiez ne mérite que mépris. S’il se réclame du gaullisme, il a sans doute oublié que le général avait appelé André Malraux à ses côtés pour promouvoir la culture dans des maisons ouvertes à toutes les couches de la société. Le président de région tourne le dos à cet héritage et entend maintenir ‘’son’’ peuple dans un état d’analphabétisme culturel indigne.

Le ‘’conducator’’ d’Auvergne-Rhöne-Alpes devrait lire et relire les discours de Vincent Lindon et de Sergueï Loznitsa à Cannes pour s’ouvrir l’esprit et faire preuve de tolérance, plutôt que de vouloir faire peuple avec sa parka rouge (toujours la même). Mais lire Lindon et Loznitsa fatigue. A croire qu’à l’ENA on interdit aux étudiants de lire les grands auteurs pour s’en remettre au bon sens populaire en toutes occasions.

En agissant comme il le fait, Laurent Wauquiez dit merde à Victor Hugo et j’ai une folle envie d’emprunter cette phrase définitive de François Morel adressée à Luc Ferry (autre agité du bocal) : « Comment peut-on être aussi intelligent en étant aussi con ? »

Elections, trahisons et mensonges

Que faire pour rassurer les citoyens que les prochaines élections législatives ne seront pas une nouvelle désillusion et une caricature de consultation démocratique ? Que le changement promis par le président reconduit n’a pas, déjà, connu le même sort que les rapports des consultations citoyennes, soigneusement enfouis dans les tiroirs d’un bureau de l’Elysée ?

L’utilisation d’un bulletin de vote sert-il encore à exprimer une opinion ou n’est-il qu’un leurre agité par une majorité (de plus en plus à droite) et un président seul maître et seigneur au pouvoir vertical ?

Toute la vie politique semble se réduire à une succession de mensonges et de trahisons ; tout semble se résumer à une mauvaise comédie jouée par de très mauvais acteurs.

Jean-Michel Blanquer remplacé par un universitaire réputé, Pap Ndiaye, dont on disait qu’il penchait à gauche, cela devait marquer une révision radicale de la politique du ministère de l’éduction nationale. Mais voilà que l’Elysée lui impose un directeur de cabinet, Jean-Marc Huart, qui a été directeur général de l’enseignement scolaire de 2017 à 2019 et qui était présenté comme le véritable ministre.

L’ex-cheffe de cabinet du ministre de l’agriculture, Marc Fesneau, vient de rejoindre le lobby des industries agrochimiques, donc des pesticides ; Mme Eléonore Leprettre vient d’être nommée directrice de la communication et des affaires publiques de Phyteis, où elle devra défendre l’utilisation des engrais-poisons. Ce transfert est troublant et montre la duplicité d’un gouvernement qui multiplie les déclarations anti-pesticides tout en se rangeant derrière le principal syndicat agricole, favorable à la chimie qui tue. 

La prétendue icône de Mai 1968, Daniel Cohn-Bendit, mène campagne à Paris pour le ministre de l’Europe, Clément Beaune. Il n’est plus question de révolution, de front commun ouvriers-étudiants. L’ex-trublion défend aujourd’hui l’ultralibéralisme et vole au secours des multinationales. Avec le culot dont il ne s’est jamais départi.

Robert Ménard, le maire de Béziers, proche de Marine Le Pen, puis de Zemmour, puis des deux, lance des appels à voter pour les candidats de Macron aux législatives. Il se rêve en ministre, tout en déclarant ne pas être un converti au président de la République. Mais, pour ce fils de militant de l’OAS, plutôt Macron que Mélenchon !

Trahisons et mensonges se multiplient à droite et sont autant d’insultes à la démocratie. Ceux qui aspirent à un autre monde ont l’impression de vivre un misérable cauchemar.

Mais tout n’est pas perdu ; à les voir empêtrés dans leurs mensonges et leurs trahisons, on peut se dire que le cauchemar peut prendre fin en juin prochain avec une gauche réunie exaltant des jours meilleurs en cas de victoire.

Renaissance, la dernière trouvaille de Macron, n’est qu’une caricature de parti ; le président parle beaucoup, mais il n’a qu’un seul projet, la régression sociale au profit des riches. Le peuple peut enfin ouvrir les yeux et refuser, enfin, d’être abusé.

Voici venue l’heure de la gauche.

Rester sain d’esprit

Les nouvelles s’enchaînent et font douter de l’âme et de la sagesse humaine.

Les talibans, en Afghanistan, ont émis une fatwa sommant les présentatrices de la télévision de porter le voile intégral à l’antenne. Les fous de Dieu avaient promis que les femmes pourraient travailler et ne seraient pas obligées de porter la burqa. Il est certain que cette annonce résulte d’un affrontement entre les diverses tendances s’affrontent et que les plus fanatiques l’ont emporté. Ils avaient déjà enregistré un succès sur ceux qui promettaient un régime plus souple en interdisant l’école aux filles.

En Ukraine, plus près de nous, le ministère de la culture a invité les bibliothèques « à remplacer la littérature de propagande russe par des textes ukrainiens de qualité et des ouvrages publiés par des éditeurs ukrainiens. » Et Svitlana Moiseeva, vice-présidente de l’Association des bibliothécaires ukrainiens, a estimé que « en temps de guerre, notre pays ne peut éviter une certaine censure. »

Sergueï Loznitsa, le plus grand cinéaste ukrainien, a condamné avec vigueur la sale guerre de Poutine. Il a quitté l’European Film Academy, en considérant que la réaction face à l’invasion de son pays par l’armée russe était insuffisante. Cela n’a pas empêché l’Académie cinématographique ukrainienne de l’exclure en lui reprochant son « manque de loyauté » et son « cosmopolitisme » (sic).

Sergueï Loznitsa a reçu samedi dernier à Cannes le prix France Culture Cinéma Consécration, décerné à une personnalité du cinéma pour la qualité de son œuvre et la force de son engagement. Dans son discours, le cinéaste est revenu sur le débat qui fait rage en Ukraine et en Europe :

« Pour nous tous, la culture est l’œuvre de toute notre vie, et aujourd’hui nous nous retrouvons sur la ligne de front. D’un côté se trouvent ceux qui exigent qu’on interdise le cinéma russe et même qu’on abolisse toute la culture russe. De l’autre, ceux qui sont contre un boycott total de la culture. Tout de suite après le début de l’agression russe en Ukraine, je me suis exprimé contre toute interdiction totale du cinéma russe et contre le boycott de la culture russe. Certains de mes compatriotes ont réagi à cette prise de position en exigeant cette fois de boycotter également mes films – entre autres, mes films sur la guerre d’aujourd’hui et sur les guerres passées – Donbass, Maïdan, Babi Yar. Il est particulièrement saisissant que les mêmes films – Donbass et Maïdan – aient déjà été interdits quelques années plus tôt. Cela s’était produit dans la Russie totalitaire, sur ordre du FSB. Aujourd’hui les « activistes » ukrainiens exigent la déprogrammation de mes films dans l’Union européenne démocratique. Il faut donc constater à grand regret que, sur certains points, le programme d’action de ces « activistes » ukrainiens rejoint le programme que se donne le FSB russe. »

Venu présenter son dernier film, L’Histoire naturelle de la destruction, à Cannes, Loznitsa a eu quelques phrases accusatrices : « Le film pose la question : est-il possible d’utiliser la population civile et l’espace de la vie humaine comme ressources de guerre ? Apparemment, ce problème ne préoccupe pas tellement les dirigeants des organisations qui soutiennent le cinéma ukrainien. La seule chose qui les préoccupe, c’est qu’un citoyen ukrainien ait osé exprimer une opinion contraire à celle de la majorité. Ils mènent une guerre sur un front différent, le leur, pas celui où se joue le destin de l’Europe, de la civilisation contemporaine et peut-être même de toute l’humanité, mais sur celui où la construction d’une nation est remplacée par une guerre des cultures, où la connaissance de sa propre histoire est remplacée par la fabrication de mythes, où la libre parole et la liberté d’expression sont déclarées propagande ennemie. »

Sergueï Loznitsa a explicité de façon remarquable les raisons de son refus du boycott, se justifiant en prononçant une brillante définition de la culture : « Boycotter la culture russophone, qui est une richesse de l’Ukraine, est une demande archaïque et destructrice par nature. Qui plus est, elle contrevient aux principes européens du pluralisme culturel et de la liberté d’expression. Au lieu de mettre la langue russe, langue maternelle de trente pour cent des citoyens du pays, au service de l’Ukraine, en l’utilisant pour dire la vérité sur la guerre, les « activistes culturels » ukrainiens défaillent face à une tâche insensée et sisyphéenne – détruire ce qui est indestructible. Cela donne l’impression que ces personnes entendent par le mot « culture » un simple agrégat d’œuvres distinctes – des films, des romans, des spectacles, des tableaux, etc. Mais la culture, ce n’est pas cela. La culture est une activité humaine dans ses expressions les plus variées, ce sont les rituels et les usages de notre vie, les formes et les moyens de la connaissance de soi et de l’expression des êtres humains, c’est notre mémoire et les usages que nous en avons pour la préserver et la reproduire. Et, in fine, la culture, c’est sortir de la jachère pour nourrir le développement. Je pense que vous tous, collaborateurs de France Culture, mécènes et amis de cette merveilleuse institution, savez fort bien tout cela. Comment peut-on faire la guerre à tout cela ? Comment peut-on confondre les infamies commises par le régime russe actuel (en fait, depuis cent ans, tous les régimes en Russie furent infâmes) avec les œuvres des auteurs russes, souvent des parias, et presque toujours de tragiques prophètes dans leur propre pays frappé par le malheur, et qui sont devenus une part de la culture mondiale, et donc du patrimoine de l’humanité tout entière ? Comment peut-on exiger, en réponse à la barbarie perpétrée par le régime de Poutine par les mains des vandales russes en Ukraine, de détruire ou de rejeter ce qui s’est toujours dressé contre la barbarie ? Cela n’a ni logique ni sens. »

Aujourd’hui, l’urgence est d’appeler à résister, partout, à la barbarie qui n’a jamais été aussi envahissante et prend des formes diverses selon les circonstances dans les pays où elle s’exprime de plus en plus fort. Sergueï Loznitsa a su conclure son discours par des phrases d’une intelligence qui doivent résonner aussi du côté de Kiev : « On me demande souvent : que doit faire un artiste en temps de guerre ? Ma réponse est simple : rester sain d’esprit et défendre la culture. »

Pouvoir de nuisance

Etant allergique aux chaînes de radio et de télévision privées, je recherche des informations sur les chaînes de service public. Les journaux et les magazines d’information y sont souvent mieux équilibrés et plus porteurs de la diversité. Pas toujours, hélas : le libéralisme reste la boussole du plus grand nombre de journalistes.

Vendredi, j’ai subi un véritable choc en entendant sur France 3, au cours du journal de 12h30, une jeune journaliste, Caroline Motte, se lancer dans une caricature de deux députés ‘’Insoumis’’, Alexis Corbière et François Rufin, puis affirmer : « Imaginez le pouvoir de nuisance que pourrait avoir la gauche si elle obtenait plus d’une centaine de sièges. »

La présentatrice du journal, Emilie Tran Nguyen n’a pas relevé ce qui n’était plus un commentaire équilibré, mais une prise de position politique. Est-elle complice ?

Pour la jeune journaliste Caroline Motte, diplômée de l’Institut de journalisme de l’université de Bordeaux, il ne s’agit pas d’un léger dérapage, mais bien d’un commentaire politique partisan. Et ce n’est pas à l’université qu’elle a appris à privilégier les positions personnelles au détriment de l’information complète, vérifiée et équilibrée.

Alors, pourquoi ?

Caroline Motte a ‘’galéré’’, comme beaucoup de jeunes avant d’atterrir au service politique de France 3, enchaînant les stages, les piges, notamment à BFM TV. Est-ce son parcours qui lui dicte aujourd’hui ses commentaires engagés ? Est-ce la volonté de plaire à une hiérarchie pour ‘’monter’’ et gagner sa place dans le cercle des ‘’élus’’ et ‘’éditocrates’’ de la chaîne ? Est-ce par conviction ?

Elle seule peut répondre. Mais, en revanche, si mon opinion est faite sur la personne (elle ne mérite que mépris), je m’interroge sur le fonctionnement du service public de l’audiovisuel et sur le service politique de France Télévisions. Est-il truffé de suppôts de Macron ? Est-il aux ordres de l’Elysée ?

Retrouver le football

Le Qatar a introduit un nouvel ordre économique dans le football : depuis le rachat du club de Paris, le PSG, il a injecté des milliards dans l’achat de quelques-uns des joueurs les plus chers de la planète en une dizaine d’années ; la masse salariale de l’effectif professionnel explose chaque année et sera proche du milliard annuel. Le déficit du club est colossal, mais peu importe les caisses de l’émirat font des gros chèques à un nombre de zéros époustouflant.

Le football est sa vitrine de politique extérieure et l’argent coule à flot. Malgré tout, les résultats sont plutôt piteux !

A défaut d’avoir compris que le football est un sport collectif et que la réunion des meilleurs joueurs ne constitue pas nécessairement la meilleure équipe, il continue à faire des folies et à creuser l’écart de train de vie entre son club et les dix-neuf autres disputant le championnat de France.

Les chiffres circulant à propos de la prolongation du contrat du petit prodige Kylian Mbappé sont à peine croyables : un chèque de 300 millions d’euros pour la signature du nouveau contrat et un salaire net de plus de 62 millions d’euros par ans.

Les chiffres donnent la nausée quand on regarde de près ce qu’est réellement le Qatar : une monarchie patriarcale, où les mots démocratie, justice, liberté, égalité, solidarité sont bannis. Sur les 2,5 millions d’habitants, 10 % seulement sont qataris ; les immigrés représentent plus de 90 % de la population et 98 % des employés, mais ceux qui font de l’émirat un paradis (pour les seuls Qataris) sont, eux, sans droits et réduits à une situation de quasi esclavage.

On ne condamnera pas Kylian Mbappé de défendre ses intérêts, mais il ne peut pas ignorer que le torrent financier qui lui est versé provient de l’exploitation abusive des énergies fossiles et de l’esclavage, lui qui est un ardent défenseur des minorités. Et pas insensible à la détresse des pauvres.

Il y a des fonds au Qatar pour offrir des rémunérations à peine croyables à des joueurs de football, mais pas pour payer les pauvres ouvriers népalais, indiens, sri-lankais, libanais qui forment l’immense majorité de la population et qui n’ont qu’un droit, celui de mourir en silence sur les chantiers des futurs stades de la Coupe du monde (prévue en fin d’année) ou sur les champs gaziers.

L’OIT et l’ONU, d’une part, de nombreuses ONG, d’autre part, ont dénoncé la situation d’un pays où il n’y a aucune liberté pour ceux qui créent sa richesse.

La famille Al Thani qui règne sans partage sur le Qatar ne tient aucun compte de ces condamnations ; elle décide et n’a que mépris pour les supporteurs du PSG, issus des classes populaires, qui soutiennent  aveuglement et sans condition leur équipe, pour les journalistes, qui ont versé dans l’idolâtrie, et, enfin, pour les autres clubs de football de l’hexagone qui n’ont pas d’argent pour payer un maillot, un déplacement, entretenir la pelouse de leur stade, etc., et sont contraints de faire appel à des bénévoles pour continuer à assouvir la passion des mômes des quartiers, c’est-à-dire les centaines de Kylian Mbappé qui ne connaîtront jamais ni la gloire, ni les milliards des Qataris.

Il est venu le temps du changement pour ramener le football vers ses racines, celle d’un sport, donc d’un loisir, et d’un sport populaire. Mais pour cela, il faut renverser le nouvel ordre économique du football-business.

Rien ne change, mais tout peut changer

J’ai cherché. En vain. Cherché une quelconque inflexion de la politique d’Emmanuel Macron après la publication de la composition du gouvernement d’Elisabeth Borne.

Parmi les vingt-huit ministres, quinze sont toujours présents et, outre Elisabeth Borne, les plus libéraux à l’image de Bruno Le Maire, Gérald Darmanin, Eric Dupond-Moretti, Amélie de Montchalin, etc., occupent les principaux postes. Alors doit-on rechercher l’inflexion parmi les treize nouveaux ? Catherine Colonna, aux affaires étrangères, était une chiraquienne ; Damien Abad, aux solidarités, était le président du groupe Les Républicains à l’Assemblée nationale ; Amélie Oudéa-Castéra, aux sports et aux Jeux olympiques, est l’épouse du patron de la Société générale et pas réputée pour son progressisme ; Sylvie Retailleau, à la recherche, a une réputation sulfureuse pour défendre avec obstination le financement des universités et des organismes de recherche par les entreprises. Etc.

Reste Pap Ndiaye, nommé à l’éducation nationale et à la jeunesse et présenté comme ‘’le symbole’’ de la méritocratie. Il est, certes, un universitaire reconnu mais on ne gouverne pas avec des symboles, mais avec un budget et l’objectif de réduire les inégalités, c’est-à-dire l’inverse de la politique économique défendue par Macron, Le Maire, Darmanin et les autres. Comblera-t-il les manques criants d’enseignants dans tous les établissements ? Revalorisera-t-il les salaires de tous les personnels pour stopper l’hémorragie ? Remettra-t-il en cause les lois Blanquer ? On en doute.

Pap Ndiaye est un symbole et le restera.

Dans ce gouvernement, on a également relevé l’absence de ministre des transports et du logement (simple oubli), l’incompétence en matière d’environnement et d’écologie des deux ministres qui épauleront Elisabeth Borne dans ce qui doit être la priorité du quinquennat, Amélie de Montchalin et Agnès Pannier-Runacher, deux technocrates sans envergure.

Brigitte Bourguignon, à la santé, et Olivier Dussopt, au travail, sont deux anciens socialistes en peau de lapin qui ont rejoint Emmanuel Macron, comme Jean-Luc Le Drian, Christophe Castaner ou Manuel Valls. Ils ont hérité de deux ministères qui auront à gérer la crise de l’hôpital et de la santé (en pleine crise) et la réforme des retraites (une obsession inquiétante du président de la République). Ils vont se heurter à une très forte opposition et, notamment, à celle de leurs anciens camarades restés fidèles au vrai socialisme.

Enfin, il est difficile de passer sous silence la nomination de Rima Abdul Malak à la culture. Il ne lui sera pas difficile de faire mieux que la transparente Roselyne Bachelot. Mais quelle sera la marge de manœuvre d’un ex-conseillère de Macon à l’Elysée où les décisions sont prises par un seul homme. Le choix de la franco-libanaise en dit long sur l’emprise d’un président au pouvoir vertical et jupitérien.

J’ai cherché. En vain. Mais, en revanche, j’ai trouvé dans ce nouveau gouvernement des raisons supplémentaires de voter et de faire voter pour un vrai changement, celui porté par la Nouvelle union populaire et ses candidats issus de tous les vrais partis de gauche.

L’aveu

Je me refuse à regarder les chaînes de Vincent Bolloré ; question d’hygiène mentale et d’engagement citoyen pour une information honnête.

En revanche, j’avais regardé avec curiosité et avidité l’audition du milliardaire d’obédience catho-réactionnaire devant la commission d’enquête du Sénat ; il s’était payé la tête des sénateurs présents en osant jurer que son intérêt dans les médias « n’est ni politique, ni idéologique, il est uniquement économique ».

Je suppose que, aussitôt sorti de son audition, le Breton bien-pensant s’était rendu auprès de son confesseur, l’abbé traditionnaliste Gabriel Grimaud, pour avouer avoir menti et se confesser. Confession aussitôt accordée, on suppose, tant ce curé agité de la calotte est l’obligé de Bolloré.

Télérama, à qui rien n’échappe, a écouté l’émission ‘’L’heure des pros’’ animée par un autre agité du bocal, Pascal Praud. Ce dernier est soit un imbécile, soit un être tellement assuré de l’impunité de son patron (ou les deux) pour avoir fait en direct un aveu et quel aveu ! Richard Sénéjoux, journaliste, a entendu, ébahi, le valet de Bolloré déclarer : 

« Éric Zemmour avait mis au cœur de la société française, de sa campagne électorale, ces sujets-là. On les a développés sur cette antenne. […] On avait envie parfois de défendre cette identité française, ses mœurs, ses coutumes, ses habitudes… »

Le sénateur à l’origine de la commission d’enquête sénatoriale, David Assouline, a aussitôt réagi en rappelant que Vincent Bolloré a prêté serment et que le code pénal prévoit en cas de faux témoignage des peines pouvant aller jusqu’à cinq ans de prison et 75 000 euros d’amende.

CNews à l’origine de la campagne d’Eric Zemmour, ce n’est pas un scoop ; qu’un de ses animateurs avoue, en revanche, qu’elle est bien une chaîne idéologique ; ça va mieux en le disant.

Je n’ose pas croire que la justice passera ; je n’ose pas croire que l’ARCOM sévira. Macron n’a aucun intérêt à se fâcher avec Vincent Bolloré qui, avec la puissance de frappe de l’empire médiatique qu’il a créé, tient toute la bien-pensance libérale dans sa main (ou plutôt dans ses micros et ses caméras).

L’art du discours de Vincent Lindon

Vincent Lindon, président du jury du Festival de Cannes, a prononcé un discours d’ouverture auquel les festivaliers ne sont pas habitués. Il s’est interrogé sur le rôle de l’artiste dans la cité, sur le rôle du cinéma dans l’éveil des consciences. Il a enfin donné une très belle définition de la culture.

On a retrouvé à Cannes l’acteur engagé qui avait publié en mai 2020 une tribune dénonçant la situation du système de santé en répondant à la question : ‘’Comment avons-nous pu en arriver là ? ‘’

Son discours de Cannes, brillant, a ému ; à juste titre. Vincent Lindon parle avec beaucoup de retenue, mais ses mots sont forts parce qu’ils sont sincères et justes.

Le voici in extenso :

« J’ai essayé d’écrire un texte, c’est le seul moyen que j’ai trouvé pour arriver à parler.

Seul, réduit à moi-même sous les feux de la rampe, condamné à la liberté, je suis profondément ému, fier et bouleversé, de conduire ce jury exceptionnel, empreint d’une gratitude profonde, d’avoir été choisi par Pierre Lescure et Thierry Frémaux, parmi tant d’autres, non moins méritants, mais plus habitués à vivre dans la solitude du travail.

Il serait sans doute logique, ou en tout cas humain, de laisser éclater ma joie d’être devant vous ce soir, pour présider la 75ème édition d’un festival hors-normes, le plus grand festival de cinéma du monde, de célébrer l’événement et de jouir sans entraves de l’honneur qui m’est fait. Mais en ai-je le droit ?

Ne devrait-on pas évoquer, depuis cette tribune, qui concentre, pour un temps, tous les regards du monde, les tourments d’une planète qui saigne, qui souffre, qui étouffe et qui brûle dans l’indifférence des pouvoirs ? Oui, sans doute. Mais que dire, sinon, de neuf, ou au moins d’utile ? 

C’est une question à laquelle tous les artistes ont été, sont, et seront confrontés. Doit-on user de sa notoriété, aussi modeste soit-elle, pour porter haut et fort la parole des sans-voix, ou, au contraire, refuser d’exprimer publiquement une position dans des domaines où nous n’avons ni légitimité, ni compétence particulière ?

Je n’ai pas la réponse !

Pour tenter de me mettre en règle avec un sort trop généreux, mal à l’aise dans le confort et les privilèges, même si bien trop humain pour y renoncer, j’ai souvent pris le risque de parler haut, parfois naïvement, pour dénoncer des douleurs ressenties par d’autres, mais qui, si elles épargnaient mes chairs, torturaient ma conscience.

Les seuls engagements incontestables d’un artiste, d’une ou d’un cinéaste notamment, sont sans nul doute, les œuvres auxquelles ils prêtent leur concours.

Simple acteur, je traverse des personnages qui portent d’autres noms que le mien, exercent d’autres métiers, des puissants parfois, des vaincus plus souvent, car ce sont eux qui m’émeuvent et m’inspirent pour essayer de toucher au cœur. C’est notre métier. Qu’il m’ait valu plus d’honneurs que je n’en mérite, j’en ai pleine conscience. Mais je sais, que, comme tous ceux qui ont eu l’extraordinaire bonheur de pouvoir vivre de leur art, dans une existence libre, nous sommes une composante infime d’un grand tout, essentiel, qui s’appelle la culture. Car la culture n’est pas une aimable excroissance, ni un futile ornement de la société, elle n’est pas en marge, elle en est le centre. Elle en sera le vestige. 

Que resterait-il du règne de Joseph II sans Mozart, de Louis XlV sans Molière, Racine ou Corneille, de la papauté de Jules II sans Michel-Ange ?

Leur place dans l’Histoire, les nations et leurs dirigeants, la doivent d’abord aux liens qu’ils ont su tisser avec des créateurs dont les œuvres subliment le génie humain.

Le Festival International du Film de Cannes prolonge cette tradition séculaire. Né d’une volonté de lutte, contre un fascisme, qui avait dénaturé le cinéma européen, il n’a cessé d’accueillir, de protéger et de réunir les plus grands cinéastes de leur temps.

Ouvert sur toutes les cultures, n’exigeant rien d’autre que l’exigence, ses sélections ont retenu des films dont l’ambition ne se limitait pas seulement à remplir les salles.

C’est la fonction du Festival de Cannes. C’est sa gloire. C’est cette ligne inflexible, artistique et citoyenne, qui rend nécessaire, ce qui, sans cela, serait obscène : projeter des images radieuses en surimpression de celles abominables, qui nous parviennent d’une Ukraine héroïque et martyrisée, ou bien encore, ensevelir sous la mélodie du bonheur, les massacres silencieux qui s’abattent sur le Yémen, ou le Darfour.

Et, enfin, pour conclure, une question :

Pouvons-nous faire autre chose qu’utiliser le cinéma, cette arme d’émotion massive, pour réveiller les consciences et bousculer les indifférences ?

Je ne l’imagine pas !

Que la puissance évocatrice et la profondeur des œuvres des grands cinéastes, n’influent pas sur la marche du monde.

Je ne l’imagine pas non plus !

Même si cela revient à écoper, avec un dé à coudre, la coque d’un navire qui se remplit par vagues, notre force c’est que nous y croyons, et que vos œuvres sont immortelles.

Même si parfois, quand l’actualité nous écrase et que le découragement me gagne, je me demande, si nous ne sommes pas en train de danser sur le Titanic…

Peut-être alors, si nous prêtions l’oreille, entendrions-nous, au milieu du vacarme des empires et des nations, comme un tendre et faible bruissement d’ailes, le doux murmure de la vie et de l’espoir.

Voici venu le temps des artistes, des cinéastes responsables, pour nous porter, pour nourrir notre imaginaire, et nous aider, à nous répéter en nous même, chaque fois que nous le pourrons, en hommage à tous ceux qui souffrent et qui se battent dans le monde :  être vivant et le savoir. »

Merci, Vincent Lindon pour ce très beau texte d’un artiste formidable et d’un citoyen soucieux de la marche du monde. Votre discours présidentiel, on souhaiterait qu’il inspire un autre président, celui de la République.

Sans-gêne

Le gouvernement de Jean Castex n’a pas encore été annoncé que les ministres pensent déjà à leur avenir et quittent le navire.

A l’image de Jean-Baptiste Djebbari qui vient de se recaser dans une jeune entreprise spécialisée dans les voitures à hydrogène, Hopium que le quotidien économique compare déjà à la Tesla française.

Sans doute savait-il avant d’autres qu’il ne serait pas reconduit dans le nouveau gouvernement.

Son nouveau patron au sein d’Hopium, Olivier Lombard, l’a nommé au conseil d’administration avant de lui confier un poste exécutif en juin prochain. Celui-ci justifie l’embauche du ministre délégué chargé des transports par le réseau que Djebbari a tissé dans les instances de l’Union européenne, Hopium ayant des ambitions internationales.

Brillant exemple des connivences entre ultralibéraux et milieux de l’entreprise et de la finance qui ne choquent même plus. Connivences et lobbying gangrènent Bruxelles et les ministres de Macron s’y adonnent goulument.

Questions

Comment un jeune Américain de 18 ans peut-il se transformer en tueur et se rendre dans un supermarché à Buffalo, dans l’Etat de New York, pour commettre un véritable carnage raciste (13 victimes, onze personnes noires et deux blanches, 10 morts et 3 blessés) ?

Comment un réseau social, Twitch, peut-il diffuser le carnage en direct, le tueur ayant pris soin de fixer une caméra sur son casque, et, ensuite, proclamer une tolérance zéro contre toute forme de violence ?

Comment laisser publier un manifeste raciste de 180 pages dénonçant la honteuse théorie du ‘’grand remplacement’’ sur le même réseau social ?

Comment laisser la vente des armes en vente libre dans un pays où en 2021 on a dénombré 45 000 morts violentes ?

Comment la plus haute autorité d’un pays comme les Etats-Unis, la Cour suprême, composée de membres non élus, peut-elle décréter le droit à l’avortement hors-la-loi ?

Comment tout cela peut-il advenir dans une démocratie comme les Etats-Unis sinon par une vision raciste, sexiste et xénophobe de la société qui continue à gagner du terrain dans des esprits réactionnaires, hélas nombreux ?

Les Etats-Unis ne sont pas peuplés que de réactionnaires, vieux et jeunes, de racistes, de tueurs surarmés et d’ignorants proches de l’analphabétisme ; les Etats-Unis ont aussi des chercheurs, des scientifiques et des gens de culture parmi les plus admirables, bref une intelligentsia éclairée mais aussi des pauvres de plus en plus nombreux.

En me posant ces questions, une très belle formule de Jack Ralite rejaillit : « L’esprit des affaires l’a emporté sur les affaires de l’esprit. »Quel rapport avec la situation ? Les Etats-Unis ne sont-ils pas le phare de l’ultralibéralisme où le fric à tout gangréné et où les lobbies des armes, du racisme et de l’obscurantisme font la loi 

Que fait la police ?

Le tribunal de Nancy vient de prononcer de lourdes condamnations à l’encontre de sept policiers de la brigade anticriminalité (BAC) pour harcèlement et injures racistes à l’encontre de collègues, une femme et trois hommes, traités de bougnoule ou de bicot.

Les faits sont graves, mais faut-il s’en étonner ? Il est avéré que l’extrême droite a réussi à pénétrer les milieux policiers et à polluer de nombreux esprits. On ne répète pas à longueur de discours que les immigrés (et par extension tous les citoyens à la couleur de peau mate ou noire) sont des délinquants sans provoquer les dérapages de ceux qui sont investis de larges pouvoirs et soutenus (voire encouragés) par le pouvoir politique, ministres et préfets.

La répression policière a connu des épisodes sanglants, comme le 17 octobre 1961, quand des Algériens manifestant pour la levée du couvre-feu qui leur était imposé ont été jetés dans la Seine. Il y eut aussi la tuerie du métro Charonne, la mort de Malik Oussekine (tué par des ‘’voltigeurs’’, imaginés dans les cerveaux pervers de Pasqua et Pandraud) ; la liste est longue, ponctuée de drames insupportables.

Depuis quelques années, les scandales sont permanents, même s’ils ne provoquent plus autant de morts. On ne parle plus de scandales, mais de bavures, aussitôt ramenées à de simples incidents par un ministre, Darmanin, qui n’a rien à envier à ses prédécesseurs. Les bavures, donc, se multiplient et s’étendent à la répression au cours de manifestations pacifiques des organisations syndicales. La machine à discréditer fonctionne à merveille !

On est toujours très étonné de voir des représentants de syndicats de policiers accueillis à bras ouverts par les journalistes des chaînes de télévision, recueillant une version tendancieuse des faits et avançant toutes les ‘’bonnes’’ raisons pour tenter de justifier les agissements de leurs collègues. Ils volent la vedette au ministre. Quelques syndicats de policiers font de la surenchère électoraliste et corporatiste et prêchent la légitime défense. Ils sont l’objet de toute l’attention du pouvoir et des partis qui attisent les peurs et font en permanence l’apologie de la ‘’fermeté’’ pour éradiquer la délinquance réelle ou supposée.  

A Saint-Denis, récemment, c’est une fillette de 8 ans qui a été blessée à la suite d’une intervention ‘’musclée’’ et disproportionnée de la police municipale pour interdire le rassemblement de quelques Sénégalais célébrant la victoire de leur équipe nationale de football en Coupe d’Afriques des nations. Faire la fête est considéré comme un délit quand on n’est pas vraiment blanc.

Bref, il y a un malaise et il serait temps de revoir les schémas d’intervention policière. Mais dans un système ultralibéral, il n’y a plus de place pour la contestation et même pour les rassemblements festifs comme à Saint-Denis. On ne peut plus s’accommoder des bavures sous peine de glisser ostensiblement dans un régime policier autoritaire.

Tous les policiers ne sont pas racistes ; tous ne partagent pas le niveau insupportable de répression. Mais, les racistes et les extrémistes favorables aux interventions musclées n’ont rien à faire dans les commissariats.

La police doit être et rester républicaine, une force de maintien de l’ordre et non un outil de répression musclée. Mais pour que cela advienne, il faut changer la politique ultralibérale.

La paix sur terre

Les événements tragiques d’Ukraine mettent au jour les sales guerres ; des civils sont assassinés, d’autres sont victimes de bombardements, quelle différence ? Les guerres ne sont jamais propres. On ne doit pas trier les victimes.

Il a fallu que les hostilités déclenchées par Vladimir Poutine se déroulent en Europe et jettent des millions de gens sur les routes de l’exil pour que le continent découvre que les dirigeants politiques n’hésitent plus à sortir des armes de plus en plus létales pour des motifs divers (et peu crédibles), mais, surtout, pour se maintenir au pouvoir et occulter les crises économiques dans lesquelles les ‘’démocraties ultralibérales’’ sont plongées.

Syrie, Irak, Kurdistan, Afghanistan, Yémen sont d’autres théâtres de ces sales guerres. Et en Palestine, le gouvernement réactionnaire d’Israël se refuse à parler de guerre. Cela ne l’empêche pas de tuer, y compris des journalistes, d’opérer des arrestations, y compris d’enfants.

La mort de Shireen Abu Akleh, journaliste américano-palestinienne de la chaîne panarabe (qatarie) Al-Jazira, a réveillé les consciences à propos de la sale guerre d’Israël.

Les conditions de vie infligées au peuple palestinien sont atroces et ne déclenchent aucune réaction de la part des gouvernements européens, sinon dans quelques déclarations vite oubliées et reniées.

Salah Hamouri, avocat franco-palestinien, est en détention administrative et ne peut voir ni son épouse, ni son enfant ; on considère qu’environ 310 citoyens palestiniens sont dans la même situation, sans procès, sur près de 5 000 prisonniers, dont 400 enfants.

Il est temps que les peuples se lèvent pour déclarer la paix sur terre, unilatéralement, comme l’a chanté Jean Ferrat. L’auteur-interprète exaltait les peuples frères à mettre fin à la course au néant. C’était il y a vingt ans. Et sa chanson est, hélas, toujours d’actualité.

La culture qui dérange

La culture a été dramatiquement absente de la campagne présidentielle et la ministre en charge du dossier est étrangement muette depuis sa nomination.

Cela ne signifie cependant pas un désintérêt de la part des dirigeants politiques du pays et, surtout, des capitalistes. Seulement, les grandes manœuvres se déroulent, selon une expression très à la mode, à ‘’bas bruit’’. Quand les affaires se traitent sans publicité tonitruante, c’est qu’il n’y a rien de bon à en attendre. Il faut aller rechercher l’information avec opiniâtreté pour en comprendre les finalités.

On vient donc d’apprendre que Stéphane Courbit (le producteur de Loft Story) va introduire la société de production Banijay et le groupe de paris en ligne Betclic en bourse. La nouvelle société a été rebaptisée FL Entertainment et sera cotée à la bourse d’Amsterdam pour des raisons d’optimisation fiscale. On apprend également que les actionnaires aux côtés de Courbit (qui détiendra 46 % du capital) seront Vincent Bolloré (qui va en prendre 19 %), Bernard Arnault (LVMH), Marc Ladreit de Lacharrière (Fimalac), Rodolphe Saadé (patron de CMA CGM et qui est candidat au rachat du quotidien marseillais La Provence), Exor (holding de la famille Agnelli) ou encore la Société des bains de mer de Monaco. Du beau monde !

Courbit a expliqué que le leader mondial de la production télévisée entend participer à la concentration d’un secteur jugé trop fragmenté. Les concentrations sont à venir très vite et les programmes de télévision produits par les futurs conglomérats ne répondront qu’à une ambition : faire du profit en fédérant les plus grandes audiences possibles. La culture considérée comme un pur produit de consommation !

Pendant le même temps, la Bibliothèque nationale de France est en grève à l’appel des syndicats CGT, FSU et Sud ; les personnels sont soutenus par l’association des lecteurs et usagers de la BnF (AluBnF) et les sénateurs communistes. Ils dénoncent une politique de destruction d’emplois sous couvert de redéploiement de postes et un recul sans précédent du service au public.

Une pétition des usagers a recueilli plus de 14 000 signatures. La situation est grave, cependant elle reste absente des grands médias.

Celui qui a commencé dans la vie en vendant des livres par correspondance et qui, au fil des ans, a vendu tout et n’importe quoi, qui diversifie son activité dans la télévision (et dans bien d’autres domaines), Jeff Bezos, donc, n’aime pas les syndicats.

Il avait dénoncé la création d’une section de l’Amazon Union Labor (ALU) dans son entrepôt de New York et comme il a la rancune tenace il vient de licencier deux des initiateurs. L’un, Mat Cusick, pour démission volontaire due à un abandon de poste, l’autre, Tristan Dutchin, pour des retards sur les objectifs de productivité (sic).

Bezos fait le ménage dans son entrepôt après avoir dépensé 4,3 millions de dollars pour payer en vain des consultants antisyndicaux : il a licencié 6 cadres supérieurs chargés de faire échouer le vote des salariés et considérés comme responsable de l’échec de la manœuvre patronale.

Bezos craint la contagion de la syndicalisation dans son groupe et il emploie les grands moyens. Lui aussi aime les consommateurs de culture, mais pas les citoyens, cultivés et syndiqués.

Vincent Bolloré partage les sentiments de Bezos et emploie les mêmes méthodes (à iTélé). Comme tous les capitalistes ! La marchandisation de la culture n’autorise aucune entrave : consommes et tais-toi !

Quand la démocratie est autant malmenée, cultivons-nous, émancipons-nous et syndiquons-nous.

Tout n’est pas perdu

Les pouvoirs financiers et économiques bénéficient de la complicité des gouvernements pour pratiquer ce qu’on appelle avec une pudeur malsaine l’évitement fiscal ou, d’une expression encore plus ignoble, l’optimisation fiscale.

Les gouvernements sont complices de véritables crimes, qui privent les peuples de ressources immenses pour résoudre les problèmes du quotidien. Qu’on pense à la pénurie des hôpitaux, à l’absence d’enseignants, aux services publics de proximité qui ferment les uns après les autres, à l’état déplorable des routes, etc., quand les sommes détournées sont si importantes !

Que des élus peu scrupuleux soient tentés, eux aussi, d’optimiser leurs revenus, quoi de plus courant. La France a découvert que de nombreux politiciens de premier plan avaient détourné de l’argent public, sans vergogne. Jusque-là, ils jouissaient d’une quasi immunité et des juges courageux ont osé les porter devant les tribunaux malgré des cris d’orfraies et des dénégations et inconvenantes. Eux qui mènent grand train et possèdent châteaux et manoirs loin du peuple, villas dans de véritables havres de paix, appartements de luxe ou hôtels particuliers dans les quartiers-ghettos pour riches nient tout avec un aplomb étonnant.

De Jérôme Cahuzac à François Fillon, en passant par Nicolas Sarkozy, Patrick Balkany, Thierry Solère ou Marine Le Pen, la liste est longue.

François Fillon, son épouse et son suppléant ont été lourdement condamnés par la cour d’appel à des peines de prison (ferme pour l’ancien premier ministre) et à de lourdes amendes et remboursement de fonds (au total près de 1,5 million d’euros pour le couple).

Les honnêtes gens observent ces comparutions avec beaucoup d’amertume, se sentant trahis par ceux qui n’hésitaient pas à donner des leçons de morale en toutes occasions et osaient se représenter devant les électeurs floués.

Aujourd’hui, les sentences frappant Balkany, Sarkozy ou Fillon sont accueillies avec soulagement : les citoyens peuvent se dire que tout n’est pas perdu dans nos démocraties chancelantes, les condamnations étant assorties d’interdiction de se représenter. Même s’il faut continuer à nettoyer les écuries !

8 mai !

8 mai 1945, le nazisme est vaincu ; la guerre n’est pas encore terminée, mais le Reich a capitulé.

En France, se lève l’espoir de Jours heureux ; les femmes vont obtenir, enfin, le droit de vote et un gouvernement réunissant et communistes fonde la Sécurité sociale. Le monde espère entrer dans une nouvelle ère, sans guerre avec la création de l’ONU.

Soixante-dix-sept ans plus tard, le bilan n’est guère encourageant ; beaucoup d’illusions se sont évanouies : les guerres font rage dans de nombreux pays, la pauvreté gagne du terrain et l’obscurantisme s’étend partout.

En Afghanistan, après avoir interdit aux femmes de prendre l’avion sans un parent masculin et fermé l’école aux jeunes filles, le ministère de la promotion de la vertu et de la prévention du vice (sic) publie un décret invitant les femmes « qui ne sont ni trop jeunes ni trop vieilles (à) voiler leur visage, à l’exception de leurs yeux, selon les recommandations de la charia, afin d’éviter toute provocation quand elles rencontrent un homme ». Les femmes afghanes sont même invitées à rester chez elles ! 

Aux Etats-Unis, la Cour suprême composée majoritairement de suppôts de Donald Trump, a préparé un projet d’arrêt pour interdire l’interruption volontaire de grossesse (IVG). En Europe, la Pologne avait montré la voie en 2020, l’avortement n’y est plus autorisé que dans deux circonstances, viol ou risque pour la vie ou la santé de la femme enceinte.

La France, elle aussi, voit l’obscurantisme se répandre et infester de nombreux esprits. L’exclusion de l’autre par l’extrême droite de Zemmour, Le Pen et même Pécresse ; la remise en cause de l’avortement ou du mariage pour tous et le mépris pour les pauvres s’expriment sans réserve dans des programmes politiques et des médias qui gangrènent toute la société.

Le modèle de la politique économique, l’ultralibéralisme avec ses règles dites naturelles, s’est installé partout et engendre parfois des monstres, mais toujours des régimes autoritaires. Emmanuel Macron a pu écrire un livre-programme intitulé Révolution, mais son propos relevait d’une révolution conservatrice, inspirée du modèle américain, vantant l’individualisme (aux antipodes de la société dessinée par le Conseil national de la Résistance, le CNR) et la compétition outrancière entre individus.

8 mai 2022, le conservatisme et l’ultralibéralisme n’ont pas encore rendu les armes, Emmanuel Macron a été réélu. Commémorer le 8 mai 1945, certes, mais sans mesurer le chemin restant à parcourir pour fêter les Jours heureux, c’est-à-dire un monde plus humain, sans guerre, sans repli sur soi-même, un monde où la pauvreté aurait été éradiquée, relève du révisionnisme. De trop nombreux dirigeants de la planète tentent de dissimuler les méfaits d’une société inhumaine et inégalitaire.

Le fric contre la déontologie

Chaînes de télévision et plateformes numériques sont gourmandes en contenus ; la bataille fait rage et la recherche de programmes (séries, dramatiques) originaux, et fédérateurs de grosses audiences (Audimat oblige) pour attirer les publicités est sans merci.

Télérama publie à ce sujet un très bon article, intitulé Investigations en séries, dont le chapeau en dit un peu plus : « De plus en plus de séries s’inspirent d’enquêtes journalistiques. Et des accords se nouent entre productions et médias ».

C’est un bel hommage de l’audiovisuel à la presse écrite, mais qui interroge.

Emilie Gavoille, autrice de l’article révèle :

« Pour s’assurer d’être aux premières loges dès que l’actualité accouche de bonnes idées, Studio-Fact, fondée en 2021, a noué un partenariat exclusif – qui implique une clause de priorité et de la coproduction – avec Le Parisien. « C’est une source importante pour nous, explique Basile Lemaire, directeur du développement stratégique du groupe (et ancien journaliste de Télérama). Des conférences de rédaction communes ont lieu toutes les deux semaines, qui nous permettent de savoir sur quoi travaillent les services. »

L’autrice ajoute :

« L’exemple n’est pas unique. Des discussions ont lieu entre le groupe Le Monde (dont fait partie Télérama) et Netflix, alors qu’un des plus gros acteurs du secteur audiovisuel, Federation Entertainment, a d’ores et déjà conclu un accord avec So Press, groupe de presse habitué des grands récits. »

Cette tendance pose de nombreuses questions déontologiques, que n’écarte pas l’autrice qui conclut ainsi son article : « A quel point ce mariage avec l’industrie du divertissement influe-t-il sur le choix et le traitement des enquêtes menées dans les médias ? »

Mais, de cela, les propriétaires des grands médias n’en ont cure. ; à l’image de Vincent Bolloré, ils n’ont que mépris pour les journalistes et pour les contenus qui émancipent. L’appât du gain a depuis longtemps écarté les questions déontologiques. Même au Monde désormais ? On n’ose y croire. Tout rapprochement avec Netflix devrait être banni de la stratégie des médias.

Vive Amazon !

L’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) vient de s’illustrer de brillante façon.

Elle est présumée être une autorité administrative indépendante, mais ses sept dirigeants sont nommés par les politiques, le président par le président de la République et les six autres membres par les présidents de la République, de l’Assemblée nationale et du Sénat. La présidente actuelle, Laure du Tillet, épouse d’Hubert Penin de La Raudière, a été députée d’Eure-et-Loir sous l’étiquette UMP ; elle a un long passé de droite, soutenant Bruno Le Maire, puis François Fillon, avant de rejoindre le parti dissident Agir, la droite constructive. Après sa nomination à la présidence de l’ARCEP par Emmanuel Macron, elle a conservé des mandats électifs, notamment de conseillère départementale d’Eure-et-Loir, elle s’était illustrée en 2012 en s’opposant au projet de loi sur le mariage homosexuel.

La dame de La Raudière n’est pas à classer parmi les progressistes.

Il se trouve que l’ARCEP s’est emparé du dossier des frais de port du livre ; un dossier chaud qui intéresse au premier chef la multinationale Amazon. Une consultation publique a été lancée, mais « l’Autorité attire l’attention sur le fait que les éléments présentés dans cette consultation publique ne préjugent en aucun cas de la décision finale qu’elle prendra ».

La note de l’ARCEP a fait part de ses recommandations ; elle propose que « les frais de livraison de livres neufs doivent être facturés dans le respect d’un montant minimal de tarification » et elle le fixe à 3 euros par colis. Mais, aussitôt, elle milite pour le maintien d’un seuil permettant la quasi-gratuité des frais de port, c’est-à-dire le maintien du modèle d’Amazon à 0,01 euro. L’argument est renversant : « Cette pratique revient à restituer une partie de la marge réalisée sur une vente à l’acheteur en annulant ses frais de port. Elle est favorable aux consommateurs et est de nature à les inciter à commander plus de livres pour pouvoir bénéficier de frais de port plus attractifs. »

Tout ça pour ça ! Il faut se frotter les yeux longuement pour se persuader qu’on ne rêve pas. N’est-ce pas encourager les lecteurs à acheter davantage de livres par l’intermédiaire d’Amazon ! 

Entretenir à grands frais une autorité comme l’ARCEP (la rémunération de Laure de La Raudière est de près de 200 000 euros par an, soit plus de 16 500 euros par mois, non compris quelques autres avantages) et faire une consultation publique, elle aussi onéreuse) pour en arriver à une telle conclusion ?

Quant à Amazon, ses dirigeants se frottent les mains. Les libraires, eux, continueront à maudire les plateformes numériques.

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