Des milliers de morts partout sur la planète, en Syrie, en Afghanistan, au Yémen et ailleurs, le racisme qui tue en Inde, en Chine, en Palestine, en Allemagne et ailleurs, des journalistes et des femmes assassinés au Mexique et ailleurs. Et les ‘’étranges lucarnes’’ détournent leurs caméras. Préférant montrer les ravages du coronavirus (et attiser la peur) et des tempêtes (et provoquer les émotions), Audimat oblige.
L’émotion est sélective à la télévision.
Les bourses pourtant s’affolent ; elles ‘’dévissent’’ selon le verbe à la mode, en raison de l’épidémie de coronavirus. Rien ne nous est épargné sur le ralentissement de l’économie mondiale. En revanche, les économistes n’ont pas un mot pour évaluer les effets des guerres et du racisme. Les guerres sont bonnes pour l’économie, les ventes d’armes en provenance de nos pays de l’Ouest et du Nord, des démocraties prétendent-ils, ne se sont jamais si bien portées.
Les affairistes, eux, continuent leurs activités. Dans l’automobile, dans le transport ferroviaire et ailleurs, partout où il y a de l’argent facile et rapide à gagner. Les concentrations ne faiblissent pas pour le malheur des salariés. Emmanuel Macron, lui, continue à casser notre socle social, à casser les services publics (l’audiovisuel n’y échappe pas).
Le président de la République discourt sur le séparatisme, à l’intérieur de l’Hexagone, mais il ne voit rien hors des frontières. Il prétend que les hôpitaux sont prêts à affronter une épidémie de coronavirus quand les hôpitaux sont déjà en crise.
Comme s’ils n’avaient pas d’autres préoccupations, une douzaine d’affairistes ont fait main basse sur Les Cahiers du Cinéma. Leur raid financier est dérisoire au regard de la situation de la planète, mais il est hautement significatif de la volonté de ces gens-là de contrôler toutes les activités de l’esprit pour mieux chloroformer celui (l’esprit) des citoyens et faire la promotion de leurs autres activités, dans les télécommunications et plus généralement dans la communication, incluant les médias et l’information. Comme aimait le répéter Jack Ralite, « l’esprit des affaires l’emporte sur les affaires de l’esprit ».
La rédaction des Cahiers du Cinéma a refusé de travailler avec les affairistes qui n’ont pas été longs à dévoiler leurs véritables desseins. Les 15 journalistes, toute la rédaction, quittent le magazine en invoquant la clause de cession. C’est courageux dans le contexte actuel, mais leur geste en dit plus que les discours sur l’état de l’information en France.
Lecteur des Cahiers du Cinéma depuis le premier numéro, je suis triste et orphelin. L’espace de liberté se restreint un peu plus. La finance annexe la culture et l’information pour continuer à inventer de prétendus ennemis (l’autre), faire l’apologie de l’individualisme (et le repli sur soi), attiser les antagonismes (et entretenir les foyers de guerre).
Le monde est malade. Et les Cahiers du Cinéma en est un symptôme.