Le capitalisme, qu’il se rebaptise système libéral (au terme d’une grossière opération de camouflage) ou pas, est à bout de souffle, il cherche à tromper les citoyens pour détruire tous les acquis sociaux. La pauvreté se répand à une allure au moins aussi vertigineuse que les dividendes des actionnaires. Le rejet de répand un peu partout sur le globe, même s’il s’exprime sous des formes différentes.

C’est pourquoi le capitalisme tente de dissimuler ses pires intentions ; il entretient une ‘’guerre sémantique’’ sournoise.

Il nous a été donné d’en observer un parfait exemple à l’Assemblée nationale dès l’examen de l’article 1 de la loi ordinaire sur la réforme du système de retraites qui définissait ainsi ses objectifs : « Un dispositif de minimum de retraite doit permettre d’assurer une retraite satisfaisante aux assurés ayant travaillé toute leur vie malgré de faibles revenus. » (Au passage on remarquera la redondance du verbe assurer, signe de la fébrilité et surtout de la précipitation de ses rédacteurs !)

Les députés communistes ont bataillé pendant de longues heures pour faire admettre aux députés de la République en marche que la rédaction de la phrase était réductrice et que la formule de « retraite satisfaisante » était un « concept gazeux ». Ils ont néanmoins réussi à faire introduire la notion de « niveau de vie digne », formule figurant dans la Déclaration universelle des Droits de l’Homme.

Aussitôt, les sbires de Macron ont parlé de pinaillage, accréditant le discours accusant l’opposition d’obstruction systématique.

Victoire infime, certes, au regard de la nocivité globale du projet de loi, certes, mais significative de la nécessité de batailler jusque dans les détails les plus infimes pour défendre les futurs retraités.

Autre exemple significatif, en juin 2018, le médecin, ex-socialiste recruté par Macron et sa République alors en marche, Olivier Véran, avait déposé un amendement lors de l’examen du projet de loi constitutionnelle par lequel il proposait de remplacer dans la Constitution l’expression « Sécurité sociale » par « protection sociale ». Puis, au détour d’un autre amendement, il proposait de remplacer l’expression « financement de la Sécurité sociale » par « financement de la Sécurité sociale et de la protection sociale ».

La CGT avait vivement réagi en écrivant dans un communiqué : « La Sécurité sociale n’est pas soumise à la concurrence, la protection sociale si ! » Les amendements ont été heureusement retirés.

Olivier Véran a de la suite dans les idées antisociale et ses propositions d’hier visant à favoriser les fonds de pension ont prospéré jusque dans le projet de réforme des retraites. Ce qui lui a valu, sans doute, sa brillante promotion au ministère de la santé en remplacement d’Agnès Buzyn.

Le patronat aussi sait alimenter la guerre sémantique et s’arc-bouter sur ses dogmes.

J’ai, par exemple, un souvenir personnel de négociations longues et filandreuses dans les réunions de la Commission paritaire nationale de l’emploi des journalistes en 2001. Il s’agissait de définir les critères de reconnaissance des formations initiales des écoles de journalisme.

Les programmes des écoles (quatrième critère) doivent permettre d’acquérir « une culture générale permettant la compréhension du monde contemporain et un esprit critique, une bonne maitrise écrite et orale de la langue française, une connaissance satisfaisante d’au moins une langue étrangère. »

J’ai bataillé de longues heures sur plusieurs séances de négociations pour faire introduire ce qui me semblait tellement évident, à savoir l’acquisition d’un « esprit critique » !

Près de 20 ans plus tard, la longue et opiniâtre opposition des représentants du patronat est tellement significative que j’en reste encore stupéfait.

Il ne s’agit que de quelques exemples ; il en est d’autres, dans toutes les professions et dans toutes les instances électives. Les batailles idéologiques sont permanentes. Usantes ? Certes, mais à mener sans faiblesse.