8 mai 1945, le nazisme est vaincu ; la guerre n’est pas encore terminée, mais le Reich a capitulé.

En France, se lève l’espoir de Jours heureux ; les femmes vont obtenir, enfin, le droit de vote et un gouvernement réunissant et communistes fonde la Sécurité sociale. Le monde espère entrer dans une nouvelle ère, sans guerre avec la création de l’ONU.

Soixante-dix-sept ans plus tard, le bilan n’est guère encourageant ; beaucoup d’illusions se sont évanouies : les guerres font rage dans de nombreux pays, la pauvreté gagne du terrain et l’obscurantisme s’étend partout.

En Afghanistan, après avoir interdit aux femmes de prendre l’avion sans un parent masculin et fermé l’école aux jeunes filles, le ministère de la promotion de la vertu et de la prévention du vice (sic) publie un décret invitant les femmes « qui ne sont ni trop jeunes ni trop vieilles (à) voiler leur visage, à l’exception de leurs yeux, selon les recommandations de la charia, afin d’éviter toute provocation quand elles rencontrent un homme ». Les femmes afghanes sont même invitées à rester chez elles ! 

Aux Etats-Unis, la Cour suprême composée majoritairement de suppôts de Donald Trump, a préparé un projet d’arrêt pour interdire l’interruption volontaire de grossesse (IVG). En Europe, la Pologne avait montré la voie en 2020, l’avortement n’y est plus autorisé que dans deux circonstances, viol ou risque pour la vie ou la santé de la femme enceinte.

La France, elle aussi, voit l’obscurantisme se répandre et infester de nombreux esprits. L’exclusion de l’autre par l’extrême droite de Zemmour, Le Pen et même Pécresse ; la remise en cause de l’avortement ou du mariage pour tous et le mépris pour les pauvres s’expriment sans réserve dans des programmes politiques et des médias qui gangrènent toute la société.

Le modèle de la politique économique, l’ultralibéralisme avec ses règles dites naturelles, s’est installé partout et engendre parfois des monstres, mais toujours des régimes autoritaires. Emmanuel Macron a pu écrire un livre-programme intitulé Révolution, mais son propos relevait d’une révolution conservatrice, inspirée du modèle américain, vantant l’individualisme (aux antipodes de la société dessinée par le Conseil national de la Résistance, le CNR) et la compétition outrancière entre individus.

8 mai 2022, le conservatisme et l’ultralibéralisme n’ont pas encore rendu les armes, Emmanuel Macron a été réélu. Commémorer le 8 mai 1945, certes, mais sans mesurer le chemin restant à parcourir pour fêter les Jours heureux, c’est-à-dire un monde plus humain, sans guerre, sans repli sur soi-même, un monde où la pauvreté aurait été éradiquée, relève du révisionnisme. De trop nombreux dirigeants de la planète tentent de dissimuler les méfaits d’une société inhumaine et inégalitaire.