Vincent Lindon, le merveilleux acteur de Welcome (Philippe Lioret et son maître nageur qui vient en aide à un migrant), de La loi du marché (Stéphane Brizé et son travailleur précaire) ou encore d’En guerre (Stéphane Brizé, encore, et son syndicaliste qui se sacrifie pour dénoncer les inégalités) est un citoyen sensible à l’état du monde. Il n’a pas attendu la crise provoquée par le coronavirus pour s’émouvoir de l’état de la France.

Le saltimbanque est engagé de longue date ; il a apporté sa générosité à l’association ‘’Un rien c’est tout’’. Il n’a jamais manqué une occasion pour dénoncer l’abandon de notre système de santé et des services publics comme l’éducation nationale, les privatisations, la pauvreté. De l’éditorial en contrepoint publié en décembre dernier par Les Echos (le journal patronal invite des personnalités une fois par an à remplacer sa rédaction), j’avais retenu qu’il était révolté et je me souviens d’une phrase en particulier : « Comment nos décideurs peuvent-ils dormir la nuit ? » Bernard Arnault avait dû en faire des cauchemars !

Vincent Lindon est encore là où on l’attendait : une vidéo d’une vingtaine de minutes mise en ligne par Médiapart puis sur Youtube condense toutes les colères du saltimbanque qui rêve comme beaucoup d’autres citoyens d’un monde meilleur.

Il faut mesurer tout le chemin parcouru par un homme né dans une famille aisée, qui a connu le succès (mérité) au cinéma, qui a été proche de François Bayrou ou de François Hollande, qui avait mis beaucoup d’espoir dans la jeunesse d’Emmanuel Macron. Et voilà Vincent Lindon, aujourd’hui, témoignant de la révolte qui gronde dans le pays. Il le fait admirablement dans un texte qui restera. Un cri de colère, mais argumenté, documenté, profond et écrit avec les mots justes. Il a réussi à exprimer ce que beaucoup de Français ressentent aujourd’hui devant le spectacle désolant d’un président et d’un gouvernement dépassés parce qu’aveuglés par leur idéologie néolibérale ; il a mis des mots sur leurs mensonges, leurs erreurs et leur brutalité.

Le beau texte de Vincent Lindon a, à l’heure où j’écris ces lignes, été écouté et vu par plus de 3 millions de personnes en moins de 48 heures. Les commentaires sont élogieux. Le saltimbanque humaniste n’a pas seulement dénoncé, il fait des propositions en trois points. Il redonne confiance en l’action collective ; il fait plus que tous les partis se prétendant d’opposition et tergiversent pour savoir qui sera leur candidat en 2022, à coups d’ego démesurés plutôt que de définir une politique qui rompe vraiment avec un monde trop cruel.

Il faut écouter Vincent Lindon, qui doit être étonné lui-même de la résonnance de son texte. Mais il doit être remercié car il y a urgence.

De l’autre côté, les libéraux ne lâchent rien. Le gouvernement ne lâche rien ; le président ne lâche rien et tente de surnager. Il a encore des supporteurs pour tenter de l’aider. Le jour de la mise en ligne du texte de Vincent Lindon, David Barroux dans son éditorial des Echos dénonçait « L’Etat Père-Noël » et il osait écrire : « Pour sauver l’industrie culturelle, l’Etat vole au secours des intermittents du spectacle. Ce coûteux geste peut se comprendre mais il ne faudrait pas entretenir le mythe d’un Etat pouvant sauver tout le monde. »

Le monde d’Emmanuel Macron, c’est toujours plus de pauvres ; celui de Vincent Lindon, c’est celui de moins d’inégalités et plus de partage, avec une contribution ‘’Jean Valjean’’, autrement dit un impôt sur la fortune.

Un beau programme pour un combat de tous contre quelques nantis.

Vincent Lindon est ce qu’on appelle une ‘’belle personne’’.