Le service public prend souvent des aises avec le droit du travail, usant et abusant des contrats précaires pour ses salariés, appliquant une politique de l‘emploi qu’il est censé interdire dans le privé. Les contractuels pullulent dans tous les ministères, dans l’enseignement, dans le monde culturel, etc.

Parce que l’émission Des chiffres et des lettres passera d’une diffusion quotidienne à une diffusion le week-end seulement, on vient d’apprendre que les deux arbitres ‘’historiques’’, Bertrand Renard (40 ans d’ancienneté) et Arielle Boulin-Prat (36 ans seulement !) ont été évincés sans ménagement.

On peut comprendre que la chaîne, France 3, veuillent modifier sa grille et ‘’rajeunir’’ son audience ; on peut aussi comprendre que des animateurs soient atteints par la limité d’âge ; on peut même admettre que l’émission qui est apparue sur les écrans le 19 septembre 1965, sous le titre Le mot le plus long, avant de devenir Des chiffres et des lettres le 4 janvier 1972, soit remplacée par un autre jeu plus ‘’moderne’’, mais la fidélité des animateurs de l’émission la plus ancienne de la télévision vaut mieux qu’une fin aussi conflictuelle.

Le conflit a d’ailleurs permis de savoir que les deux animateurs ont été en CDD pendant 40 et 36 ans. On peine à croire l’information ! Quand la direction du service public leur a proposé une diminution de salaire de 60 %, ces dangereux révolutionnaires ont eu l’outrecuidance de demander de modifier leur contrat et de bénéficier d’un CDI. Le refus a été net et la direction ose répondre à un journaliste de Télérama qu’ils n’ont pas « collaboré dans les conditions d’un CDI à temps plein » et que les modalités de leurs contrats ont été « reconduites d’année en année d’un accord commun ». Une reconduite en toute illégalité, sur laquelle les services juridiques ont fermé les yeux. 

Eléments de langage d’énarques indigents du cerveau !

Les arguments de la direction d’un service public, avec des éléments de langage d’énarques indigents du cerveau, ont été dénoncés par les deux intéressés en termes acerbes et amers. Non estampillés ENA.

Il semble que l’attitude de France Télévisions soit à géométrie variable, comme on dit. Car Michel Drucker (80 ans le 12 septembre prochain) sera, lui, toujours à l’antenne, malgré quelques infidélités avec les chaînes publiques dans les années 1990.

Le service public de l’audiovisuel use et abuse des contrats courts, très précaires. Même appliqués pendant 40 et 36 ans à des salariés qui travaillent quotidiennement. Cette politique est encouragée par un Emmanuel Macron, dont les aides à Uber pour s’installer en France ne font même pas scandale. Soulcié, dessinateur de Télérama, a fait dire au président dans la lettre du soir aux abonnés d’hier, une phrase tout à fait de circonstances à propos du plein emploi : « Attention, je n’ai jamais dit que ce ne seraient pas des emplois de merde ! »

Les prolos du début du 20e siècle se sont mobilisés et ont payé parfois cher leur lutte pour conquérir le code du travail. Alors, on recommence ? Et on renvoie Macron de l’Elysée ?