En quelques jours seulement, le Conseil constitutionnel s’est fourvoyé aux yeux des citoyens. Sa dernière décision, portant sur la demande d’organisation d’un référendum d’initiative partagée (RIP), est identique à la première saisine ; elle est surtout un modèle de volonté politique de ne pas entraver les réformes d’Emmanuel Macron.
La décision est résumée en une phrase, en tête du communiqué de presse annonçant le refus : « Le Conseil constitutionnel juge que ne porte pas sur une réforme relative à la politique sociale de la nation, au sens de l’article 11 de la Constitution, la proposition de loi visant à interdire un âge légal de départ à la retraite supérieur à 62 ans. »
Il fallait oser l’écrire, les ‘’Sages’’ l’ont fait. Le texte de la décision n’est qu’un mauvais habillage d’une décision pauvre en droit et un renversement.
Un professeur de droit et par ailleurs membre du Modem (donc, en principe, de la majorité présidentielle), Paul Cassia, avait envoyé une contribution au Conseil dans laquelle il dressait un réquisitoire contre sa précédente décision :
« Par votre décision n° 2023-849 DC relative au relèvement à 64 ans de cet âge, vous avez donné la plus grande marge de manœuvre possible à l’exécutif au détriment du Parlement, au prix de contorsions en tout genre comme lorsque vous avez admis contra legem, sans motivation au surplus, qu’une loi de financement rectificative de la sécurité sociale puisse avoir des effets pérennes, largement au-delà de la seule « année en cours » (…) Par votre décision n° 2023-4 RIP relative à la fixation à 62 ans au maximum de cet âge, vous avez donné au mot « réforme » de l’article 11 de la Constitution l’interprétation la plus restrictive et donc la plus défavorable possible à la mise en œuvre de l’expression de la souveraineté par voie référendaire, en jugeant pour la première fois qu’une ‘’réforme’’ existe seulement si la proposition de loi RIP emporte ‘’un changement de l’état du droit’’ ».
L’acte d’accusation du juriste est sans appel.
Paul Cassia parle donc d’un « changement de l’état du droit » constitutionnel ; lles mots employés sont graves. Surtout venant de la part d’un adhérent du Modem.
Emmanuel Macron, le président du pouvoir vertical, dicte désormais le droit au Conseil constitutionnel. Et c’est insupportable dans une démocratie.