La tragédie grecque a illustré la nature humaine de telle sorte que les auteurs peuvent y puiser l’inspiration pour aborder les questions actuelles, toujours actuelles.
La chorégraphe-danseuse Juliette Morel, elle, s’est inspirée d’Euripide et de son ‘’Iphigénie en Aulis’’ pour créer un spectacle hybride, alliant théâtre et danse, sous le titre ‘’Le Silence ou la culpabilité d’Agamemnon.’’
Chez Euripide, le vieux roi sacrifie sa fille, Iphigénie aux dieux pour permettre aux Grecs d’aller guerroyer à Troie. Chez Juliette Morel, Agamemnon (formidable Serge Biavan) est rongé de remords et tente de se disculper ; son monologue est d’une intelligence rare. Le fantôme de sa fille (non moins formidable Juliette Morel elle-même) vient se confronter à son père et le harceler ; sa chorégraphie est belle, moderne demandant un don de soi sans faille. Le combat des deux acteurs est prétexte à une confrontation très physique et d’une admirable beauté chorégraphique.
Juliette Morel saisit ce qu’il y a d’universel chez Euripide, à savoir, comme l’écrit l’auteur elle-même dans sa présentation, « ce qui reste de libre-arbitre face aux déterminismes écrasants et à la force collective violente et meurtrière. »
Question d’une brûlante actualité au regard des événements tragiques qui secouent le monde aujourd’hui, aussi cruel que celui d’Agamemnon.
Un beau spectacle, dans lequel théâtre et danse se répondent et se complètent à un rythme qui va crescendo ; en interpellant les spectateurs, Juliette Morel leur laisse le choix de leurs questionnements. Un beau spectacle dans une salle, la Ferme de Bel Ebat à Guyancourt, qui ne cède rien au climat ambiant délétère qui coupe les budgets et renvoie les citoyens vers le seul divertissement.