La période que nous vivons est troublée ; Roger Gicquel, le journaliste présentateur du JT de 20 heures sur TF1 est revenu et avec lui sa terrible phrase prononcée le 18 février 1976, « La France a peur ».

La rédaction du Figaro, le quotidien de la famille Dassault, vient de dénoncer le nouveau traitement des faits divers avec la volonté d’entretenir une psychose sécuritaire ; un journaliste confiant même que « Ces sujets-là, c’est vraiment ‘’La France a peur’’ ». Tiens donc !

Le président de la République et ses ministres, quelques journalistes ‘’faiseurs d’opinion’’ et la droite rance attisent toutes les peurs, de l’autre et du lendemain. Nous ne sommes pas dans une France apaisée quand les forces de l’obscurantisme règnent et répètent partout les mêmes litanies fustigeant ils répètent que les immigrés sont tous des délinquants.

Les immigrés sont montrés du doigt, pourchassés (par des demeurés se prétendant identitaires) et, particulièrement ceux qui pratiquent le culte musulman. Ils étaient à la recherche d’une vie moins misérable et ils découvrent l’égoïsme des gens de l’hémisphère nord.

Avec toutes les lois liberticides, la solidarité est mise à mal et j’ai peur de revivre ce qu’ont vécu nos aïeuls, à savoir la délation et la dénonciation, synonymes de déportation et de mort.

Je ne sais pas pourquoi mais un nom m’est revenu à l’esprit, Marie-Clotilde de Combiens. Son nom est passé à la postérité dans la seule Normandie, mais il me hante.

Elle aurait 100 ans aujourd’hui ; elle était née en 1921, fille naturelle comme on disait d’une mère qui s’appelait Lecouturier, engrossée par son patron, Maurice de Combiens, assureur à Caen. C’était l‘époque où les ‘’maîtres’’ se donnaient tous les droits et n’hésitaient pas à violer leurs bonnes à tout faire lorsqu’ils en avaient l’envie. Pauvres femmes, tenues dans l’ignorance et qui ne connaissaient que l’asservissement aux hommes.

La jeune Marie-Clotilde ne fut reconnue qu’en 1941 et devint la maîtresse du chef adjoint de la Gestapo de Caen, Harald Heyns, par ailleurs docteur en philosophie et fier de la ‘’race aryenne’’. Elle dénonça juifs et résistants, avec, semble-t-il, une rare délectation, participant même aux séances de tortures et aux exécutions, paradant dans les rues de la cité.

On ne compte pas le nombre de Français dont la mort atroce est à mettre au compte de cette Marie-Clotilde de Combiens. Pour la seule période de juin à août 1944, on dénombre 80 fusillés, hommes, femmes, jeunes, vieux, exécutés avant la fuite des nazis et de leurs collabos en Allemagne le 17 août. Elle ne fut pas la seule à devenir une obligée des soldats d’Hitler.

Si elle fut condamnée à mort en 1946, sa peine a été commuée en travaux forcés à perpétuité, puis ramenée à 20 ans. Elle a fini sa vie honteuse paisiblement à Hyères dans le Var après sa libération anticipée en 1954.

Je parle de cette femme odieuse, aujourd’hui oubliée, parce que j’ai peur que nous replongions dans cette atmosphère immonde de la délation à grande échelle. Le climat de peur entretenu par le système y est propice. Hélas.

La bête immonde n’est jamais totalement vaincue ; elle sommeille. Mais à ceux qui prétendent qu’il ne faut pas la réveiller, je réponds qu’il faut créer les conditions politiques et sociales pour qu’elle meure.