Quel grand moment de télévision publique sur France 5 hier ; il a duré plus de trois heures. D’abord avec un rappel historique intitulé ‘’Infirmières, notre histoire’’, puis un documentaire en deux parties, ‘’Nous soignants’’, qui a dressé l’acte d’accusation de tous les personnels, médecins, infirmières et infirmiers, aides-soignants, dénonçant la casse de l’hôpital public.
Des images fortes de soignants épuisés, désabusés, impuissants, en pleurs, mais aussi des paroles encore plus fortes pour dire leur amour du métier, mais pas un amour aveugle, un amour accusateur. Ils ont accusé avec beaucoup de dignité ceux qui, d’années en années, ont transformé les hôpitaux publics en une industrie de la santé qui doit être rentable : on laisse diminuer dangereusement le nombre de médecins, on ferme des lits et au bout du compte, on a fait des économies en réduisant l’accès aux soins. La voie est ouverte aux grands groupes privés comme Ramsay.
Toutes (de Sophie Crozier, neurologue à la Pitié-Salpêtrière, aux aides-soignantes au cœur énorme et aux auxiliaires de puériculture) et tous (d’André Grimaldi, ex-chef du service de diabétologie à la Pitié-Salpêtrière à Marc de Matos, infirmier aux urgences) ont dénoncé le numerus clausus de 1971, la tarification à l’acte des lois de 2004 et 2007, ou encore le scandaleux recours aux cabinets de conseil pour justifier la fermeture de lits et autres sources d’économies.
André Grimaldi a prononcé le réquisitoire le plus sévère à l’encontre du président de la République (rappelant que durant la crise du Covi19, Macron osait affirmer : « Les domaines de santé doivent échapper aux lois du marché (…) Il faut des ruptures, je les assumerai. »).
On aurait pu espérer qu’un tel documentaire déclenchât un vaste débat public. Hélas, les récepteurs de télévision éteints, Macron et ses ministres étaient déjà passés à autre chose et le service public de l’audiovisuel aussi. L’électrochoc souhaité et souhaitable ne s’est pas produit et ne se produira pas.
Si la plupart des soignants de l’hôpital public continueront à subir la situation, certains, à bout de souffle, démissionnerons, faute de pouvoir soigner sans mettre en jeu la santé des patients.
‘’Nous, soignants’’ ou la dignité des personnels de santé face au mur du libéralisme.