J’emprunte le titre de ce billet à un album d’Hergé après avoir lu un éditorial d’Eric Le Boucher dans Les Echos, le quotidien économique de Bernard Arnault (l’homme qui ne se déplace qu’en jet privé !).

Eric Le Boucher a découvert la lune et entend nous le faire savoir avec des phrases définitives : « C’est entendu, nous sommes entrés dans un monde ‘’post-libéral’’ » Et nous, pauvres analphabètes en matière d’économie nous ne nous en étions pas aperçu.

Qu’est-ce qui peut faire écrire un jugement aussi péremptoire à Eric Le Boucher ?  Lisons-le : « Les Etats sont de retour, ils doivent « planifier » la transition écologique, investir des milliards, la politique monétaire doit basculer dans l’austérité, le commerce doit veiller à la sécurité des approvisionnements et pas seulement leur prix, les consommateurs doivent apprendre la frugalité, même les jeux vidéo pour enfants doivent être limités. »

Il suffit que l’Etat, avec nos impôts, sorte le chéquier pour tenter de masquer son incurie quand une crise inédite déclenche une inflation majeure pour que Les Echos l’analyse comme le virage vers un monde post-libéral.

L’exercice auquel se livre Eric Le Boucher me laisse pantois ; il m’a semblé que le gouvernement annonce encore vouloir baisser les impôts, surtout ceux des entreprises, prie ces dernières de verser des primes plutôt que d’augmenter les salaires et refuse de taxer les super-profits. Ce serait donc cela le monde post-libéral ?

L’éditorialiste a lui aussi des interrogations : « Mais quelles sont les nouvelles lignes de la pensée post-libérale ? » Sa réponse est déroutante : « Mystère. On n’en trouve aucune dans la littérature de la science économique hormis l’empirisme. Le monde d’après se fera en avançant. D’où le désarroi des dirigeants à définir par avance et concrètement les politiques publiques et, au passage, l’énorme avantage des populistes qui ne s’embarrassent pas des détails sur leur ‘’autre monde’’ et se suffisent du magique ‘’il n’y a qu’à’’. La France en est un exemple parfait, mais aussi l’Italie, les Etats-Unis et, en réalité, l’ensemble des pays occidentaux. »

J’en conclus que s’il n’y a pas de pensée post-libérale, c’est que nous sommes toujours englués dans un monde libéral, d’une pureté idéologique assumée, qui ne se réformera qu’en avançant. Vers plus de libéralisme ; donc vers l’ultra-libéralisme ?

Sans doute.

Si Eric Le Boucher n’a pas découvert la lune, il a ‘’avancé’’ sur notre satellite, où il a même rencontré des ‘’populistes’’ un peu magiciens, incompétents et très dangereux.