Le Monde vient de relater la situation catastrophique des 219 salariés, majoritairement des chauffeurs, de l’entreprise Expotrans. Spécialisée dans le transport d’enfants en situation de handicap, elle était détentrice de marchés publics de nombreux départements (Puy-de-Dôme, Morbihan, Mayenne, Aisne, Vendée, Corrèze, Nord et Sarthe, etc.). Elle a été mise en liquidation judiciaire après avoir surexploité des salariés, mal rémunérés (et avec retard), non payés pendant deux mois (février et mars), découvrant que leur mutuelle n’était pas payée. Ils ont été licenciés et ne bénéficient plus de la priorité d’embauche dans la société qui prendra la suite du marché, conformément à la convention collective.

Les salariés d’Expotrans sont les victimes de patrons-voyous qui n’ont pas hésité à s’octroyer 107 282 euros de dividendes en 2023.

Le Monde a interrogé plusieurs chauffeurs d’Expotrans ; l’une d’entre eux, Danielle, avait pris la tête de la rébellion en Mayenne. Aujourd’hui, écrit le quotidien, « elle a choisi de s’encarter. A la CGT d’abord ‘’pour dépatouiller l’affaire’’. Et au Rassemblement national. ‘’Ça paraît incompatible, je sais, mais c’est comme ça’’. »

Cette simple phrase en dit long sur l’état du corps électoral à quelques jours des élections législatives anticipées. 

Comment une salariée, qui fait preuve d’un bel instinct de classe en luttant et en rejoignant la CGT et qui dénonce les patrons-voyous, peut-elle faire confiance au RN au niveau politique, tout en admettant que « ça paraît incompatible ».

On mesure l’impact des mensonges du RN et la confusion qui a envahi les esprits de trop nombreux salariés votant pour l’extrême droite.  Comment cette salariée qui a ouvert les yeux en grand après avoir été une victime des politiques patronales, peut-elle ignorer que le RN a déjà remis à plus tard le retour à la retraite à 60 ans, voté contre l’augmentation du SMIC, l’indexation des salaires sur l’inflation, la revalorisation des petites retraites, la loi permettant de faire entrer l’avortement dans la constitution, etc ? Comment Danielle qui a opté pour un syndicat oeuvrant au rassemblement des salariés peut-elle faire confiance à un parti raciste, antisémite, homophobe, sexiste, qui est l’ennemi des services publics et des libertés, un parti qui a toujours été du côté des patrons ?  

En s’interrogeant, on s’aperçoit que dans le raisonnement de Danielle, il y a de grands absents, les partis de gauche et le Front populaire. Ont-ils à ce point perdu le contact avec les classes laborieuses ?

Il reste peu de temps pour convertir tous les salariés qui, comme Danielle, ont perdu leur boussole.