José Saramago a écrit des phrases terribles mais tellement justes en 2000 sur la situation à Gaza et en Cisjordanie. Il osait déjà parler de génocide et de complicité criminelle des nations occidentales ; son analyse s’est perdue et il apparaît utile de la rappeler près de 25 ans plus tard :
« Israël a fait siennes les terribles paroles de Jéhovah dans le Deutéronome : « A moi la vengeance et la rétribution. » Israël veut que nous nous sentions coupables, nous tous, directement ou indirectement des horreurs de l’Holocauste, Israël veut que nous renoncions à notre plus élémentaire jugement critique et que nous nous transformions en un docile écho de sa volonté ; Israël veut que nous reconnaissions de jure ce qui pour eux est déjà un exercice de facto : l’impunité absolue. Du point de vue des juifs, Israël ne pourra jamais être soumis à jugement, puisqu’il a été torturé, gazé et brûlé à Auschwitz. » Benyamin Netanyahu agit à Gaza et au Liban, sûr de son impunité.
Le 7 octobre 2023, Le Hamas, créature d’Israël, aussi fanatique que les plus fanatiques des Israéliens, a perpétré un crime de guerre terrible et inacceptable. Gideon Levy, journaliste israélien au quotidien Haaretz, en témoigne aujourd’hui dans L’Humanité : «Il y a eu un choc et un traumatisme. Je suis allé dans les kibboutz et les villages attaqués, deux jours plus tard ; j’ai vu des scènes terribles. Je ne minimise rien. Mais, dorénavant, tout se passe comme si nous pouvions faire ce que nous voulons. »
Gideon Levy prend néanmoins des distances avec le génocide décidé par Netanyahu : « Il faut néanmoins rappeler que ce qui s’est passé ce jour-là s’inscrit dans un contexte. Il y a une raison à tout ; cela ne veut pas dire que je justifie tout. Mais, pensez-vous vraiment que 2,3 millions de personnes vivraient pendant dix-huit ans dans la plus grande prison au monde et l’accepteraient pour toujours ? Le 7 octobre est arrivé de la manière la plus brutale, mais après dix-huit ans en prison, les gens peuvent devenir fous. Nous pouvons tuer 41 000 personnes sans que quiconque n’ait le droit de nous dire que c’est criminel, illégal et génocidaire ? Nous pouvons tuer 17 000 enfants et dire que c’est de l’autodéfense ? Non. Israël a le droit de se défendre, mais pas de commettre un génocide. Le 7 octobre ne donne pas à Israël la liberté de se comporter en sauvage. »
La critique du gouvernement israélien est devenue inaudible et expose ceux qui osent le faire à un procès en antisémitisme. Gideon Levy, lui un juif, nous lance cependant un appel vibrant : « Ignorez cela. C’est une manipulation cynique de la propagande israélienne. Il y a de l’antisémitisme, et il faut le combattre. Mais tous ceux qui critiquent Israël ne sont pas des antisémites, pour l’amour de Dieu ! La plupart d’entre eux ne le sont pas car ce sont des gens de conscience. Quand un citoyen français voit le massacre d’enfants et crie « Arrêtez ça ! », il crie à son gouvernement de faire quelque chose. Qu’est-ce que cela a à voir avec l’antisémitisme ? »
Le bilan du crime du Hamas le 7 octobre 2023 est terrible, mais le génocide du peuple palestinien est effroyable et insupportable. Une ONG créée par Paul Biggar, un développeur irlandais, en janvier dernier, TechforPalestine, regroupant des centaines de contributeurs dans le monde, a compilé les bilans publiés par les autorités gazaouis. Parmi les 41 825 victimes dans la bande de Gaza, 34 343 ont été identifiées ; parmi elles, 1332 avaient moins de 2 ans, 5923 de 2 à 11 ans, 4100 de 11 à 17 ans, 20255 avaient plus de 17 ans et 2733 plus de 60 ans. L’ONG a dénombré 1423 attaques de colons en Cisjordanie, faisant 699 morts. Le bilan est macabre.
A qui Netanyahu fera-t-il croire que toutes ces victimes étaient des suppôts du Hamas ? La bande de Gaza n’est qu’une ruine.
Il faut entendre les appels au secours déchirants venus de Gaza et désormais du Liban ; il faut entendre ceux qui souffrent, interminablement et attendent de nous d’appeler et, surtout, d’agir pour stopper le massacre d’un peuple.