Les révélations d’Amnesty international et du consortium de journalistes Forbidden Stories sont une affaire d’Etats (au pluriel), sans doute la plus grave de l’après-guerre.
La vente du logiciel espion Pegasus de NSO Group, dont les dirigeants, sont de (très) proches amis des dirigeants israéliens, devait être validé par le ministère de la défense de l’Etat hébreu. Certains dirigeants du groupe sont d’anciens des bureaux d’espionnage. C’est donc le gouvernement israélien qui orchestrait la distribution du logiciel, NSO Group n’étant qu’un appendice.
Le Monde vient apporter des précisions sur le processus de vente de Pegasus à la Hongrie, par exemple : « Jusqu’ici, personne ne savait qu’il avait conclu un contrat avec NSO. L’accès à son service très spécial semble d’ailleurs avoir été négocié directement avec l’ancien premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, très proche politiquement de M. Orban. L’usage commercial de Pegasus par les Hongrois a débuté en février 2018, pile au moment de la visite en Israël de Jozsef Czukor, alors conseiller en chef pour la sécurité et la politique internationale de M. Orban. Il avait été reçu en personne par le premier ministre israélien en personne. » Les coïncidences sont trop nombreuses pour être fortuites.
En lisant la liste des états auxquels ce logiciel a été fourni (pour une somme modique), on est saisi d’effroi. Tous les citoyens opposés aux régimes en place, tous les journalistes, avocats, syndicalistes, écrivains, hommes et femmes de culture un peu trop curieux ou trop engagés ont été espionnés. Certains assassinats peuvent désormais être abordés sous un jour nouveau.
Le gouvernement israélien a fait la promotion de Pegasus et organisé sa vente en toute connaissance de cause. On peut s’interroger aujourd’hui sur les secrets détenus par les sbires de Nétanyahou, lui permettant de poursuivre sa politique annexionniste dans les territoires palestiniens en toute impunité, ou d’amener certains états arabes, comme l’Arabie saoudite à lui faire allégeance.
L’affaire est trop grave pour en rester là. Toutes les archives doivent être rendues publiques et tous les documents mis à la disposition d’enquêteurs internationaux. A commencer par la France.