Il sera dit que la sale année 2020 se terminera enfin par une bonne nouvelle, qui réjouira de nombreuses femmes dans le monde : le Sénat argentin a voté la légalisation de l’interruption volontaire de grossesse (IVG) jusqu’à 14 semaines.

Le projet de loi avait été repoussé par les sénateurs par 38 voix contre 31 et 2 abstentions en 2018 ; hier il a été adopté par 38 voix contre 29 et 1 abstention. Le retournement de situation est significatif ; il est à mettre au compte de l’opiniâtreté des militantes argentines de la ‘’Campagne pour un avortement légal, sûr et gratuit’’.

Courageuses femmes argentines ! Elles ont toujours su se mobiliser quand la situation l’exigeait. Des ‘’Folles de Mai’’ qui, de 1976 à 1983, ont combattu la dictature de la junte militaire de Videla aux féministes d’aujourd’hui, elles ont fait preuve d’une détermination de tous les instants.

Leur victoire pour le droit à l’avortement prend encore plus de relief dans le pays du pape François. Celui-ci avait multiplié les interventions pour appeler les sénateurs à voter contre la loi avec des propos violents ; en 2018, il avait osé affirmer qu’avorter ce serait comme « engager un tueur à gages pour résoudre un problème ». Le 28 novembre dernier, il utilisait la même formule en écrivant à un groupe de femmes anti-avortement : « Est-il juste d’éliminer une vie humaine pour résoudre un problème ? Est-il juste d’engager un tueur à gages pour résoudre un problème ? » Le pape, plus progressiste sur de nombreuses questions, n’a pas varié sur d’autres, notamment sur l’IVG. Déjà en 216, il avait défini l’avortement comme un crime et il avait ajouté :« C’est tuer quelqu’un pour sauver quelqu’un d’autre. C’est ce que fait la mafia. C’est un crime, c’est un mal absolu.»

Le pape François est trop intelligent pour utiliser des mots aussi connotés que crime absolu, mafia et tueurs à gages sans en mesurer les effets sur la population argentine. Visiblement, il n’a pas été entendu.

L’Eglise catholique est en crise au point de délaisser sa rhétorique mielleuse pour les insultes. Elle est à contre-courant des évolutions des populations et des femmes en particulier qui revendiquent leur juste place dans la société et veulent disposer de leur corps en toute liberté.

Le pape François a commis une grave erreur ; son entourage au Vatican, vivant dans le luxe et l’hypocrisie, les cardinaux et les évêques insensibles aux maux du monde précipitent la chute de leur religion. Ils s’immiscent dans la gouvernance de trop nombreux pays où les peuples se rebiffent.

Tout ce beau monde du Vatican va peut-être avaler de travers l’hostie en commentant les résultats du vote en Argentine, mais il continue à se couper des peuples, comme en Pologne. Les femmes du pays de Jean-Paul II, en effet, rejettent de plus en plus fermement la tutelle de l’Eglise sur leur vie intime. Assurément, elles vont trouver de nouveaux motifs d’encouragement pour lutter contre le carcan qui leur est imposé par le PIS, un parti réactionnaire, franchisé par les représentants du pape.

Aujourd’hui, on a envie de reprendre le cri des femmes de Buenos-Aires scandant « Argentina ! Argentina ! »