Olivier Dussopt, le ministre du travail, est à l’honneur aujourd’hui ; il présente le projet de loi sur la réforme des retraites. Il se rengorge, il donne des coups de menton, il est rouge de plaisir. Bref, il est hors sol ; il est ébloui par toutes les lumières qui permettent aux caméras de le montrer au bon peuple dans tous les journaux télévisés.
Un bref rappel est nécessaire pour camper le personnage.
Le ministre du travail d’Emmanuel Macron est ce député qui, en septembre 2014, avait interpellé le ministre de l’économie auteur d’une petite phrase honteuse, traitant les ouvrières de l’abattoir Gad d’illettrées :
« Je me nomme Olivier Dussopt, je suis député de l’Ardèche. Ma mère est ouvrière, n’a pas de diplôme et a été licenciée à deux reprises. Vous l’avez insultée. »
Le député s’était ensuite emporté et avait reproché à Emmanuel Macron d’avoir eu un comportement de connard. Ambiance.
Le 21 novembre 2017, le même député, Olivier Dussopt, encore assis sur les bancs réservés au Parti socialiste, vote contre le premier projet de budget du nouveau président, Emmanuel Macron. Le 24 novembre, il est nommé secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’action et des comptes publics et aussitôt dépêché au Sénat pour défendre le même projet de loi de finances. Il ne fait pas dans la nuance en déclarant : « Je sais, par l’expérience que j’ai eue à l’Assemblée nationale, que les compromis sont souvent possibles. J’espère que ma présence parmi vous aujourd’hui nous permettra aux uns et aux autres de nous retrouver sur les sujets essentiels. Je mettrai tout en œuvre pour être à la hauteur des responsabilités qui m’ont été confiées. »
Olivier Dussopt n’est pas à un retournement de veste près.
Son fait d’armes le plus retentissant date de 2010, quand il est particulièrement sévère avec François Fillon qui, déjà, veut repousser l’âge de la retraite. Dussopt dénonce alors un projet de loi injuste qui « écarte d’emblée la recherche d’autres recettes et la mise à contribution de l’ensemble des revenus, et en particulier ceux issus du capital. Entre les niches fiscales et le bouclier du même nom, beaucoup pourrait être fait pour que les efforts ne portent pas encore une fois sur les seuls salariés ». Il ajoute, à propos de la méthode employée par le premier ministre pour faire adopter sa loi : « La main sur le cœur, vous vous êtes engagé à ne pas passer en force et à rechercher une position de consensus. (…) Malheureusement, la vérité est ailleurs : vous avez déjà décidé les axes de votre réforme, et les discussions que vous menez ne sont que des alibis et des rideaux de fumée. La concertation que vous avez promise apparaît pour ce qu’elle est : un simulacre ».
En présentant le projet de loi, le ministre Dussopt a affirmé que le gouvernement ne reviendra pas sur le report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans, ajoutant que « revenir sur ce point serait renoncer au retour à l’équilibre du système ». Comme le prétendait Fillon et comme le contestait Dussopt en 2010.
On ne sait pas ce qu’un jeune député, élu en juin 2022 avec l’étiquette du Parti socialiste et avec les voix de la gauche unie, peut avoir envie de dire en croisant le ministre du travail dans les couloirs du Palais-Bourbon ; mais on peut lui souffler le qualificatif insultant dont le député Olivier Dussopt usa en apostrophant Emmanuel Macron en 2014.