Le 20 décembre 1848, le président de l’Assemblée constituante lut le serment que le nouveau président de la République devait s’engager à respecter :
« En présence de Dieu et devant le peuple français représenté par l’Assemblée nationale, je jure de rester fidèle à la République démocratique une et indivisible et de remplir tous les devoirs que m’impose la Constitution. »
Louis Napoléon Bonaparte jura et s’engagea à la respecter, notamment, son article 68 qui dit : « Toute mesure par laquelle le président de la République dissout l’Assemblée nationale, la proroge, ou met obstacle à l’exercice de son mandat, est un crime de haute trahison. »
On sait ce qu’il advint : le 2 décembre 1851, l’assemblée était dissoute ; la seconde République n’avait vécu que trois ans.
On ne peut s’empêcher d’établir un certain parallélisme entre la situation de 1848 et l’épisode tragique que la France est en train de vivre avec la lamentable épreuve de l’adoption sans vote puis la promulgation expresse de nuit de la réforme des retraites.
Le coup de force de Macron est aussi antidémocratique que le coup d’Etat de Louis-Napoléon. Ne peut-on pas parler de haute trahison ? Et, décidément, l’opportunité est belle de relire le pamphlet de Victor Hugo, écrit en exil à Bruxelles, Napoléon le Petit.
« La situation présente, qui semble calme à qui ne pense pas, est violente, qu’on ne s’y méprenne point. Quand la moralité publique s’éclipse, il se fait dans l’ordre social une ombre qui épouvante. Toutes les garanties s’en vont, tous les points d’appui s’évanouissent. »
Napoléon III a très mal fini. Le père Hugo l’avait prédit :
« Oui, on se réveillera ! Oui, on sortira de cette torpeur qui, pour un tel peuple, est la honte ; et quand la France sera réveillée, quand elle ouvrira les yeux, quand elle distinguera, quand elle verra ce qu’elle a devant elle et à côté d’elle, elle reculera, cette France, avec un frémissement terrible, devant ce monstrueux forfait qui a osé l’épouser dans les ténèbres et dont elle a partagé le lit. Alors l’heure suprême sonnera. »
Partis politiques de gauche et aussi quelques élus de droite, mais authentiques républicains, organisations syndicales enfin réunies vont se charger d’entretenir et de faire grandir la mobilisation pour faire échec à Emmanuel le Petit. Le 14 avril 2023 ne sera pas son 20 décembre 1848, ni son 2 décembre 1851 ; il n’a jamais été aussi proche du 4 septembre 1870 !
Son mépris n’est que la façade de ses faiblesses dans l’opinion. Il paiera, lui aussi, pour son crime de haute trahison.
Le peuple s’est déjà réveillé et il n’a pas pu s’empêcher de noter, aussi, que le 14 avril, le CAC 40 a battu son record absolu (7519,61 et 7480,83 en clôture, en hausse de plus de 16 % depuis le 1er janvier, porté, notamment pas LVMH et Hermès. L’argent coule à flot pour les actionnaires, mais ne ruisselle pas. Macron et son gouvernement ne se sentent pas hideux devant tant de richesses s’étalant quand des citoyens se privent, déjà, d’un repas par jour.
Macron veut faire taire la presse, mais il va parler. Ou plutôt soliloquer, récusant par avance toute contrariété que pourrait lui occasionner un journaliste à peine irrévérencieux. Il a confisqué la République ; il faut la lui faire rendre avant qu’il ne la confie à la bête immonde, tapie dans l’ombre, restant muette, mais engrangeant les consciences affaiblies.