Si l’abaya est un vêtement traditionnel, les islamistes radicaux l’ont transformé en un symbole religieux. Pour autant, faut-il l’interdire à l’école en invoquant le respect de la laïcité ?

Assurément, l’annonce de son interdiction par Gabriel Attal ne visait pas à répondre à une vaste question de société.

Dans le discours de rentrée de l’improbable ministre de l’éducation nationale, l’abaya n’était qu’un artifice (grossier) pour évacuer les questions beaucoup plus graves qui minent le système de l’instruction : manque de professeurs, réformes idiotes et incessantes, ségrégation sociale, augmentation des fournitures scolaires, manque de logements pour les étudiants, etc.

De nombreux rapports font le bilan catastrophique d’un ministère qui entend favoriser, coûte que coûte, le privé et les riches en affaiblissant l’école publique, obligatoire, gratuite et laïque. L’école de la République qui forme des citoyens n’est plus une priorité du gouvernement des riches.

L’un des plus récents note l’écart croissant entre privé et public en matière de mixité sociale. Les enfants d’ouvriers ou d’inactifs (définis comme venant d’un milieu défavorisé) sont 34,7% à fréquenter un collège, mais 58,8% sont scolarisés dans un dixième des collèges les plus défavorisés et 11,9% seulement dans le dixième des collèges les plus favorisés. Bonjour les ghettos !

La ségrégation sociale est plus marquée encore en milieu urbain. Elle se mesure dans les établissements privés sous contrat où les élèves d’un milieu très favorisé sont 41,7% contre 16% d’un milieu défavorisé.

Le bilan du ministère se mesure à tous les échelons jusqu’au doctorat où le nombre d’étudiants inscrits en première année de thèse a diminué de 4% en 2022 et le nombre d’étudiants ayant obtenu leur diplôme en baisse continue depuis 2012.

Selon un rapport, « Une des difficultés rencontrées par les étudiants est lefinancement de leurs travaux de recherche.À la rentrée 2022, seuls 79% des doctorants bénéficient d’un financement lors de leur première année de doctorat. La situation financière des doctorants diffère grandement selon le domaine d’étude. Ainsi, les étudiants en sciences exactes et applications sont financés à 97% et ceux en sciences du vivant à 86%. À l’inverse, un doctorant sur deux (51%) en sciences humaines et sociales bénéficie d’un financement pour sa thèse. Ceux qui n’ont pas réussi à décrocher de contrat doctoral ou d’autre type de financement sont souvent contraints de travailler en parallèle de leur thèse. C’est le cas de 29% des doctorants en sciences humaines et sociales, contre 13% des doctorants en sciences du vivant et 3% des doctorants en sciences exactes et applications. »

Ce que ne dit pas le rapport, c’est que le nombre d’étudiants, enfants d’ouvriers, est en baisse constante dans les universités et plus encore en doctorat.

Alors, on se préoccupe de l’augmentation du port de l’abaya à l’école ou on règle de toute urgence les innombrables problèmes qui minent l’éducation nationale ? Hélas, après avoir entendu le ministre, boîte de résonnance de la Macronie, on reparlera plus volontiers de l’abaya !