Nous pouvions dormir tranquille depuis l’élection d’Emmanuel Macron (ni de droite, ni de gauche) ; la révolution (titre de son livre programme) était en marche : il allait réformer la France de fond en comble. L’argent allait ruisseler !

Rares ont été les observateurs politiques et les économistes à émettre des doutes sérieux quant à l’efficacité d’un programme tout entier tourné vers le libéralisme, avec un gouvernement où les petits ambitieux de la droite sarkozyste fraichement convertis étaient appelés en grand nombre.

Les patrons béaient d’admiration et louaient ce gouvernement qui leur administrait chaque jour une dose de solidarité de classe ; les institutions étaient à leurs pieds.

Le petit homme pressé de l’Elysée gouvernait à coup d’ordonnances, insultait les chômeurs et déclamait quotidiennement un discours lénifiant pour endormir son bon peuple. Ses ministres disaient, eux, n’importe quoi et rabâchaient les paroles du chef pour meubler l’espace médiatique et séduire la masse ignare. Peu importait, seule comptait la parole de l’oracle, bouffi de suffisance.

Mais le petit homme, réfugié dans son bunker, entouré de courtisans, eux aussi sortis d’une grande école où l’on apprend à gouverner contre le peuple et sans le peuple pour régner en maître et seigneur, était tellement ignorant des choses du peuple qu’il n’a pas vu le peuple se lever. Dans le désordre, certes, dans la violence (condamnable, bien entendu), mais qui était la traduction d’un rejet total.

Comment qualifier Emmanuel Macron, sinon de graine de violence.

On ne fait pas de cadeaux somptuaires aux riches en supprimant l’ISF et aux patrons en cassant le code du travail par ordonnances, on ne casse pas les retraites par répartition, les prud’hommes, le statut de la SNCF et de la fonction publique avec la loi PACTE, on ne ferme pas les hôpitaux, on ne supprime pas 120 000 postes de fonctionnaires pour fermer des services publics et les emplois aidés, on n’augmente pas la CSG pendant qu’on baisse les dotations aux collectivités territoriales, on ne rejette pas le plan Borloo, on ne ferme pas l’université aux plus pauvres en réformant le baccalauréat et en instaurant Parcourus, on ne réduit pas le logement social et le bail à vie (loi ELAN), on ne diminue pas l’APL (la liste, hélas, n’est pas exhaustive) sans que le peuple réagisse.

Quand on se prétend exemplaire, on évite les quelques affaires qui ont déjà émaillé son quinquennat (Ferrand, Bayrou, de Sarnez, Goulard, Flessel), un vrai scandale (Affaire Benalla) et quelques démissions tonitruantes (Hulot et Collomb). On évite aussi les insultes aux citoyens qui osent apostropher sa majesté…

Faut-il alors s’étonner que le peuple ait fini par avoir des réactions violentes, désordonnées ? Les lamentations des macronistes après les violences (que je n’approuve pas pour autant) ne sont-elles pas l’expression de l’aveuglement d’un président coupé du monde, idéologue (contrairement à ce qu’il prétend), incapable de comprendre la colère sociale ? Ses cris d’indignation ne lui servent-ils pas à masquer son désarroi et à tenter de retourner une opinion solidaire ?

Emmanuel Macron, graine de violence, devra rendre des comptes à un peuple qui n’en peut plus du libéralisme.