« Comme après les élections de 2016, les médias américains sont sur la sellette », écrit Brice Couturier de France Culture. Dans son intéressant article, il rend compte d’une recherche très poussée de deux universitaires spécialisées dans les études de presse, Nikki Ushe (de l’Université du Michigan) et Yee Man Margaret Ng (du College of Media Illinois).

Pour les deux chercheuses, les journalistes américains « par leur éducation, les études par lesquelles ils sont le plus souvent passés, leurs lieux de résidence et les réseaux de sociabilité dans lesquels ils sont insérés, partagent les partis-pris culturels et idéologiques des élites des côtes ».

Brice Couturier s’interroge : « Cette situation leur a-t-elle masqué les réalités d’une Amérique profonde qu’ils connaissent mal ? Sinon, comment expliquer qu’ils n’aient pas vu que celle-ci ne partageait pas nécessairement l’aversion que leur inspirait le président sortant d’une manière presque unanime ? »

« Ces journalistes constituent, écrivent les deux universitaires, une « communauté autoréférentielle » qui vit en circuit fermé. Leur milieu constitue une « microbulle insulaire et donc vulnérable », qui construit « des angles morts » sur quantité de problèmes américains, sur lesquels ils s’entendent tacitement pour faire silence. Leur identité collective est fondée sur un système de croyances partagées. Mis dans l’obligation de travailler de plus en plus vite, ils sont « comparables aux traders », qui forment également un milieu terriblement conformiste et stressé. Ils sont accros à Tweeter qui est devenu l’une de leurs principales sources d’information dans la mesure où ils suivent – et recopient – un noyau qui bénéficie d’un accès privilégié à l’information. Mais le pire, c’est que même sur Twitter, ils ne sortent guère de leur « microbulle ». »

Brice Couturier en conclut que « les médias parlent aux médias et parfois même à propos des médias (…) Cette tendance au parti-pris et à l’entre soi est problématique. Car elle est probablement l’un des facteurs déclenchant, par réaction, l’envie d’une partie des électeurs de voter contre les médias… Croyant combattre le populisme, une partie du monde des journalistes le renforce ainsi malgré lui. »

Toute ressemblance avec le monde des éditorialistes français serait malveillante.