Je me suis jeté avec empressement sur une interview de Paco Ibanez parue aujourd’hui dans L’Humanité.

Combien de souvenirs elle fait remonter dans ma mémoire. C’est lui, Paco, qui m’a appris, non pas à lire, mais à mieux comprendre les messages de Gabriel Garcia Lorca ou Pablo Neruda, d’autres encore. Il m’a ému aux larmes en écoutant La poesia es un arma cargada de futuro (la poésie est une arme chargée de futur) ou La mala reputacion, la mauvaise réputation de Brassens, qui lui vaudra d’être interdit de chanter dans toute l’Espagne.

On ne peut pas oublier la voix de Paco Ibanez, son engagement antifasciste de toujours, sa gentillesse, sa simplicité.

Monique Lange, l’épouse de son compatriote Juan Goytisolo, un écrivain qui fut lui aussi interdit en Espagne, disait : « Paco ne sait pas écrire, mais il sait lire »,rendant ainsi hommage à ses interprétations particulièrement respectueuses des textes des plus grands poètes.

Paco Ibanez a 84 ans ; cependant il n’est pas au crépuscule de sa vie : il chante encore et toujours. Il porte un avis critique sur la situation actuelle : « La France a été le pays de la chanson et Edith Piaf ne peut en être la seule représentante ! L’oubli est la vraie décadence de ce monde. Je pourrais rappeler Brassens, Où sont les neiges d’antan ?, et demander où est la France d’antan, quand elle incarnait alors une neige populaire. Elle disparaît. Elle est avalée par la bouche sans esprit des Américains, pour lesquels tout doit être rentable sous peine de ne pas exister. Ils ne mesurent qu’en ces termes. Les Américains sont capables de produire des rêves qui deviennent des cauchemars. Et, finalement, le rêve américain est le pire cauchemar du monde. »

Il ajoute des phrases assassines : « La France oublie ses poètes. Il faut appeler l’ambulance d’urgence. Mais, por favor, Macron a organisé des funérailles nationales à Johnny Hallyday comme s‘il était Victor Hugo. C’est invraisemblable. »  

Dans notre monde du fric et du capitalisme sauvage, américanisé comme dit Paco Ibanez, il reste encore des oasis de résistance qu’il faut cultiver pour retrouver l’espoir de changer le monde. Il faut écouter Paco Ibanez.