De Gaulle avait comparé les Français à des veaux. En juin 1940 à Londres, à l’hôtel Connaught, son fils l’avait entendu prononcer un jugement sans appel : « Ce sont des veaux. Ils sont bons pour le massacre. Ils n’ont que ce qu’ils méritent. »

Sans doute inspiré par un de ses glorieux prédécesseurs et par les veaux, Emmanuel Macron a étalé son mépris de classe sur Europe 1 en septembre 2014 en prenant l’exemple des salariés des abattoirs de Gad, licenciés et en difficulté pour retrouver un emploi : « Il y a dans cette société une majorité de femmes, pour beaucoup illettrées. »

Décidément les veaux occupent une place importante dans le langage imagé de nos présidents.

En lisant et en écoutant les commentaires de nos gouvernants à propos de la réforme des retraites, en lisant et en écoutant le haut-commissaire Jean-Paul Delevoye, un politicien estampillé ‘’droite dure’’ depuis longtemps, me reviennent aussitôt à l’esprit les saillies de De Gaulle et de Macron.

Nous serions des veaux illettrés, pour ne pas comprendre que la réforme des retraites est absolument nécessaire, plus simple, plus lisible, plus moderne. Toujours plus…

Il n’y aurait que les mauvais esprits de la CGT (tous des veaux) pour trouver qu’il s’agit d’un projet de régression sociale, injuste et individualiste. Dicté par le MEDEF.

Nos brillants dirigeants peuvent nous abreuver de mots ronflants, parlant d’âge pivot, de décote, de surcote, de règle d’or, de trajectoire financière du système, de solde cumulé positif ou nul par périodes de cinq années, de levier de pilotage, de notion de durée d’assurance s’effaçant derrière celle de points acquis, nous avons bien compris, contrairement à ce qu’ils espèrent, que leur système dit universel n’est qu’une façon de laminer la retraite solidaire par répartition, de dérouler le tapis rouge aux compagnies d’assurance privées, de satisfaire les exigences des grands patrons et de réduire le montant des pensions tout en travaillant plus longtemps.

Nous sommes peut-être des veaux et nous sommes sans doute illettrés, mais qu’ils prennent garde : nous avons parfaitement compris la politique antisociale de Jupiter et nous aspirons à une vie meilleure et apaisée après une vie de dur labeur.

Nous méritons mieux que cette fumisterie de réforme.