Aussitôt après l’annonce de la composition des membres du gouvernement de Mme Elisabeth Borne, le milieu universitaire vantait la bonne réputation de M. Pap Ndiaye. Le nouveau ministre était présenté comme un homme de gauche et les éructations de la droite étaient suffisantes pour donner corps à l’affirmation. Pure illusion ? Mensonge ? Vérité ?

M. Pap Ndiaye, désormais homme politique, vient d’avoir un long entretien avec la rédaction du Parisien (de M. Bernard Arnault). Où le ministre fait des déclarations suffisantes pour faire éclater la vérité : il fera à son poste la politique d’un gouvernement de droite. Pour la simple raison qu’il a été nommé pour cela.

Les éditorialistes avaient tenté de faire croire à une augmentation des salaires des enseignants ; elle aura lieu mais timidement. Le salaire des jeunes sera à peine au-dessus de 2000 euros, mais en 2023 seulement. L’augmentation sera assortie de conditions, une part de l’augmentation sera conditionnée à des tâches nouvelles ; en langage clair (et non politicien), le nouveau ministre reprend le slogan de Sarkozy et de Macron, ‘’travailler plus pour gagner plus’’.

M. Pap Ndiaye réintroduira 1h30 de mathématiques dans le programme des classes première, sans doute en 2023. Sans assurance formelle.

Quant aux questions qui fâchent élèves, parents d’élèves et enseignants, à savoir Parcoursup et la réforme des lycées, il est hors de question de revenir sur les trouvailles de Blanquer.

Le nouveau ministre ne se distingue guère de son prédécesseur en affirmant que tous les élèves auront un professeur devant eux à la prochaine rentrée, niant la cruelle réalité. Les différents concours de recrutement ont apporté la preuve que la profession n’attire pas les jeunes diplômés. M. Pap Ndiaye, homme intelligent, ne peut pas l’ignorer. Il prend un gros risque en faisant croire que la prochaine rentrée se passera sans heurts.

Il ne peut pas ignorer l’expérimentation absurde imaginée par l’académie de Nancy-Metz, le recrutement de sept ‘’visio-remplaçants’’, qui, depuis un établissement proche de leur domicile et grâce à un ordinateur fourni par l’éducation nationale, feraient cours à des élèves de zones rurales privés d’enseignants. Les élèves seraient sous la surveillance d’assistants d’éducation. La mission des enseignants ne durerait que 7 semaines, soit la durée d’une scolarité entre deux périodes de vacances. Après les ‘’jobs dating’’ des académies de Versailles et Amiens, les recteurs sont priés de faire preuve d’une inspiration débordante pour pallier les manques d’enseignants. Le nouveau ministre approuve-t-il de telles expériences aussi chimériques que dangereuses.

On attendait, sans doute trop naïvement, que M. Pap Ndiaye se démarque vraiment de Jean-Michel Blanquer et dise la vérité, œuvre ultime d’une politique démocratique.

La désillusion n’en sera que plus grande parmi ceux qui ont cru que Macron voulait changer de ligne politique après son résultat désastreux aux élections législatives.

Alors, la question est de savoir maintenant si M. Pap Ndiaye est réellement un homme de gauche ou si on nous a menti en le présentant ainsi. Car rien, ni personne, ne l’a contraint à se fourvoyer dans un gouvernement ultralibéral aux côtés de Bruno Le Maire ou de Gérald Darmanin, obéissant à un président jupitérien ne laissant aucune marge de manœuvre aux ministres.

Ternir sa réputation pour un maroquin, cela en vaut-il la peine ? Cela est-il digne d’un universitaire reconnu ?