La lettre quotidienne de Charlie Hebdo d’hier soir débute un article par une interpellation ébouriffante et qui m’a interloquée : « Bienvenue à ‘’l’école du diable’’ ».
Les faits rapportés par l’article sont pour le moins étonnants : « À Ploërmel, dans le Morbihan, le premier lycée public vient enfin d’ouvrir… après une lutte de cinq décennies mené par les piliers de l’enseignement catholique dans la ville. À Mona Ozouf, 220 élèves de seconde et de première ont effectué leur première rentrée, le 4 septembre. Jusqu’ici, l’offre scolaire dans la ville était uniquement privée ; un monopole étonnant pour une ville de 10 000 habitants. »
Puissance de l’Eglise catholique ou plutôt démission des institutions d’un Etat laïc ?
Il est difficile de trancher quand Charlie Hebdo nous apprend également que Béatrice Le Marre, maire de la ville de 2014 à 2020 avait dû batailler aussi pour obtenir le retrait d’un crucifix de la salle des mariages et la tenue du conseil municipal dans les bâtiments municipaux plutôt que dans le collège privé du Sacré-Cœur. Cette enseignante, socialiste, a néanmoins réussi à obtenir l’ouverture d’un lycée laïc avant d’être battue en 2020 par un réactionnaire. Sa victoire (pour l’école de la République) a un goût amer ! La calotte a gagné une bataille.
Mais le combat de Mme Le Marre n’a pas été vain : « Nous sommes dans un secteur très ouvrier, où les salaires sont bas et les personnels peu qualifiés. Il y avait un vrai enjeu à offrir la possibilité d’une éducation gratuite. » La preuve ? A la rentrée, la présence de 220 élèves de classe de seconde sur les bancs du nouveau lycée !
La guerre de religion a connu des moments cocasses, dont l’un est rapporté par Charlie Hebdo : « Nombre d’habitants s’étonnent qu’on donne au nouveau lycée public un ‘’nom arabe’’, sans savoir que Mona Ozouf est…bretonne. »
Les agités de la calotte ont avalé leur hostie de travers ; l’obscurantisme et le dogmatisme ont reculé. Mais les crucifix sont toujours là. Avec des défenseurs comme Bolloré ou de Villiers qui ont pris la tête d’une nouvelle croisade au nom de la défense des valeurs de l’Occident. Comme au Moyen-Âge.
A propos de Vincent Bolloré, il est à croire que sa puissance est telle que les institutions de la République se courbent devant lui et ses ouailles. Avec beaucoup de déférence (qu’ils ne méritent pas).
Dimanche, l’émission de France 5 ‘’C médiatique’’, animée par Mélanie Taravant, a osé inviter Cyril Hanouna, qui, sans aucune retenue, s’est livré à une nouvelle attaque contre le service public et, notamment, l’émission Complément d’enquête consacrée au Puy du Fou. Evidemment, il jubilait : « Cette émission sera ma dernière avant un bon bout de temps et je suis venu parce que ce sont des amis, et ça me faisait marrer d’être le premier invité de C médiatique ! » Il en rit encore.
Comment une telle invitation a-t-elle été possible ?
On peut supposer que les grenouilles de bénitier Bolloré et de Villiers ont dû féliciter chaudement l’ignoble Hanouna. Mais tout esprit normalement constitué s’étonne d’une telle faute déontologique en laissant le micro ouvert à un faussaire, adversaire du service public, de l’information complète et vérifiée, condamné de nombreuses fois par l’ARCOM pour ses ‘’dérapages’’ très contrôlés et ignobles.
Les affaires de Ploërmel et de C Médiatique en disent beaucoup sur les compromissions des dirigeants du pays des droits de l’homme avec les forces obscurantistes et réactionnaires. Ont-ils conscience qu’ils labourent le terrain pour le Rassemblement national et ses idées lugubres et inquiétantes ?