Emmanuel Macron affiche souvent un petit rictus, qu’on pourrait qualifier de circonstance ou de commercial. Car l’homme ne rit pas souvent. Habité par sa fonction, il cultive plutôt le genre sérieux et décidé ; son air grave, il le tient sans doute de sa formation à l’ENA. Chez ces gens-là, on ne rit pas, on affiche une gueule d’enterrement.

Ce lundi, à propos de « sa » réforme des retraites, il a abandonné son rictus pour prendre son air le plus méprisant (à l’égard des cheminots, en englobant tous les autres qui seraient tentés de les rejoindre dans la grève) pour déclarer sur RTL :

« Je veux aller au bout de cette réforme, je pense qu’elle est nécessaire pour le pays donc je la défendrai. Peut-être que ça me rendra impopulaire, peut-être que des gens dirontc’est insupportable, tout ça pour ça. Je ferai tout pour qu’il n’y ait pas ces blocages, je ferai tout pour qu’on soit en soutien de nos compatriotes qui seraient bloqués, mais je n’aurai aucune forme de faiblesse ou de complaisance. »

Toute ressemblance avec un autre comique de la même extraction ne serait que pure coïncidence.

Le 6 juillet 1995, à peine nommé premier ministre par Jacques Chirac, Alain Juppé, autre produit de cette école du rire qu’est l’ENA, déclarait, lui aussi vouloir réformer le pays en profondeur et réduire la fracture sociale promise par le président de la République.

Au journal de 20 heures de TF1, il parlait avec la même détermination que le président des riches aujourd’hui :

« Je reste droit dans mes bottes et je ferai mon travail. »

On a vu le résultat. Quelques mois plus tard, la grève des cheminots l’amenait à ranger sa réforme des retraites ; puis Chirac dissolvait l’Assemblée nationale et à l’issue des élections Juppé prenait le train pour Bordeaux.

Macron devrait réviser son histoire de France contemporaine ! Puis éviter les sentences définitives.

L’abandon de sa reforme des retraites ne serait pas interprétée comme une forme de faiblesse, mais bien comme une décision sage et intelligente. Et avec un sourire (un vrai), il n’aurait plus à s’inquiéter de son impopularité.

Et cela pourrait lui éviter de prendre le train pour Amiens !