Prendre son petit déjeuner, l’esprit à peine sorti des bras de Morphée, et entendre Dominique Seux sur France Inter, est une punition et, la colère aidant, on se retient pour ne pas éteindre son transistor ou le jeter par la fenêtre.

On se reprend et on écoute son catéchisme. Et on se plait à se remémorer des déclarations de Christian Chavagneux, docteur en économie et éditorialiste à Alternatives économiques, qui avait relevé en 2018 l’absence de sujets consacrés aux salariés, à leurs rémunérations et conditions de travail dans les chroniques quotidiennes de Dominique Seux sur France Inter, dans le 7/9.

On se rassure en se disant que Seux n’est pas le pape infaillible du macronisme. Tout en se désolant que le chroniqueur n’a pas varié dans son traitement de l’actualité économique

Quand il arrive, rarement donc, au directeur délégué des Echos de traiter des salariés, c’est pour dénoncer les épouvantables attitudes et agissements de la CGT. Crise de l’énergie oblige, il consacre son intervention d’aujourd’hui à l’entretien des réacteurs nucléaires perturbés par une grève qui ralentit les travaux de maintenance et donc les redémarrages.

Le salarié de Bernard Arnault ose dire sur une chaîne publique : « Au fond, la CGT invente la coupure de courant différée. Explications : ne pas faire les travaux de maintenance ou de réparation maintenant fait peser un risque sur l’approvisionnement en courant demain, en décembre, janvier ou février, au creux de l’hiver, quand les réacteurs devaient normalement avoir redémarré mais n’auront peut-être pas redémarré. Dans les raffineries, on avait découvert la grève préventive, avant la négociation, pour forcer cette négociation, une grève avec un effet immédiat pour les automobilistes. »

Il ajoute des propos scandaleux sans provoquer la moindre réaction de la part de Nicolas Demorand : « La CGT sait qu’elle a une chance historique de faire plier la direction avec ce bras de levier – le mot chantage est absolument interdit je le sais ! Et à la différence des raffineries, l’opinion ne risque pas de se retourner contre elle dans l’immédiat puisque le courant arrive. »

Le couplet final est dans la même tonalité, après une relance de Demorand sur l’inévitable coût pour EDF : « A moyen terme, elle menace implicitement les Français d’un possible manque de courant. A court terme, chaque jour de grève coûte cher à l’entreprise puisque chaque jour de retard dans le redémarrage d’un réacteur contraindra(it) EDF à acheter du courant sur le marché auprès d’autres fournisseurs français ou étrangers. Le gouvernement donne un chiffre : 90 à 120 millions d’euros par jour. Enorme et invérifiable. Mais l’originalité est là : la CGT n’a aucun intérêt à le contester puisqu’elle compte là-dessus pour faire plier la direction. Devinez tout de même qui paiera de toutes façons la facture : le client. »

Le client ? Pour discréditer la CGT, il suffit de lui opposer le pauvre client, le pauvre usager, les victimes des grèves de la CGT. Le refrain est toujours le même, mais nos brillants ultra-libéraux continuent à en user et en abuser depuis des décennies (voir plus).

Seux a le titre d’éditorialiste sur France Inter ; c’est-à-dire qu’il reflète la ligne éditoriale de la chaîne. Le ‘’client’’ contraint d’ingurgiter les dogmes libéraux et seulement eux attend d’autres analyses du service public ; mais ce client-là, Seux et les titulaires du 7/9.30, Demorand et Salamé n’en ont cure. Preuve supplémentaire : alors que le gouvernement a utilisé le 49-3 pour adopter son budget, Aurore Bergé a succédé à Seux à l’antenne pour défendre un exécutif qui se complaît dans le déni de démocratie.

Il fallait oser ; le service public de radio France l’a fait !