René Clair avait un talent fou ; en 1955, il a réalisé un film qui a reçu de multiples récompenses, avec des acteurs qui, eux, aussi, avaient un talent fou : Gérard Philipe, Michèle Morgan, mais aussi Yves Robert, Pierre Dux, Jean Desailly, Brigitte Bardot, Michel Piccoli, etc.
René Clair, c’était le monde d’avant, celui où le talent n’était pas frelaté.
La version 2021 d’Emmanuel Macron des Grandes manœuvres paraît bien piètre, avec des acteurs gorgés d’orgueil et à l’ego surdimensionné.
Les grandes manœuvres de Macron nous donneront à voir un film pitoyable qui sortira au printemps 2022.
Le président de République a osé tout mélanger le 11 novembre, la commémoration de l’armistice de 1918, l’hommage aux poilus et le transfert des dépouilles d’Hubert Germain, le dernier Compagnon de la Libération dans la crypte du Mont-Valérien.
Macron pourra rétorquer à ceux qui lui reprocheront le mauvais goût de mélanger les deux guerres mondiales de nature très différentes que c’est l’un de ses prédécesseurs, Nicolas Sarkozy, qui a fait voter une loi le 28 février 2012 étendant le jour anniversaire de l’armistice de 1918 à tous les morts pour la France. Il n’empêche, la cérémonie pour Hubert Germain a éclipsé l’hommage dus aux poilus de 14-18 et s’est transformée en manifestation politique du futur candidat tentant de capter les voix de ceux qui se réclament encore du gaullisme.
Quelle que soit sa personnalité, que pèse Hubert Germain face aux 20 millions de morts de la Grande Guerre ? Et, pour aller plus loin, que pèse Hubert Germain face aux plus de 1 000 Résistants fusillés par les Nazis au Mont-Valérien ?
Macron se range du côté de ceux qui ont transformé le Mont-Valérien en site mémoriel du seul gaullisme, alors qu’il aurait dû rester un site à la mémoire de tous les Résistants, notamment les communistes, très nombreux à avoir été assassinés par des Allemands dans la clairière du lieu.
Mais, au bout du compte, je suis comme Georges Brassens, « La musique qui marche au pas, cela ne me regarde pas ». Et je détourne les yeux pour ne pas voir ce spectacle indigne des véritables héros.
Les grandes manœuvres de Macron, elles, sont permanentes et tous azimuts. J’en veux pour preuve la désignation de Mathias Vicherat à la direction de Sciences Po. Certes il a été élu par le conseil d’administration de la Fondation nationale des sciences politiques par 19 voix sur 23, mais qui peut douter que son élection a été commanditée par l’hôte de l’Elysée (qui verrouille tout).
Mathias Vicherat a fréquenté l’ENA et a fait partie de la promotion Léopold-Sédar-Senghor avec Macron et, curieusement, il a démissionné de son poste de secrétaire général de Danone le 1er octobre !
Compagnon de Marie Drucker, le nouveau directeur de Sciences Po est souvent présenté comme un arriviste. Autant dire qu’il a tout pour plaire à Macron. Il a flirté avec les socialistes tendance droite (dircab de Delanoë puis d’Anne Hidalgo), a commencé sa carrière dans la préfectorale, poursuivie dans la police puis à la SNCF avant d’aller pantoufler dans le privé. Autrement dit il est compatible avec celui qui n’est ni de droite, ni de gauche.
Les grandes manœuvres de Macron sont de petites tambouilles politiciennes, indignes d’un président d’une République démocratique. Aujourd’hui, on ne peut pas lui demander d’avoir le talent de René Clair.