La date n’a pas été choisie par hasard : il y a tout juste 60 ans, le 22 avril 1961, quatre généraux, Maurice Challe, Edmond Jouhaud, Raoul Salan et André Zeller, déclenchaient un putsch à Alger ; il a tout juste 19 ans, le 21 avril 2002, Jean-Marie Le Pen se qualifiait pour le second tour de l’élection présidentielle.

Le support n’a pas été choisi par hasard : Valeurs actuelles est ‘’le magazine de la droite qui s’assume’’, une droite qui s’assume à la droite de la droite la plus extrême.

Il n’y a donc aucun hasard dans les choix de vingt généraux à la retraite de publier une tribune en forme de lettre adressée au président de la République, aux ministres et aux parlementaires dans un magazine ouvertement raciste, auquel Emmanuel Macron et quelques ministres n’hésitent pas à s’exprimer dans de longues interviews.

Le choix de la date et des mots est un appel sans nuance à la sédition : se disant excédés par les ‘’louvoiements’’ et les ‘’silences coupables’’ face aux ‘’délitements’’, ils brandissent ‘l’intervention de nos camarades d’active dans une protection de nos valeurs traditionnelles et de sauvegarde de nos compatriotes sur le territoire national’’. Ils brandissent aussi la perspective de ‘’la guerre civile’’ qu’ils disent vouloir conjurer, mais qu’ils attisent.

La situation est grave ; les vingt généraux en rébellion se nourrissent des thèmes des extrêmes droites de toujours et de la logorrhée des fascistes, recherchant des appuis chez les catholiques intégristes, comme le cardinal Mercier, primat de Belgique. Marine Le Pen, oubliant sa nouvelle posture ‘’dédiabolisée’’, a retrouvé les accents de son père pour proposer une alliance électorale aux factieux.

On attend encore une réaction du président de la République, de la ministre des armées, du ministre de l’intérieur, du ministre de la justice et du ministre des affaires étrangères pour condamner l’initiative, poursuivre les signataires devant les tribunaux, au motif que, dans une République, c’est la politique qui définit le rôle de l’armée. Non l’inverse. Mais ni l’Elysée, ni Matignon, personne ne s’élève contre cet appel à l’insurrection contre les fondements de la République.

Pour rappeler que sur les drapeaux républicains, ce n’est pas Honneur et Patrie qui est écrit en lettres d’or, mais la devise de la République, Liberté, Egalité, Fraternité.

Les républicains, héritiers de la Révolution, doivent se lever contre ces nostalgiques du putsch d’Alger, par respect pour ceux qui ont lutté pour défendre les vraies valeurs républicaines dans toutes les circonstances, à l’opposé de ces factieux qui traînent derrière eux toutes les heures sombres du pays.