Un mois et demi de grèves et Emmanuel Macron ne cède rien ; particulièrement imbu de sa personne et se croyant investi d’une mission, l’énarque-président entend passer en force en ignorant les organisations syndicales (y compris la CFDT) qu’il considère comme un obstacle à sa politique de réforme de l’Etat et des règles sociales.

Il a d’ailleurs délégué à son premier ministre, le très réactionnaire et droit dans ses bottes Edouard Philippe, le soin d’entretenir une illusion de concertation que lui refuse.

Il a affirmé avoir été élu pour réformer et, par conséquent, il nie l’existence de toutes les instances qui pourraient s’opposer à son grand dessein, une sorte de grand remplacement de la protection sociale par l’ordre néolibéral.

Au nom de la fameuse théorie de la démocratie verticale, tous les pouvoirs sont détenus par le chef Macron et ses obligés. C’est en vertu de sa théorie qu’il prétend pouvoir contourner le pouvoir législatif du Parlement et agir par ordonnances, mais aussi réduire le champ d’intervention des organisations syndicales aux branches professionnelles et aux entreprises.

Comment dans une tel climat s’étonner des tensions que l’on peut constater chaque jour et de l’exaspération des grévistes insultés et humiliés.

L’explosion sociale n’est pas loin.

Faut-il s’étonner que des citoyens énervés s’introduisent au siège de la CFDT, que le théâtre des Bouffes du Nord (où le couple présidentiel assistait à la représentation de La Mouche) ait vu un rassemblement d’opposants à la réforme des retraites ou encore que la brasserie de La Rotonde ait été incendiée ?

La CGT a aussitôt condamné l’intrusion de manifestants au siège de la CFDT :

« Quels que soient les désaccords possibles entre organisations syndicales, la CGT ne cautionne pas ce type d’action. Chaque organisation syndicale est libre de son mode de fonctionnement, de son orientation et de ses revendications. La CGT réaffirme que son combat est celui contre la réforme des retraites par points et le gouvernement qui l’a décidée, rédigée et qui s’entête à vouloir la faire passer malgré les mobilisations et l’opposition majoritaire dans ce pays. »

Et le secrétaire général des cheminots CGT a en quelque sorte complété la prise de position de sa confédération :

« Les actions ciblant les réformistes sont des erreurs. Elles leur redonnent la parole dans les media sur un thème qu’ils adorent (la victimisation) alors qu’ils galéraient à expliquer leur compromission sur l’âge pivot. Restons sur nos critiques de la réforme des retraites. »

Ces réactions syndicales, frappées du sceau de l’intelligence, se démarquent de celle d’Emmanuel Macron, pitoyable et, comme d’habitude, mensongère :

« Il est clair que le débat démocratique n’est possible que dans le calme et dans le respect (…) Dans une démocratie, les idées peuvent s’échanger. On vote pour choisir ses dirigeants, ce sont nos représentants qui votent nos lois. »

Comment ose-t-il prétendre que les idées peuvent s’échanger quand il ignore les organisations syndicales porteuses d’un autre projet que le sien ? Quand il ressasse que le vote terminé, le chef n’a plus de compte à rendre ?

Et que penser de la réaction de la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, qui ose affirmer avec son aplomb habituel :« Sans syndicats, pas de démocratie sociale. »

Aujourd’hui, Sibeth Ndiaye a raison, mais sans doute est-ce un lapsus de sa part : il n’y a pas de démocratie sociale puisque les organisations syndicales sont mises sur la touche et privées de réelles négociations.

Hélas, d’autres actions violentes sont à redouter, malgré la politique de répression auquel s’adonne le pouvoir. L’explosion sociale est proche.

Les violences seront condamnées et condamnables, mais la violence d’Etat ?