J’en suis de plus en plus persuadé (et dépité) : la France est malade de sa classe politique et de ses médias à leur image parce qu’à leur solde.

Pour faire moderne, nul besoin de programme (d’ailleurs, ils sont jetés à la corbeille le lendemain de l’élection). Mais besoin de petites phrases bien ciselées, apprises par cœur. Vous savez par avance que les journalistes formatés vous poseront la question vous permettant de la placer. Ensuite, elle sera reprise, ‘’twittée’’, commentée. Largement plus que votre programme.

La caricature du nouvel homme politique était incarnée par Donald Trump et ses ‘’tweets’’. Mais nous avons aussi nos champions de la petite phrase.

Xavier Bertrand, député UMP, puis ministre depuis 2002, a une longue carrière derrière lui ; il aspire aujourd’hui à la présidence de la République. Et il penche de plus en plus ouvertement vers l’extrême droite. C’est sans doute pour cette raison qu’il s’est cru autorisé à déclarer : « Il y a une forme de numerus clausus qui ne dit pas son nom en France. La justice est obligée de juger en fonction des places de prison disponibles. Je propose 20 000 places supplémentaires. »

Celui qui a eu des fonctions élevées dans l’appareil d’Etat ment en toute connaissance de cause. Son affirmation est fausse. Mais quand les policiers manifestent et dénoncent le laxisme de la justice, Xavier Bertrand sait qu’il sera entendu et repris dans les médias.

Son ex-compagnon de l’UMP, Gérald Darmanin, ci-devant ministre de l’intérieur, déclare, lui, à propos de la délinquance dans L’express : « J’aime beaucoup les enquêtes de victimisation et les experts médiatiques, mais je préfère le bon sens du boucher-charcutier de Tourcoing. » Il visait les enquêtes de l’INSEE.

La petite phrase est idiote, malgré le bon sens du boucher, mais elle est surtout insultante pour les salariés de l’INSEE et tous les chercheurs qui contredisent les mensonges relatifs à l’augmentation de la délinquance.

Dans ce concert, Philippe de Villiers a remporté la palme de la petite phrase la plus imbécile ; sur CNews, évidemment, et devant Pascal Praud aux anges, il a déclaré avoir été en contact avec le célèbre bonimenteur Didier Raoult :« Le colloque entre le malade et le grand professeur restera secret à jamais. Il ne sera même pas ouvert pour les archives de la médecine. J’ai été un cobaye. Il m’a dit : ‘’Ne vous inquiétez pas vous allez survivre’’. » Puis, il a ajouté que le charlatan lui avait prescrit un traitement au Ricard : « Je l’ai pris normalement comme on le prend à Marseille. Il faut au moins deux doses. Le premier soir, un premier verre à ballon. Le deuxième soir un verre à Ricard. Là ça allait beaucoup mieux et au bout de trois jours, j’étais guéri. C’est peut-être l’anis, je n’en sais rien. »

Comment un journaliste peut-il accréditer de telles fariboles sans réagir ? Il faut être en France sur une chaîne Bolloré !

Les élus d’extrême droite, encouragés à se dépasser pour ne pas se laisser déborder sur leur droite (c’est encore possible), doivent se distinguer. Alors, par exemple, l’élu du RN Stéphane Ravier a osé déclarer à propos du retour de Karim Benzema en équipe de France : « Qu’il joue pour l’équipe nationale, mais d’Algérie. » Rappelons que le racisme est un délit.

Enfin, les policiers se lâchent aussi, comme François Bersani, secrétaire départemental des Yvelines du syndicat Unité-SGP-FO) qui a dit en pleine manifestation : « Nul doute que si cette mobilisation s’avère très efficace aujourd’hui, les digues céderont, c’est-à-dire les contraintes de la constitution, de la loi. »

Il s’agit d’un appel à la sédition, car la Constitution et la loi sont les fondements de la démocratie. M. Bersani lance un appel semblable à l’appel des militaires. Qu’en pense le secrétaire général de la confédération FO ?

Décidément, oui, la démocratie est malade ; elle est attaquée de toutes parts et les politiques se vautrent dans l’ignominie. Autant de bêtises sont inquiétantes et sont le reflet d’une compétition, à droite et à l’extrême droite, pour pourrir le nécessaire débat des prochaines élections en apeurant les citoyens.