L’Elysée continue à retenir son souffle après l’annonce de l’abandon du statut de commandite par le groupe Lagardère pour celui de société anonyme. Certes, Vincent Bolloré n’a pas (encore) mis la main sur Europe 1 en pleine période électorale ; mais il s’agit d’une simple illusion. Dans une société anonyme, le premier actionnaire (26 % pour Bolloré) a un vrai pouvoir d’influence, surtout quand il est épaulé par deux autres poids lourds, Amber Capital (20 %) et la fonds souverain du Qatar (13 %).

Des informations commencent à filtrer : des synergies seraient déjà envisagées entre la radio Lagardère et les chaînes de télévision Bolloré. Emmanuel Macron doit avoir des sueurs froides. Imaginer Zemmour et Praud sur Europe 1, le président vertical n’ose y croire !

Dans l’opération à plusieurs centaines de millions d’euros, tout le monde n’est pas sorti gagnant, à commencer par les salariés. Ceux d’Europe 1, par exemple, ont été priés de se déclarer volontaires pour quitter la radio qui sombre. D’autres suivront. En revanche, le patron, Arnaud Lagardère, a bien négocié et il a su préserver son emploi : son poste de Pdg lui est assuré pour 6 ans et en contrepartie du changement de statut du groupe, il recevra 10 millions d’actions à 22 euros. Ainsi il deviendra actionnaire à hauteur de 14 % au lieu de 7,6 % aujourd’hui ; de quoi doubler ses dividendes.

Le monde des médias est impitoyable, mais pas pour tous. Les milliardaires savent préserver leurs intérêts, même dans le cas où ils ont conduit leur groupe à la catastrophe.

Quant à l’information elle est maltraitée par les mêmes qui ont passé des « menottes de l’esprit » » à leurs journalistes.

Pour comprendre comment se fabrique l’information à l’ère des Bolloré et Lagardère, on peut utilement se reporter à mon dernier livre, « Journalistes, brisez vos menottes de l’esprit » (Editions Maïa, 19 €). C’est édifiant.