Crever (et non mourir) dans un camion, sans doute après une longue agonie, quoi de plus atroce ! Quoi de plus inhumain dans un siècle qui se veut évolué !

Des réfugiés, femmes, hommes et adolescents, ont crevé comme des bêtes après avoir parcouru des milliers de kilomètres. Ô honte, ils ont crevé là où ils rêvaient de vivre dignement.

On ne saura sans doute jamais quel fut leur périple pour arriver aux portes de Londres, les cadavres sont muets.

Ils rejoignent les milliers de morts, souvent sans nom, qui ont crevé en Méditerranée ou en Libye ou ailleurs, parce qu’ils voulaient vivre tout simplement. Ils sont morts parce que les gouvernements occidentaux ont érigé des murs au sens propre ou au sens figuré pour préserver, disent-ils, les racines chrétiennes de nos pays. Et au nom de la sécurité de populations ubérisées ou au chômage pour lesquelles ils n’ont que mépris et ne veulent pas voir ; populations à qui on rabote les aides sociales et les services publics, y compris celui de la santé.

Ceux qui refusent l’inhumanité sont poursuivis comme des délinquants.

Les mots manquent pour dire toute l’horreur de la situation d’un monde, où les bruits de bottes sont de plus en plus effrayants et assourdissants.

Nos gouvernants et les chaînes de télévision à leur solde mêlent leurs voix pour dresser les gens de peu contre les immigrés et les réfugiés. Zemmour et Finkielkraut ont micro ouvert, comme toute la famille Le Pen. Mais, plus grave, des ministres déversent les mêmes discours, comme ce Jean-Michel Blanquer, indigne ministre de l’éducation, pourtant élevé dans les meilleurs établissements catholiques (sans doute a-t-il raté quelques leçons de catéchisme où Dieu et son fils appellent à la solidarité avec tous les pauvres).

Nos dirigeants éclairés qui font donner les forces dites de l’ordre, avec férocité et une rare brutalité, contre les cohortes de ceux qui refusent ce monde-là, tentent de détourner l’attention pendant qu’ils cassent tout ce qui avait fait de la France un modèle en matière sociale.

Quand les médias parlent des migrants en les accusant d’être des fauteurs d’insécurité, ils font voter des lois de régression.

Le dernier exemple en date est particulièrement affligeant ; il s’agit du principe historique de compensation des exonérations de cotisations à la Sécurité sociale à l’initiative du gouvernement. Les députés de la majorité rejoints par la droite ont voté la non-compensation par les finances publiques et le ministre des comptes publics, Gérald Darmanin, n’y voit aucune remise en cause du fonctionnement de la Sécurité sociale, alors que l’opération la privera de 2,8 milliards d’euros.

Ce gouvernement qui rabote toutes les aides sociales va-t-il amener les pauvres de France à émigrer à leur tour dans les pays plus accueillants, comme ceux qui ont crevé dans le camion anglais ?

La colère gronde comme à la Réunion, où Macron a été accueilli par une grève générale. Mais le président des riches continue à jouer les matamores et à se comporter avec dédain envers ses sujets. Pourtant il est mal en point pour en être réduit à aller chercher l’un des représentants les plus abjects de l’ancien monde, Thierry Breton, pour la Commission européenne.

Les réfugiés, les chômeurs et les pauvres n’ont rien de bon à attendre de tels dirigeants.

C’est avec beaucoup d’émotions que je dresse ce sinistre constat. Le cri des peuples doit encore s’élever et les consciences doivent se réveiller en vue d’une action civique de la plus grande ampleur possible pour renverser ce prétendu nouveau monde devenant chaque jour plus agressif. Il faut refuser de crever, ici ou dans un camion.