Les milliardaires sont un peu plus nombreux chaque année et, surtout, surtout, beaucoup plus riches. Milliardaires, ils parlent en milliards, jamais en dessous ; leur fortune n’est pas toujours propre, plutôt délictueuse, parfois d’origine criminelle, mais ce n’est pas le plus important. Ils sont chaque jour davantage avides de toujours plus de pouvoir et leurs banquiers sont priés de faire fructifier leurs immenses fortunes à la nanoseconde, à la vitesse de la lumière, et de la mettre à l’abri dans des paradis fiscaux, pour échapper aux curieux qui, devant tant de richesses impures, osent proférer quelques timides protestations.
Le marché est à leurs pieds, obséquieux.
Les grands spéculateurs n’ont que mépris pour ceux qui n’ont rien. Ils sont entourés de femmes et d’hommes, qui ont dénaturé le mot politique, chargés de faire régner l’ordre immuable et de faire croire aux protestataires et à ceux qui n’ont rien que les riches sont nécessaires au bonheur futur, collectif et individuel, grâce au prétendu ‘’ruissellement’’. Ils ont même fait croire à la fin des idéologies pour mieux installer la leur, si cruelle pour le plus grand nombre d’entre nous.
Les milliardaires osent tout, mentir, défier les règles commerciales, défier les droits sociaux, dérégler le climat, épuiser les ressources énergétiques non renouvelables, provoquer des krachs financiers dont ils feront supporter les effets aux pauvres. Toujours au nom d’un ordre immuable selon lequel il est naturel qu’il y ait des riches (toujours plus riches) et des pauvres (toujours plus pauvres).
Les femmes et hommes politiques qu’ils ont placés sous tutelle pour maintenir leur ordre sont pervertis ; ils sont avides de conquérir une part des richesses étalées sans vergogne sous leurs yeux. Eux aussi, donc, n’hésitent pas à imiter les méthodes d’enrichissement de leur entourage et de connaître une (petite) part de la gloire des puissants (parce que riches).
Ils s’essaient à l’utilisation des paradis fiscaux, aux dissimulations, aux postes grassement rémunérés et à la spéculation. Ce sont néanmoins des gagne-petit, invités à la table des riches seulement pour se voir intimer l’ordre d’adopter quelques mesures destinées à accroître dividendes et comptes numérotés.
Quelques ministres d’Emmanuel Macron, très maladroits (n’est pas milliardaire qui veut), sont poursuivis pour des délits qui ont à voir avec l’argent. De Richard Ferrand à Jean-Paul Delevoye. Nos milliardaires, Bernard Arnault, François Pinault, Xavier Niel, Patrick Drahi entre autres, sont restés étrangement muets quand leurs petits arrangements avec l’argent ont été dévoilés.
Les yeux de ceux qui triment dur et qui sont contraints d’avoir recours à la grève longue, dure et onéreuse pour défendre leurs acquis, leurs pensions de retraites, leur dignité et l’avenir de leurs enfants commencent cependant à s’ouvrir.
Paradis fiscaux, rescrits fiscaux, optimisation fiscale, dividendes, toutes ces magouilles mises en place par les politiques au profit des milliardaires commencent à être mieux connues et comprises du plus grand nombre ; ceux qui n’ont rien et à qui on veut encore rogner leurs maigres moyens de subsistance, s’émancipent du prêt à penser déversé par des médias colonisés.
Le cochon de contribuable grogne. De plus en plus fort. Les milliardaires ne les éblouissent plus et l’ordre naturel est contesté.
Ce qui est en train de se passer est encore insuffisant pour bousculer le prétendu ordre naturel, mais des perspectives de remises en cause commencent à s’esquisser.
Les complicités entre les milliardaires et les politiques commencent à êtres mises au jour. Aucun président n’avait été autant qualifié de président des riches avant Emmanuel Macron. Nous devons lui être reconnaissant d’avoir participé par son mépris, ses humiliations, sa morgue, ses insultes, ses répressions et sa politique à éclairer le débat. Il a laissé entrevoir que rien n’est perdu.
Cependant, pour reconquérir la démocratie préemptée par une caste, celle des nantis et de leurs valets, pour rétablir un Etat saccagé par les multinationales gavées de dollars, nous ne pouvons plus seulement nous plaindre et déléguer à des cheminots et à des agents de la RATP un droit de grève qui s’étiole à force de compter sur les autres avec une bonne conscience insupportable. Nous devons décréter l’intranquillité des riches, des petits Macron et de leurs banquiers. La démocratie ne peut plus attendre, car nos adversaires de classe, englués dans leur suffisance, ne lâcheront rien et ils nous opposerons toujours leur brutalité, économique, politique et policière.
A l’inverse, nous devons afficher nos solidarités, notre humanité, notre intelligence, nos trésors d’inventivité.
Eux ne sont pas les puissants et nous les faibles. Eux ne sont rien sans nous et nous, au contraire, pouvons nous passer d’eux. Ne soyons pas sur la défensive, mais à l’offensive. La démocratie, la vraie, ne se nourrit pas d’une domination de quelques-uns sur les masses populaires ; effaçons de nos esprits les schémas qu’ils ont tracé pour préserver leurs privilèges mortifères. Retisser les liens humains pour rejeter la dialectique du maître et de l’esclave, quelle tâche exaltante.
Aujourd’hui, nous n’avons pas besoin des idoles du fric, avec leur hiérarchie (Qui est la plus grande fortune ?) quand des millions d’humains crèvent de faim ; nous avons, au contraire, besoin d’une tendre complicité pour rétablir l’égalité, un mot superbe écrit au fronton des maisons communes, mais détourné pour nous tromper et perpétuer les insupportables privilèges.
Nous tous avons été trompés trop longtemps pour continuer à supporter leurs mensonges. Nous tous avons cru trop longtemps aux solutions individuelles pour trouver le bonheur, quand celui-ci est confisqué par quelques-uns. Nous tous avons été éblouis par un jeune président qui nous a fait croire à un monde nouveau quand il n’avait qu’un objectif, rétablir un Ancien Régime avec ses seigneurs (aujourd’hui les riches et les financiers), leur cour et ses manants (les salariés précaires).
Sortons de la vague d’obscurantisme qu’ils tentent de nous faire prendre pour le bonheur, pour nous projeter vers les Jours heureux imaginés par les vainqueurs des inhumains nazis.