On a prêté, à tort sans doute, à Victor Hugo la phrase célèbre : « Ouvrez des écoles, vous fermerez des prisons ! » Néanmoins, le père Victor en partageait le contenu. D’ailleurs, dans l’un de ses romans de 1834, Claude Gueux, il écrivait déjà :
« La tête de l’homme du peuple, voilà la question. Cette tête est pleine de germes utiles. Employez pour la faire mûrir et venir à bien ce qu’il y a de plus lumineux et de mieux tempéré dans la vertu. Tel a assassiné sur les grandes routes qui, mieux dirigé, eût été le plus excellent serviteur de la cité. Cette tête de l’homme du peuple, cultivez-la, défrichez-la, arrosez-la, fécondez-la, éclairez-la, moralisez-la, utilisez-la ; vous n’aurez pas besoin de la couper. »
Emmanuel Macron a pris ses distances avec l’écrivain ; il ouvre des gendarmeries en milieu rural et, en même temps, ferme des écoles. Il crée de nouveaux emplois de gendarmes et suppriment des postes de professeurs. Dans les deux cas, il fait des mécontents, mais, surtout, il marque sa volonté du ‘’tout répressif’’ plutôt que le ‘’tout enseignement’’. Il se refuse à féconder la tête de l’homme du peuple pour qui il n’a que profond mépris ; en revanche le corps de l’homme doit être prêt à n’importe quelle tâche au service d’un patron.
Le président hôte de l’Elysée peut paraître habile ; en réalité, il est aux abois et ne sait plus comment gérer une situation qui est largement la conséquence de ses choix ultra-libéraux.
La crise au Journal du dimanche ne pouvait pas rester sans réponse de la part d’un pouvoir qui se veut démocratique quand un patron illuminé et parti en Croisade pour sauver les valeurs catholiques traditionnalistes s’approprie la ligne éditoriale du journal. Il a donc décidé de lancer des Etats généraux de l’information. Il a confié la tâche à quelques prétendues sommités, écartant représentants des journalistes, citoyens, médias alternatifs et d’autres.
Le président du comité, Bruno Lasserre, n’est pas un inconnu ; c’est lui qui a inspiré la libéralisation du transport par car. On connaît le résultat ! L’une des membres du comité de pilotage, Camille François, est une enseignante-chercheuse, qualifiée de ‘’Visionnaire’’ par la MIT Technology Review, passée, comme par hasard, chez Google ; elle enseigne à l’université Columbia aux Etats-Unis. Cela vaut carte de visite ! Le délégué général est un petit Rastignac qui ne rêve que de gloire et qui, aujourd’hui, doit se contenter de gloriole. On n’attend rien de lui, sinon des préconisations de mesures donnant la primauté de la représentation des journalistes aux sociétés de journalistes pour court-circuiter les syndicats.
L’aréopage de ces Etats généraux est inconséquent mais il plait à Macron qui a tout fait pour écarter les organisations intermédiaires, à commencer par les Confédérations syndicales, de la démocratie.
Un régime qui a érigé le mépris en valeur cardinale sombrera dans le mépris !