Dans le monde de Twitter et de ses 140 signes, Silvia Avallone écrit encore des romans longs (et quels romans !), qui se lisent goulûment. Ils sont engagés, leur autrice est, elle aussi, engagée. Elle parle de notre vie quotidienne, dans le monde d’aujourd’hui, avec d’un côté ceux qui résistent à l’air ambiant et de l’autre ceux qui se regardent dans le miroir aux alouettes des applications des nouvelles technologies. Ses livres sont d’une intelligence réconfortante (très loin des best-sellers d’été) ; elle nous invite à réfléchir, encore et encore, à l’amitié et à toutes ses formes.
La narratrice, Elisa, est une intellectuelle qui ne succombe pas aux attraits des réseaux dits sociaux, mais qui vit avec son téléphone mobile. Celle avec laquelle se lie une amitié (et non l’Amitié, comme elle le précise en conclusion), Béatrice, devient une star de ces maudits réseaux. Elles sont tellement dissemblables, physiquement et humainement, que tout devrait les opposer. Leur éducation et leur famille aussi devraient les opposer. Eli est plutôt introvertie quand Béa est totalement extravertie, éblouie par la notoriété que lui procurent confidences et photos sur un quelconque Facebook ou un incertain compte Twitter, ou plutôt les deux. Pourtant des liens fusionnels se sont tissés entre elles jusqu’à une rupture qui ne pourra pas durer longtemps.
Silvia Avallone brosse les portraits croisés des deux adolescentes (voisines de table au collège) jusqu’à la trentaine, dans un récit puissant, écrit avec des mots, simples certes mais toujours justes et choisis avec minutie.
Internet les a brouillées et éloignées, mais l’amitié est si forte qu’elle finira par les rassembler dans une nuit alcoolisée du 31 décembre.
Silvia Avallone a choisi : la littérature (ses longs romans) est seule capable de résister au monde nouveau du ‘’paraître’’ ; elle a choisi et elle le fait avec un rare brio narratif.
Silvia Avallone avait conquis le public avec D’acier, puis Marina Belleza et La vie parfaite. Avec Une amitié, elle poursuit son étude d’une société, dans laquelle elle a opté pour le point de vue des femmes. Et c’est étourdissant.
Une amitié (Liana Levi piccolo, 570 pages, 13,50 €)