C’est la fête des mères et, avant toute chose, il faut tordre le cou à une idée fausse.
Non, l’odieux maréchal Pétain n’est pas à l’origine de la fête des mères. On trouve déjà des cérémonies en l’honneur des femmes dès l’Antiquité en Grèce (en l’honneur de Rhéa, la mère des dieux) et à Rome (la fête des matrones).
Plus près, les Anglais fêtaient le Mothering Sunday et aux Etats-Unis, on célébrait le Mother’s Day. En France, c’est le gouvernement d’Aristide Briand qui décréta dès 1926 la Journée des familles nombreuses. Le collabo Pétain, lui, s’empara de cet hommage aux mères pour célébrer la famille et faire de la femme le symbole de sa politique réactionnaire où, dans un régime patriarcal, elle n’avait d’autre fonction que d’être génitrice, recluse au foyer en élevant ses enfants, astreinte à toutes les tâches matérielles et soumise à son mari.
Quand la France replonge dans la réaction et ne reconnaît toujours pas l’égalité des deux sexes, il n’est guère étonnant que la fête des mères retrouve ces relents nauséabonds. Sans parler des retombées commerciales.
La fête des mères est trop liée à la réaction pour perdurer, au moment où le mouvement pour l’égalité femme/homme prend, heureusement, de l’ampleur et gagne de nouveaux droits. La femme mérite mieux qu’une simple fête des mères quand l’émancipation reste un discours de circonstances pour le pouvoir et le patronat, unis comme jamais pour reporter à demain l’égalité salariale et la reconnaissance de tous les droits les plus élémentaires dans la vie de la cité.
Je terminerai ce billet par un extrait du Fou d’Elsa, d’Aragon, dédié à Elsa Triolet :
L’avenir de l’homme est la femme
Elle est la couleur de son âme
Elle est sa rumeur et son bruit
Et sans elle il n’est qu’un blasphème
Il n’est qu’un noyau sans le fruit
Sa bouche souffle un vent sauvage
Sa vie appartient aux ravages
Et sa propre main le détruit
Je vous dis que l’homme est né pour
La femme et né pour l’amour
Tout du monde ancien va changer
D’abord la vie et puis la mort
Et toutes choses partagées
Le pain blanc les baisers qui saignent
On verra le couple et son règne
Neiger comme les orangers
Le poète a toujours raison qui voit plus loin que l’horizon, chantait Jean Ferrat. Ô combien il avait raison !