Dans de nombreuses discussions avec des amis revient, comme une antienne, le déficit démocratique, mettant en cause jusqu’à la citoyenneté et la pauvreté du débat public.
Certes, nous nous sommes éloignés de Maximilien Robespierre constatant que « les hommes d’affaires se sont toujours chargés d’enseigner eux-mêmes l’arithmétique afin que personne ne puisse vérifier leurs comptes ». Encore que…
Un syndicat, la CGT, a fait de la lecture un axe majeur de son activité. Eugène Varlin, dès la fin du XIXe siècle, encourageait les travailleurs à lire pour parvenir à leur émancipation et à leur affranchissement. Dès 1905, les Bourses du travail se dotèrent d’ailleurs de bibliothèques et la Confédération créera même une école de bibliothécaires.
Les dirigeants successifs insisteront tous pour développer la lecture. Ainsi Georges Séguy écrivait-il en 1981 :
« Chez nombre de militants, la sous-estimation de la lecture des livres repose, bien sûr au-delà des obstacles matériels et culturels objectifs, sur la méconnaissance de l’apport spécifique irremplaçable du livre. Et pourtant rien ne peut remplacer le livre comme instrument de l’intelligence globale de la réalité en transformation. Il nous faut veiller à privilégier le livre, tout simplement parce qu’il reste aujourd’hui pour beaucoup de travailleurs le passeport obligatoire pour accéder à d’autres activités culturelles. »
Nous sommes à une époque où le mouvement social est affaibli (malgré la puissante opposition sociale à la réforme des retraites) et où les comités d’entreprise (aujourd’hui transformé en comité social et économique par Macron en 2018) ont vu leurs moyens matériels et humains réduits drastiquement. Mais la CGT relève le défi.
Son Institut d’histoire sociale (IHS-CGT) organise son 6e Salon du livre d’histoire sociale (dans sa définition la plus large) mardi 7 novembre à la Bourse du travail de Montreuil, dont le thème est « Lire, penser, agir ». On y revient toujours.
Pour ne plus avoir à constater le déficit démocratique, l’initiative doit être soutenue et encouragée. L’occasion de rencontrer auteurs (en sciences sociales et humaines, historiens, économistes, sociologues), romanciers de fictions, auteurs de bandes dessinées, éditeurs et acteurs de la vie sociale, dont les œuvres questionnent le monde réel n’est pas si fréquente.
Comme l’écrivait en 1993 Jean-Michel Leterrier, alors responsable de la politique culturelle de la CGT, « Aux livres, citoyens ! »