Le titre de ce billet est provocateur. Un peu seulement, juste un peu. Les programmes de la chaîne du service public laissent cependant planer un doute sur ma mauvaise foi. L’avis que je porte sur la situation dans laquelle se complaît France Télévisions aujourd’hui, est, je crois est partagé par nombre de citoyens.

Je m’autorise à affirmer que la droite a déjà colonisé le service public avant même l’adoption de la réforme de l’audiovisuel. C’était déjà le cas depuis des années ? Certes, mais la colonisation se répand à la vitesse d’une pandémie. Démonstration par les programmes de France 5.

A 18h, Caroline Roux envoie le générique de C dans l’air, une émission produite par Maximal Production, filiale du groupe Lagardère. La présentatrice est l’épouse de Laurent Solly, l’ancien chef de cabinet de Nicolas Sarkozy, aujourd’hui patron de Facebook Europe du Sud. Un très beau pédigrée.

Ce soir, elle n’a invité sur son plateau que des spécialistes fréquentables, les inévitables Dominique Seux (Les Echos de Bernard Arnault) et Christophe Barbier (éditorialiste à L’Express, du groupe de Patrick Drahi), l’omniprésent Elie Cohen (économiste libéral revendiqué) ; Sophie Fay de L’Obs était sans doute là comme la caution de gauche (caviar) ?

Aussitôt après, l’antenne est laissée à Anne-Elisabeth Lemoine pour C à vous, produite par 3e œil Productions appartenant à Pierre-Antoine Capton, le copain de Xavier Niel, avec lequel il a créé Mediawan, un fonds pour racheter médias et sociétés de production.

Anne-Elisabeth Lemoine, flanquée de Patrick Cohen, a invité Roselyne Bachelot et Christophe Castaner. La présentatrice est la fille de Brigitte Lemoine, dame patronnesse de sa paroisse puis maire (UMP) de Champagne-sur-Oise.

Il n’aura pas échappé au lecteur éclairé que les deux sociétés productrices sont privées. France 5 paie avec la redevance et diffuse. Et s’abstient d’intervenir sur le contenu. Vive la liberté de création grâce aux décrets de la ministre socialiste Catherine Tasca ! Tout cela est donc légal, à défaut d’être moral.

Je ne peux pas m’empêcher de voir dans les deux émissions l’exemple parfait du pluralisme foulé au pied dans une société de plus en plus inégalitaire, dans toute sa splendeur. Dans les deux émissions de débats sur des sujets d’actualité, comment ne pas voir la manifestation l’entre soi des beaux quartiers, celui que Monique Pinçon-Charlot a si bien décrit avec son mari Michel Pinçon ?

Je ne voudrais pas qu’on croie à une mauvaise foi qui ne m’habite pas. Caroline et Anne-Elisabeth ne doivent pas être jugées sur les choix de son mari pour l’une et de sa parentèle pour l’autre. Ce sont des citoyennes, libres et elles assument leurs propres choix.

Mais quand même, quand l’entre soi est porté à un tel niveau, comment ne pas ressentir un malaise ?

Et de s’écrier, pauvre service public !