Au moment où un nouveau soulèvement populaire, mais hétéroclite et brouillon, converge vers Paris, il apparaît tout à fait opportun de se poser une question de la plus haute importance : les Français ont-ils une claire conscience de leur chance d’avoir un président de la République aussi compétent que ne prétend l’être Emmanuel Macron ?
L’homme est jeune, dynamique, fier à bras (parfois hautain et même injurieux envers les gueux), brillant économiste, encore plus brillant diplomate sur la scène internationale. Bref, un président qui mérite bien le qualificatif de jupitérien.
Entre 2014 et 2016, encore jeune secrétaire général adjoint de la présidence de la République, puis ministre de l’économie, il avait eu à suivre la vente de la filière énergie d’Alstom au groupe américain General Electric (dont la filiale française était dirigée par Clara Gaymard). Il a eu le pouvoir de dire non ; il n’en fit rien.
La transaction avait soulevé une polémique, mais l’ex-banquier de Rothschild, n’avait soulevé aucune objection dans la cession d’un secteur stratégique à un concurrent américain ; que les turbines pour les centrales nucléaires passent sous le contrôle d’un groupe étranger en difficulté pour 12 milliards d’euros étaient dans la logique du fameux marché financier.
Mais 7 ans plus tard, GE de plus en plus en difficulté a remis en vente un pan de son trésor, à savoir les turbines Arabelle (celles qui équipent les centrales nucléaires et notamment les EPR). Et le président de la République a sommé EDF de passer à la caisse (273 millions quand même !). Il a même eu le culot d’aller à Belfort pour se glorifier de ce retour de la fabrication des turbines dans le territoire, en chantant cocorico.
Certains ont cru bon de lui rappeler que l’opération n’était pas à coup nul puisque EDF a dû s’endetter et, surtout, que 1300 emplois ont été perdus.
Le président jupitérien et l’ex-banquier d’affaires ont fait preuve d’une rare ignorance politique en sacrifiant maîtrise d’une filière stratégique, savoir-faire et emplois ; l’ultra-libéralisme lui a enjoint de se conformer aux objectifs du court terme, alors que s’il avait examiné les effets à plus long terme, il aurait dû s’opposer à la vente de la filière énergie d’Alstom à General Electric.
Il est possible dans ce monde-là qu’Emmanuel Macron n’en subisse aucune conséquence, quand ce qu’on peut qualifier de scandale devrait l’éclabousser et le pousser vers la sortie de l’Elysée.