L’expression utilisée par Emmanuel Macron « en même temps » trouve tout son sens au regard des événements d’aujourd’hui. Pendant que le président de la République imagine les mesures d’austérité qui lui permettront d’apparaître comme le seul recours pour l’élection présidentielle de 2022, ceux qui l’ont porté à l’Elysée font le ménage dans leurs affaires, notamment en concentrant les moyens d’information, d’éducation et de divertissement et, en même temps, font gonfler leur fortune.
Dans deux ans, le président sortant et ses amis seront interrogés sur le monde nouveau promis et jamais entrevu ; ils s’attendent à des interpellations nombreuses et circonstanciées. D’ici là, il leur est impératif de renforcer le contrôle des esprits et de circonscrire le débat public. Les mouvements qui se développent aujourd’hui sont encore largement corporatistes, comme ceux des personnels soignants, des enseignants, des chercheurs, des personnels des entreprises d’habillement, mais des convergences de luttes prennent corps.
Le contrôle des esprits est d’une urgence absolue pour ceux qui doivent leurs immenses fortunes à l’abrutissement des foules. Ils trouvent leur inspiration chez Edward Bernays, l’auteur de Propaganda, ou chez Patrick Le Lay, le patron de TF1 qui vendait du temps de cerveau disponible à Coca-Cola.
Emmanuel Macron recrute ses agents d’influence chez Xavier Niel, Vincent Bolloré, Marc Ladreit de Lacharrière, etc.
Ces prétendus grands dirigeants sont en train de passer des menottes à nos esprits en concentrant méthodiquement l’industrie de l’information et de la communication. C’est ainsi qu’il faut interpréter le grand remue-ménage qui secoue les sociétés de production audiovisuelle européennes.
Le trio composé de Pierre-Antoine Capton, Xavier Niel et Matthieu Pigasse vient de racheter en quelques jours seulement Lagardère Studios (soit 25 sociétés de production en France, en Espagne, en Finlande et aux Pays-Bas) et prendre des participations dans Leonine, société allemande , et Good Mood, société espagnole.
Les sociétés précédemment rachetées leur avaient ouvert les marchés français et italien.
Les trois compères ont dépensé des sommes rondelettes pour doubler de taille ; ils vont réorganiser leur groupe qui sera rebaptisé Mediawan Alliance, fort de 17 chaînes de télévision, d’une quarantaine de sociétés produisant grands reportages, magazines, dessins animés, fictions, séries, films, mais aussi films publicitaires ou institutionnels. Ils sont désormais en concurrence avec le groupe Banijay-Endemol, leader mondial de la production audiovisuelle.
Si on ajoute que Xavier Niel est présent dans le capital du groupe Le Monde, Télérama, L’Obs, La Vie, etc., du groupe Nice-Matin, du groupe France-Antilles (et que sa compagne, Delphine, est la fille de Bernard Arnault), qu’il a participé aux fondations d’Atlantico et Mediapart), que Matthieu Pigasse est propriétaire des Inrocks et de Radio Nova et actionnaire, lui aussi du Monde, que Vivendi (Bolloré) et Fimalac (Ladreit de Lacherrière) sont présents dans le capital de la holding qui contrôle le groupe Banijay-Endemol, on peut éprouver une sérieuse inquiétude quant à l’encadrement de l’information et du divertissement dans une bonne partie de l’Europe et, notamment, en France.
On sait que les deux groupes qui vont nourrir les terminaux (publics comme privés) ne sont pas les plus farouches défenseurs du pluralisme ; certains manient même la censure, quand d’autres n’hésitent pas à produire des émissions avec Eric Zemmour, par exemple.
Hier, c’était main basse sur l’information, aujourd’hui, c’est main basse sur les industries de l’information et de la communication. Robert Hersant, le papivore et même Patrick Le Lay étaient des nains si on les compare aux détenteurs des moyens d’information et de culture du plus grand nombre… Quand la crise s’approfondit, les riches tentent de mieux se protéger, en foulant les valeurs de la démocratie, qu’ils ne défendent qu’en parole.
Emmanuel Macron n’est pas à l’abri des colères du peuple de France, mais Niel, Pigasse, Bolloré et Ladreit de Lacharrière tentent de le mettre à l’abri avec un pognon de dingue. Nous savons et nous n’avons pas le droit de les laisser faire, avec un peuple qui grandit dans l’adversité.