Macron ou Blanquer, Darmanin ou Schiappa, Zemmour ou Le Pen ont une curieuse définition de la laïcité. Ils la prétendent fermée et déclarent vouloir l’ouvrir. Tous ne l’invoquent que pour s’attaquer aux seuls musulmans ; ils ne font parler Dieu que pour combattre une religion, celle du Coran, et pour restreindre les libertés, toutes les libertés. Quelle aubaine en cette période de campagne électorale (déjà).
Ils ne parlent du danger de séparatisme que pour imposer aux enseignants une laïcité fermée, rabougrie, quand la vraie laïcité est nécessairement ouverte, et pour imposer un ordre aux relents d’Ancien Régime.
Quand Blanquer parle d’enseigner la laïcité, il déroule un discours aux antipodes de sa politique de l’enseignement ; son école faisant la part belle aux établissements privés ; son école étant caporalisée avec des directeurs décidant de tout (y compris du choix des enseignants et des programmes pédagogiques) et transformant les professeurs en simples exécutants. Au diable la liberté de l’enseignant, l’école commune et la construction de l’esprit critique. Place aux prétendues ‘’valeurs de la République’’.
Le rôle des enseignants est de « de populariser les idéaux de liberté, d’égalité, de justice, de dignité humaine », comme le disait si bien Jean Jaurès. Parfois et même souvent contre l’obscurantisme du religieux ou de la famille. Car la laïcité n’a d’autre but que d’émanciper le futur citoyen, en lui inculquant la liberté de conscience, l’égalité des droits, c’est-à-dire les acquis de la Révolution, qui avait non seulement aboli les privilèges, mais aussi la religion du Roi.
La laïcité ne combat aucune religion, mais les défend toutes, sans discrimination, et agit pour placer les citoyens à l’abri de toute tentative de mise sous tutelle. C’est en cela qu’elle a valeur universelle. La laïcité nie toutes les différences entre les humains et assure leur coexistence harmonieuse.
Il est dès lors évident qu’elle se heurte aux fous de dieu (quel qu’il soit, celui des catholiques, des juifs ou des musulmans), à ces nostalgiques d’un temps où les conflits entre les différentes religions se réglaient dans des guerres atroces. Elle se heurte aussi aux politiciens qui rêvent d’un régime autoritaire et, de ce fait, profitent du réveil des obscurantismes religieux et des traditions arriérées.
Un professeur est mort atrocement pour avoir tenté d’ouvrir ses élèves à la laïcité. Le plus bel homme qu’on puisse lui rendre, c’est cette phrase de Victor Hugo extraite d’un discours prononcé le 14 janvier 1850 à l’Assemblée nationale lors d’un débat portant sur un projet de loi sur l’instruction publique : « L’Etat chez lui, l’Eglise chez elle. »