Erri De Lucca vient d’écrire la plus belle déclaration d’amour à l’Europe ; son court texte (16 pages) est publié par la nouvelle collection de Gallimard intitulée Tracts (3,90 €), dont Antoine Gallimard dit qu’elle « fera entrer les femmes et les hommes de lettres dans le débat, en accueillant des essais en prise avec leur temps mais riches de la distance propre à leur singularité ».

Erri De Luca, donc, s’insinue avec ‘’Europe, mes mises à feu’’ dans le débat des élections européennes de mai prochain. La langue est merveilleuse comme toujours chez lui et le parti pris est assumé. Il est profondément, viscéralement amoureux de l’Europe, de la Nouvelle Europe, pas celle de Macron, encore moins celle de Salvini ou d’Orban et des autres. Son Europe est celle de la Méditerranée, ouverte, accueillante, intelligente, apaisée, un espace de liberté : « Enfin, pour moi, l’Europe, écrit-il,  est une zone franche de la liberté d’expression. » Il ajoute : « Les gouvernements des Etats d’Europe n’interfèrent pas dans les questions internes d’un Etat membre. Eux non, moi si ; j’interfère parce que pour moi ce n’est pas une question interne, ils ne sont pas seuls concernés. Ce sont des éléments importants de l’espace de libre expression dans notre si dense continent, où nous exigeons une liberté d’échange entre les personnes, et pas seulement entre les marchandises. Cette liberté n’est pas soumise à des dosages, à une posologie. »

Pour Erri De Luca, l’Europe des libéraux qui veulent fermer les frontières, « qui s’imagine verrouillée pour vieillir dans son hospice de luxe », a engendré des monstres d’égoïsme. Il dénonce le racisme (« qui n’a pas de fondement biologique »), le nationalisme (« périmé par l’histoire »)dont il diagnostique que ce « sont des pathologies, avant d’être porteurs de paradoxes politiques ».

Il considère que ceux, de plus en plus nombreux, qui sont atteints de ces pathologies « devraient être soignés par le service de santé publique et orientés vers une rééducation ».

Fidèle à ses engagements humanistes d’hier, Erri De Luca confesse qu’il doit à ceux qui ont à souffrir des politiques actuelles « d’être porteur de citoyennetés variées et de fraternité européenne. »

Son essai écrit en mars et complété par quelques textes antérieurs devrait être lu par tous les électeurs européens et repris par les candidats qui ne se reconnaissent pas dans les discours des Macron, Loiseau, Le Pen, Dupont-Aignan, Bellamy et quelques autres.

Comme il l’écrit, « Le remède obligatoire et immunitaire reste la lecture des livres du monde. »