Le dernier film de Bruno Dumont, France, a déchaîné les passions à Cannes (où il a été hué après sa projection). Aujourd’hui, le réalisateur qui se dit en guerre contre « la bienséance, la bien-pensance, le bien-disant » alimente les chroniques ; il a touché juste et Léa Seydoux avec lui.

J’ai relevé quelques phrases dans les interviews que Bruno Dumont a données à Télérama et à L’Humanité, qui donnent vraiment envie de voir le film, ancré dans la réalité d’aujourd’hui.

« France est une journaliste star qui n’est ni bonne ni mauvaise, c’est “un demi-clair matin”,pour reprendre l’expression de Charles Péguy. Elle vit dans un milieu devenu mythologique, un monde clos, une bulle étanche, coupée de la réalité. Elle est un agent du système dont elle profite, mais elle s’éveille. »

« Le danger des médias et des réseaux sociaux, c’est qu’ils sont tous en train d’alimenter une sorte de pureté absolument dangereuse. Sondagière, catégorisante et moralisante. »

« Je ne condamne pas le numérique en soi, je condamne l’emploi qu’on en fait. Idem pour la télé, il faudrait qu’elle retrouve sa mission première : informer, éduquer, divertir… Il faut aujourd’hui voir la misère culturelle, dans certains territoires, c’est dramatique. » (Télérama)

« C’est un milieu qui est devenu ce qu’il est en s’inventant lui-même avec lâcheté, un monde qui s’est formé selon la pensée numérique la plus épouvantable qui nous conduit à être, à fonctionner en simplifiant les choses, en les réduisant, et surtout en les disproportionnant. Le problème des journalistes, à l’image de mon héroïne, France de Meurs, interprétée par Léa Seydoux, est que la hiérarchie des informations n’existe plus dans le monde qui est le leur. Leur conscience professionnelle est noyée dans l’obligation de rentabilité. Je ne doute pas du fait qu’ils soient des gens bien, mais le milieu industriel dans lequel ils évoluent est un lieu tragique. » (L’Humanité)

Le milieu industriel des médias est effectivement tragique ! France est son antidote.