Missak Manouchian a été fusillé par les nazis le 21 février 1944 ; aujourd’hui, il est entré au Panthéon.

Rescapé du génocide arménien par les Turcs, il est enfin reconnu après connu de multiples désillusions, comme le refus de sa naturalisation ou son effacement pendant 80 ans de la mémoire de la Résistance.

Aujourd’hui, un ouvrier communiste arménien, immigré, Résistant ayant choisi de faire don de sa vie, par fidélité à ses engagements pour que la France reste le pays de la liberté, entre au Panthéon et ce n’est que justice.

Louis Aragon, l’immense écrivain, lui a consacré l’admirable, Strophes pour se souvenir. Elles sont à lire, à relire (ou à écouter interprétée par Léo Ferré) pour ne pas oublier ce que nous devons à Missak Manouchian, son épouse, Mélinée, ses camarades de l’Affiche rouge et des FTP-MOI, et tous les Résistants engagés contre le fascisme et le nazisme au moment où la ‘’bête immonde’’ est à nos portes.

Vous n’avez réclamé la gloire ni les larmes
Ni l’orgue ni la prière aux agonisants
Onze ans déjà que cela passe vite onze ans 

Vous vous étiez servi simplement de vos armes 

La mort n’éblouit pas les yeux des Partisans

Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes 

Noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants

L’affiche qui semblait une tache de sang
Parce qu’à prononcer vos noms sont difficiles 

Y cherchait un effet de peur sur les passants

Nul ne semblait vous voir français de préférence
Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant
Mais à l’heure du couvre-feu des doigts errants
Avaient écrit sous vos photos MORTS POUR LA FRANCE 

Et les mornes matins en étaient différents 

Tout avait la couleur uniforme du givre
A la fin février pour vos derniers moments
Et c’est alors que l’un de vous dit calmement 

Bonheur à tous Bonheur à ceux qui vont survivre
Je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand 

Adieu la peine et le plaisir Adieu les roses
Adieu la vie adieu la lumière et le vent
Marie-toi sois heureuse et pense à moi souvent 

Toi qui vas demeurer dans la beauté des choses 

Quand tout sera fini plus tard en Erivan 

Un grand soleil d’hiver éclaire la colline
Que la nature est belle et que le coeur me fend 

La justice viendra sur nos pas triomphants
Ma Mélinée o mon amour mon orpheline
Et je te dis de vivre et d’avoir un enfant 

Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent 

Vingt et trois qui donnaient leur cœur avant le temps 

Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant
Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir
Vingt et trois qui criaient la France en s’abattant.