L’avis du Conseil d’Etat mérite mieux que le mépris affiché autant par Emmanuel Macron que par Edouard Philippe, et par son traitement a minima dans les médias.

Le Conseil d’Etat fait toujours preuve d’une grande prudence dans la formulation de ses avis et un événement inédit s’est produit à l’occasion de l’étude du projet de loi sur les retraites.

Il est incontestable que l’avis des juristes du Conseil d’Etat est une condamnation sans précédent d’un projet gouvernemental.

On peut comprendre que le président de la République ne tienne pas à étaler sa rancœur et son courroux (Anicet Le Pors parle à juste titre de maltraitance de l’Etat de droit) ; son silence démontre son mépris vis-à-vis d’une institution qui joue un rôle essentiel dans le fonctionnement de l’appareil législatif.

La faiblesse du travail du gouvernement est férocement pointée (à l’école, cela vaudrait un zéro pointé !) ; le contenu de la réforme est déclaré inacceptable avec des arguments forts et définitifs.

En revanche, les médias se comportent une nouvelle fois comme des agents de propagande. L’avis du Conseil d’Etat ? Silence, on ne gène pas Macron et sa réforme, décrétée dès le début indiscutable et nécessaire.

Après avoir maltraité les grévistes, les médias terminent leur sale besogne. Peut-on imaginer un gouvernement de gauche (une vraie gauche) se faisant étriller par le Conseil d’Etat pour avoir vidé un projet de loi et prévoir 29 ordonnances pour en fixer les modalités d’application ? Les grands médias auraient crié au scandale et, sans doute, à la forfaiture.

Ils ne se sont pas jetés sur l’avis en question démontrant la dangerosité de Macron ; certains comme le quotidien économique de Bernard Arnault, Les Echos, ont même osé prétendre que l’avis n’était pas aussi négatif que cela. Le procédé est osé.

Emmanuel Macron est un récidiviste ; en Israël, il avait osé critiquer la décision de la cour d’appel de Paris qui avait déclaré pénalement irresponsable le suspect du meurtre de Sarah Halimi assassinée en 2017. La présidente et le procureur général de la cour de cassation ont, eux aussi, recadrés vertement le président de la République en rappelant que « l’indépendance de la justice, dont le président de la République est le garant, est une condition essentielle du fonctionnement de la démocratie ».

Comme à son habitude, Macron n’a pas dérapé. Il entend imposer aux institutions de se conformer à sa philosophie de démocratie autoritaire avec un fonctionnement vertical. On y revient.

L’exemple de l’autoritarisme de la Pologne n’est pas loin. Ubu non plus.