Les députés votent ce week-end (pourquoi un samedi et un dimanche ?) un projet de loi autorisant l’exécutif à prendre des mesures exceptionnelles et, notamment, de permettre au président et au gouvernement de décréter l’état d’urgence sanitaire et d’agir pas décrets et ordonnances. Il ne s’agira que de la cinquième loi en sept mois. Pis encore, depuis cinq ans et les attentats terroristes de 2015, la France vit quasiment au rythme de l’état d’urgence, avec comme conséquences des restrictions aux libertés fondamentales, liberté de déplacement dans l’espace public, liberté de réunion et liberté de manifestation.

La situation n’est pas anodine. Aujourd’hui, l’exécutif n’avait nullement besoin de renouveler l’état d’urgence sanitaire ; alors pourquoi ? Tous les juristes le savent, le répètent et le dénoncent : l’état d’urgence est une atteinte aux libertés ; il instille dans les esprits, par sa banalisation, l’habitude de vivre avec des restrictions dont on ne sort pas totalement. On constate au quotidien une concentration irrémédiable des pouvoirs d’un président qui se rêve en monarque absolu (ou presque), bien que jouissant déjà de pouvoirs exorbitants.

L’épidémie du coronavirus est instrumentalisée par un pouvoir contesté et contestable, aux seules fins d’asseoir sa gestion d’en haut, en limitant les pouvoirs de la représentation nationale et des corps intermédiaires, notamment les syndicats, bafouant la Constitution.

Parallèlement, on assiste à une restriction de la liberté d’expression ; l’exécutif n’instaure pas un état de censure, il agit par des biais plus subtils. C’est le ministre de l’intérieur qui vitupère ou le ministre de l’éducation nationale qui dénonce l’islamo-gauchisme, déniant à des défenseurs des droits de l’homme le droit de défendre les croyants de l’Islam ; il les accuse grossièrement d’être des alliés des terroristes et des adversaires de la République, leur intimant l’ordre de se taire.

Nous sommes dans une ère de confusion mentale inouïe.

Les libertés fondamentales sont gravement menacées ; le pouvoir exécutif prétendant défendre le peuple contre des adversaires fanatiques ou contre un sale virus s’attelle à démolir tous les acquis sociaux et sociétaux de soixante-dix ans de conquêtes sociales.

Ceux qui sont confrontés au quotidien à la santé, à la justice, à l’éducation, à l’information, ceux donc qui œuvrent pour les droits fondamentaux dans une société censée être démocratique, sont méprisés.

Ces hommages ne dépassent d’ailleurs que rarement le temps de la déclaration et ne se concrétisent pas dans les faits. Ils n’en sont que plus méprisables et irrespectueux.

La situation est tout simplement indécente, grave et dangereuse.